En cette période de pandémie au Coronavirus, l'Algérie n'a pu limiter les victimes et les dégâts qu'avant tout grâce au dévouement et au don de soi du corps médical et paramédical. Ce n'est un secret pour personne. La journée de la santé fêtée chaque 7 avril a été dédiée cette année entièrement à ce corps. Un exemple parmi d'autres, celui du Dr Ali Chibane, jeune médecin de garde (29 ans) à l'EPSP de Boumerdès depuis deux ans seulement. «Avec cette pandémie, j'ai largement eu l'expérience qui nous a manqué, faute de moyens, lors de notre cursus qui a été, faut-il le reconnaître, très rude.» L'étudiant en médecine qu'il était devait se rendre quotidiennement pendant sept ans des Issers, sa ville natale, jusqu'à la faculté d'Alger. «Mon choix pour cette discipline a découlé logiquement de mon amour pour la science et ma vocation de porter assistance à mes semblables.» «Lorsque le coronavirus est apparu en Chine, la première réaction de se tenir informé à travers une mise à jour des connaissances a été motivée par la curiosité intellectuelle. Mais, poursuit-il, sur le terrain, la rapidité de transmission nous a surpris. Des interrogations nous assaillirent avec la crainte de propagation de l'épidémie en Algérie, notamment au vu du manque de moyens.» Sentiment qui allait se renforcer avec la panique comme première réaction de la population : «Au cours des gardes à l'hôpital de Boumerdès, nous avons commencé à recevoir des malades souvent soumis à la phobie. Les fausses alertes se multipliaient. Mais des cas suspects étaient également repérés.» Et c'est là que le danger guette le personnel de santé. Un médecin et un infirmier ont été placés en quarantaine en attendant que les résultats du prélèvement rhino-pharyngite (PCR) envoyé par le service de prévention de l'hôpital de Thénia qui a pris la relève, à l'institut Pasteur d'Alger livre ses secrets. Heureusement, les résultats étaient négatifs. «Depuis, nous sommes contraints à des précautions de sécurité et d'hygiène drastiques. Une simple faute technique peut nous coûter très cher. Il suffit qu'on découvre une partie ou un objet de soi pour que le risque de contamination plane. Même vis-à-vis de nos proches, c'est un calvaire. Je n'ai pas vu mes parents depuis plus d'un mois. Quand je dois rendre visite à ma femme enceinte, je dois d'abord m'isoler pendant une dizaine de jours. Notre quotidien professionnel était harassant. Il nous arrivait de ne pas pouvoir manger des repas qui ont eu le temps de refroidir jusqu'à la fin de toutes les consultations. Maintenant, on souffle un peu. Les citoyens ont compris qu'il ne faut pas venir pour de simples maladies. Nous ne recevons plus que 20% de fréquentations par rapport à la normale. De plus, leur respect du confinement nous a énormément facilité la tâche.» Du coup, cela a permis de réduire le personnel médical pour contenir les risques. Des médecins ou infirmières sont également des mamans. Elles ont peur pour leurs enfants. Certaines qui allaitaient ne voyaient pas leurs bébés. Aujourd'hui, elles ont été les premières à bénéficier de la réduction d'effectifs. Autre solution qui réduit la tension sur les structures de santé est la récente mise sur pied d'un service de consultation à distance. «En fait, avec notre entourage et nos malades habituels, on le pratique déjà. Ils ont nos numéros de téléphone.» Cette fois, la direction de la santé et de la population de Boumerdès a mis sur pied une structure avec une équipe composée de plusieurs spécialistes qui, par téléphone, prodiguent des consultations et des conseils aux citoyens. C'est avantageux aux deux parties avec un risque de contamination zéro. Dr Ali Chibane ne baisse pas la garde, à l'image de tout le personnel de santé algérien. La vigilance se confond avec le sacrifice d'une corporation souvent mise à mal mais dont on mesure aujourd'hui la dimension vitale pour une nation.