Tout le monde se trouve désarçonné dans cette troisième guerre mondiale contre, cette fois-ci, un ennemi commun à l'humanité entière, mobilisée contre le coronavirus qui sème la terreur et la mort partout. Les Etats sont débordés par l'ampleur des dégâts occasionnés et le peu d'efficience obtenu de la lutte contre ce virus qui a déjà assuré sa reconnaissance comme mal du siècle, à ajouter à la liste des épidémies infectieuses avec leurs cortèges de victimes ayant marqué l'histoire de la santé humaine. Projetés en première ligne, nos professionnels de santé, particulièrement les cliniciens qui sont en contact avec les malades atteints du coronavirus, font ce qu'ils peuvent, avec les moyens disponibles et au péril de leur vie et celle de leurs familles. Ils découvrent, dans l'urgence, le combat homérique entre la science et le mal, la vie et la mort qui se déroule sous les yeux impuissants, pour l'heure, de la société savante. En l'absence d'un traitement certifié et après plusieurs semaines d'une lutte acharnée, au corps à corps, entre le virus, le personnel médical et tous les intervenants dans ce défi sanitaire transfrontalier, la communauté internationale et, singulièrement, la communauté scientifique et médicale ne sont pas plus édifiées aujourd'hui sur les moyens de riposte appropriés à mettre en œuvre en vue de faire face à la pandémie. Les expériences tentées çà et là avec un succès éclatant, notamment dans les pays asiatiques comme la Chine, la Corée du Sud et le Japon, font école et débat aujourd'hui dans les pays européens et aux Etats-Unis, les plus durement touchés par la pandémie. Alors que les premiers ont axé leur stratégie de lutte prioritairement sur la prévention, sur les barrières défensives érigées à travers différentes initiatives de la vie sociétale pour casser la chaîne de transmission du virus en n'envisageant le geste curatif que comme moyen d'accompagnement et d ‘appui, les seconds se sont lancés dans une course éperdue pour mobiliser le potentiel local de respirateurs et de salles de réanimation en cherchant, dans un contexte international de raréfaction du produit, à en acquérir toujours plus face aux besoins nouveaux de plus en plus pressants. Cette stratégie du tout curatif ne s'est pas avérée payante. Les Etats qui ont le plus réussi à s'en sortir avec peu de dégâts dans la lutte contre cette pandémie sont ceux qui ont compris très tôt la nécessité impérieuse de combattre le virus en amont, sur son terrain de prédilection : celui de sa propagation, en rendant étanche la chaîne de contamination. Une vidéo circulant sur la Toile montre comment, à Hong Kong, avec une population de 7 million d'habitants, en imposant le masque pour tous – pour les malades et les non-malades – l'épidémie a été contenue, voire presque banalisée, comme le montrent les scènes de la vie ordinaire dans cette grande métropole grouillante où les citoyens, tous masqués, vaquent normalement à leurs occupations. Ce bouclier a prouvé son indéniable efficacité au plan préventif et les avantages comparatifs qu'offre cette option par rapport aux barrières mises en branle par d'autres pays, dont le confinement de la population avec ses contraintes sociales et ses lourdes répercussions sur la vie économique. C est ce qui explique la ruée vers l'acquisition de ce bout de tissu à laquelle on assiste, mettant à rude épreuve les capacités de production du marché, dominé par la Chine. Pour avoir sous-estimé ce geste préventif de la disponibilité et de la généralisation du port du masque, qui s'est finalement révélé non seulement un outil indispensable de protection pour le personnel soignant au regard de la proportion des cas du virus enregistrés en milieu hospitalier, mais aussi pour toute la population, l'Algérie a pêché par un manque de vision stratégique qui risque de nous coûter cher. L'empressement des autorités à rattraper le coup en envoyant en mission spéciale des avions cargos de l'ANP pour acheminer, depuis la lointaine Chine, une première cargaison de masques et autres consommables de protection, des kits de dépistage du virus – tout aussi importants également pour avoir une meilleure visibilité de la maladie pour mieux la circonscrire et la combattre – dénote un recadrage dans la stratégie nationale de lutte contre la pandémie. On fait dans la débrouillardise, en comptant sur l'amitié séculaire algéro-chinoise pour avoir notre petite part de ce marché très sollicité, qui ne comblera jamais l'énorme déficit que nous accusons.