Amine Kouider est un chef d'orchestre exigeant et rigoureux à la fois. Dans cet entretien, il revient sur la programmation artistique de ce premier semestre qui sera à l'honneur au niveau de l'Opéra Boualem Bessaïeh de Ouled Fayet, tout en ne manquant pas de revenir sur la formation. – L'orchestre symphonique de l'Opéra d'Alger entame sa quatrième saison artistique. Qu'en est-il, justement, de la programmation de ce premier semestre 2019 ? Effectivement, l'Orchestre symphonique de l'Opéra d'Alger entame sa quatrième saison. Le programme du premier semestre allie toutes les composantes de notre programmation, c'est-à-dire de l'opéra, des ballets, de la musique symphonique, la formation de jeunes, le travail avec des solistes algériens et étrangers. Nous avons élaboré un programme des plus complets pour ce premier semestre. Nous commençons notre programme sur la base de deux manifestations par mois. C'est ce qui est déjà formidable. C'est une belle présence de l'orchestre sur la programmation de l'Opéra et sur la scène culturelle algérienne. Nous avons commencé l'ouverture de la saison en question, en septembre, par un concert sur Les valses de Vienne. Le spectacle s'est reposé, entre autres, sur une projection vidéo des valses de Vienne, accompagnés par l'Orchestre symphonique de l'Opéra d'Alger. Cela est vraiment l'interculturalité, ou encore l'inter-discipline entre la danse et tout ce qui est musique symphonique. Le deuxième concert, du 29 septembre, était consacré à l'artiste Amel Gherbi. Ce concert entre dans le cadre du dialogue des cultures, des mélodies et des instruments. L'artiste a chanté pour la première fois des extraits de Triavata et de Carmen avec une composante rythmique et une thématique algérienne. Il faut savoir aussi pourquoi nous faisons cela ? Car nous avons intitulé ce concert «Entre deux rives», la rive de la musique andalouse algérienne et la musique occidentale. Il faut savoir que par ce concert-là, il y a, aussi pour nous, une action de réappropriation de l'universalité de notre musique andalouse, puisque cette musique a donné naissance à la musique classique universelle entre le 12e et le 14e siècle. C'est une manière pour nous de nous réapproprier cette universalité et dire que notre musique arabo-andalouse est universelle. Et bien entendu, en deuxième partie, Amel Gherbi a chanté de la musique andalouse et chaâbie. Pour le mois d'octobre, votre serviteur a aussi une autre casquette de formateur. Après avoir invité de jeunes musiciens à faire partie de l'orchestre de l'Opéra d'Alger, où ils ont appris leur métier de musicien d'orchestre – pas uniquement d'instrumentiste – mais musicien d'orchestre. Il est à noter que j'ai soutenu plusieurs chanteurs d'opéra qu'on a accompagné. Il y en a plusieurs qui sont partis à l'étranger pour parfaire leur formation. Pour la première fois, il va y avoir un jeune chef d'orchestre algérien. C'est un étudiant que j'ai formé pendant trois ans. Je suis content de dire, aujourd'hui, qu'il y a la relève. Ce jeune Lotfi Saïdi va diriger le concert d'ouverture du 11e Festival international de la musique symphonique, qui se tiendra du 12 au 19 octobre. Ma qualité de formateur fait partie de mes prérogatives et surtout de ma passion. Pour le mois d'octobre, nous comptons inviter un grand pianiste ukrainien qui viendra jouer avec notre orchestre. Pour le mois de novembre, nous allons rentrer dans un grand événement qui est l'organisation d'un spectacle avec décor et costumes. Pour la première fois à l'Opéra d'Alger, il y aura la collaboration des trois institutions, rattachées à l'Opéra Boualem Bessaïeh de Ouled Fayet : l'Orchestre symphonique, l'orchestre national andalou et le Ballet. Il y aura 250 artistes sur scène autour d'un programme intitulé «Djazaïr El Majd». Ce spectacle parlera de notre Algérie, et ce, à l'occasion du 1er Novembre, avec la participation exceptionnelle du comédien Hassen Kechad. Ce dernier fera une déclamation des extraits de l'Iliade, de Moufdi Zakaria. C'est dire la richesse de ce programme avec toutes ces formations. C'est un très beau spectacle qui aura lieu le 2 novembre. Toujours en novembre, nous soutiendrons trois jeunes sopranos algériens, installés à l'étranger. Nous sommes en train de confirmer leur participation. Cela va s'appeler les trois divas algériennes de la musique classique, avec bien entendu l'Orchestre symphonique de l'Opéra d'Alger. Au mois de décembre, pour la première fois, nous allons écouter un opéra chanté en arabe, grâce au compositeur algérien Tarik Benouarka. Celui-ci est reconnu à l'international. Il a écrit des opéras, chantés en Egypte, dans plusieurs pays du Golfe et en Europe. Notre fierté, c'est d'avoir pour la première fois un opéra en langue arabe et composé par un Algérien, et ce, avec décor et costume. Pour terminer cette première partie de la saison, nous allons recevoir les ballets russes qui reviennent après un très grand succès du ballet du «Lac des cygnes». Là ça va être le ballet «Casse noisette». Et avec ce spectacle, nous terminerons la première partie de la saison. C'est une saison qui est axée sur la diversité de la programmation. – Si l'Orchestre symphonique d'Alger se produit régulièrement dans la capitale, il n'en demeure pas moins qu'il brille par son absence à l'intérieur du pays… Justement, notre souhait, c'est que notre orchestre symphonique de l'Opéra puisse jouer dans toutes les wilayas du pays. Cela serait quelque chose de vraiment formidable. Il faut préciser que nous pouvons décliner le grand orchestre en deux orchestres qui pourraient partir chacun dans une direction. – Sinon, quelles sont vos autres priorités du moment en tant que chef d'orchestre ? Je dirais que ma priorité première est d'asseoir la régularité des concerts de notre orchestre. Et que notre orchestre puisse être aider et soutenu de plus en plus, car c'est le seul orchestre que nous détenons dans toute l'Algérie. Je pense que cela serait bien qu'à partir de 2020, qu'on puisse rayonner dans d'autres villes de l'Algérie. Et puis après continuer cette programmation diversifiée et riche à la fois. – L'Orchestre symphonique d'Alger a réussi avec brio à fidéliser un public connaisseur… Pour la saison 2018-2019, l'orchestre symphonique de l'Opéra d'Alger a reçu à peu près 22 000 spectateurs sur 23 concerts répertoriés. C'est l'équivalent de 1000 personnes par concert. C'est exceptionnel. Jamais, au grand jamais, l'Orchestre n'a eu ce résultat, même auparavant quand il était un Orchestre symphonique national. Je pense que c'est grâce à tous les efforts de la programmation que je suis en train de mener depuis ces trois dernières années et aussi par le fait du lieu. Ce dernier permet de faire un très beau travail musical et technique. Je salue d'ailleurs l'équipe technique pour son soutien par rapport à tout cela. – L'Orchestre symphonique d'Alger se targue aussi de dispenser des concerts éducatifs intitulés «Enfance en musique » sous votre houlette… Effectivement, l'Orchestre symphonique de l'Opéra d'Alger a pour habitude de donner des concerts éducatifs pour enfants intitulés «Enfance en musique», sous ma direction. L'année dernière, nous avions 5000 élèves, et ce, en collaboration avec le minsitère de l'Education. J'ai fait des concerts éducatifs, où j'ai présenté des instruments musicaux à 50000 enfants sur six concerts. Cela a été une saison très riche. Pour l'instant, nous n'avons aucune collaboration avec les écoles, mais je pense qu'en janvier, on aura plus de cartes.
