Construites dans le but de promouvoir la lecture publique, plusieurs bibliothèques restent toujours fermées faute de personnel tandis que d'autres manquent de fonds documentaires. Existe-t-il une politique d'encouragement de la lecture en Algérie ? Au vu de l'état dans lequel se trouvent les bibliothèques, notamment communales, dans la wilaya de Boumerdès, il est permis d'en douter sérieusement. Un simple tour à la bibliothèque de la commune du chef-lieu de wilaya, située au quartier Frantz Fanon, donne un aperçu désolant de la place accordée à la lecture dans notre société. D'abord, le lieu est exigu, ensuite, ce qui tient lieu de rayons n'est qu'un rangement successif d'anciennes étagères métalliques comportant de vieux livres, héritage d'une époque révolue. Même les dons de citoyens ne concernent souvent que des manuels scolaires dépassés. En fait, il s'agit plutôt d'une salle de travail que des collégiens et des lycéens des établissements proches fréquentent pour des révisions à la veille des examens ou des travaux périodiques. La dame chargée de la gestion de cette pseudo-bibliothèque possède un diplôme d'informatique. Elle explique : «C'est le seul travail que j'ai trouvé. Je suis vacataire et je perçois à peine 9000 DA/mois.» Elle n'a subi aucune formation qualifiante pour l'archivage des documents. Elle espère un meilleur poste de travail, un provisoire qui dure depuis des années. À Boudouaou, la bibliothèque communale à l'extérieur faussement rutilant comporte deux étages : le premier réservé aux enfants, le second aux collégiens et aux lycéens. Si les livres sont un peu récents en raison de son approvisionnement en 2016, date de son inauguration, ils ont peu de prise avec la réalité culturelle et intellectuelle du présent. Un don de revues en anglais, par exemple, croupit sur une étagère sans qu'aucun prêt ne s'y intéresse. A l'opposé, l'ouvrage indispensable qu'est le dictionnaire manque outrageusement. A la vue des livres consultés, deux titres d'inspiration religieuse – L'Enfer et Le Paradis – occupent les esprits d'un lectorat rare au vu des salles presque vides. «Ce n'est qu'en période d'examens que les fréquentations sont importantes pour, surtout, le travail en groupe», nous expliquent les gérantes des espaces de lecture, deux agents d'administration dans l'attente d'une intégration après avoir purgé des années de pré-emploi. Dans d'autres communes de la wilaya, la situation est pire. A Ammal, la nouvelle bibliothèque est fermée aux lecteurs malgré son achèvement. Elle est ouverte aux fêtes et réunions politiques. A Naciria, depuis 2015, la population attend son inauguration alors qu'elle a été équipée et dotée en livres. Bordj Menail ne fait pas exception. Aux Issers, un joyau architectural demeure toujours sous scellé. Prétexte mis en avant : manque de personnel. Le recrutement serait bloqué. On aurait pu faire appel aux recrutements des vacataires dans le cadre du pré-emploi, même si c'est pour mettre à la disposition des élèves un espace de travail. Au moins, ces derniers n'utiliseraient pas les portiques et autres endroits de fortune pour réviser. En fait, les responsables locaux semblent manquer totalement d'imagination. Au lieu de penser à des activités mercantiles, ils devraient réfléchir à rentabiliser la bibliothèque en organisant un service des prêts payés symboliquement ou un service de photocopies à des prix étudiés. D'autres bibliothèques sont encore au stade de projets qui n'en finissent pas de végéter sur place pour des motifs divers mais avec un résultat semblable. A Timezrit, c'est le manque de terrain d'implantation, à Chabet El Amer, c'est l'insuffisance de budget. Un avenant est indispensable. A Boumraou, dans la commune de Naciria, le problème de sol et les mauvaises études bloquent le projet depuis cinq ans.