La première semaine de campagne se clôture et les arrestations se poursuivent à un rythme infernal. On aura toutefois relevé un détail, alors que les prisons sont pleines, tous les panneaux des candidats sont vides. Ce qui fait penser à des installations d'art contemporain, pentaptyques à cinq volets serrés sans aucun visage dessus. Contribution artistique du ministère de l'Intérieur ? Non, probablement la peur de voir les affiches déchirées ou dégradées, ou encore le refus des colleurs d'affiche de servir la cause. Le résultat est en tous les cas visible : du vide à la place des têtes d'affiche et une campagne devant des publics rares avec renforts de malades mentaux et SDF lors des meetings, signe d'une élection schizophrénique avec des candidats sans visage pour des électeurs sans voix. En ce sens, Tebboune est bien dans le ton et a poussé l'irrationnel à ses limites. Dans une interview, il a estimé qu'il n'y a pas de détenus d'opinion et que les manifestants condamnés méritent leur sort, mais a accusé la justice de travailler pour d'obscurs intérêts après avoir mis l'un de ses proches, l'homme d'affaires Alilat, en prison, et de vouloir s'en prendre à son autre fils, très actif dans sa campagne. Son premier fils a d'ailleurs été emprisonné dans l'affaire du Boucher et, là aussi, Tebboune a accusé les mêmes réseaux occultes d'instrumentaliser la justice, qui n'est donc pas indépendante. C'est la question du jour : Tebboune, lâché par les médias traditionnellement alliés du régime, est-il toujours le candidat de l'Etat profond ? Si ce n'est pas lui, qui est-ce ? Belaïd ou Mihoubi ? L'information principale est qu'avec toute la logistique mise à sa disposition, Tebboune n'a pas pu remplir une salle de 150 personnes à Naâma – qui signifie «autruche» – à 10 km de sa ville natale Mechria –qui ne veut pas dire «achetée». Les panneaux sont vides, les discours et les meetings aussi. Ce qui ne veut pas dire que les urnes le seront aussi. L'Algérie nous a habitués à des surprises.