Plusieurs dizaines de victimes du détournement d'argent commis sur leurs comptes bancaires se sont rassemblés, hier, devant le siège régional de la BADR Banque de Tiaret pour s'enquérir de leur argent subtilisé et prendre langue avec les responsables. Hier, la déception était telle que certaines victimes de ce détournement n'osaient même pas avancer leurs noms de peur que des proches soient mis au courant de cette affaire, qui s'avère être un gros scandale financier. Des sources parlent de près de 80 milliards détournés, alors que d'autres relativisent en avançant le chiffre de 53 milliards. Depuis que le pot aux roses a été découvert, beaucoup d'autres milliards ayant migré sont revenus dans la caisse. «La manipulation des comptes s'opérait depuis plusieurs mois, comme en témoignent des attestations de solde en ma possession», clame avec colère un client désabusé. Une autre dame, exerçant une fonction libérale et craignant, elle aussi, les répercussions familiales, dit ne s'être rendu compte qu'après que deux chèques lui soient retournés impayés, alors qu'elle disposait de ressources dans cet organisme financier. Sur les 345 millions, elle n'a trouvé que 50 000 dinars. Le cas d'une autre victime suscite de la colère et de l'indignation: hier, alors qu'il devait prendre l'avion pour la Tunisie pour les besoins d'une opération chirurgicale, il n'a au final pas pu prendre son vol. Il nous raconte sa mésaventure : «Il y a quelques mois, j'ai vendu mon appartement et acheté un autre et j'ai déposé le reste, soit 190 millions, à la BADR, le 6 juin dernier. Le 19 du même mois, on m'a débité de tout l'avoir que j'avais, alors que cette somme devait couvrir mes frais médicaux pour un cancer du côlon». Une veuve, qui a perdu son époux tout récemment, a déposé tout le capital décès dans cette banque et est menacée d'expulsion. Les exemples foisonnent et convergent tous vers un dénominateur commun : les banquiers les ont floués. Hier, les victimes, hommes et femmes ne savaient où donner de la tête. Il n'y avait aucun responsable pour les rassurer. Les services de la brigade économique et financière ont commencé à traiter le dossier dans le secret le plus total, alors que l'opinion publique scandalisée en faisait ses choux gras. Selon certaines sources, «les manipulations dans les comptes ne datent pas d'hier, ils remontent à l'année 2017». Comptes courant ou épargnants, les indélicats fonctionnaires ont touché à presque tout le monde, que ce soit le petit épargnant ou l'homme d'affaires. L'un d'eux, sous le sceau de l'anonymat, et qui avait remarqué un manque de plus de 20 millions de dinars dans son compte a expliqué que «son groupe vient juste d'ouvrir un compte à la BADR, mais depuis l'éclatement de l'affaire il manque quelques 7 millions de dinars à son crédit». Autre conséquence de ce scandale financier : loin de constituer le dernier dans cette banque, c'est le réflexe d'une certaine clientèle, qui aurait émis le vœu de retirer son argent et de le déposer ailleurs. Si prolixes avant, les responsables de la BADR n'ont organisé aucune conférence de presse pour situer les responsabilités.