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«Mahmoud l'Argentin, Roberto l'Algérien», les retrouvailles 50 ans après l'indépendance
Deux moudjahidine se revoient à Taboudoucht
Publié dans El Watan le 12 - 06 - 2014

Il n'y a pas de travail ou métiers manuels difficiles qu'il n'ait exercés dans sa vie.
Et, pour cause, il s'est de tous temps imposé les travaux les plus durs, salariés ou de labours sur sa propre terre, sans répit, pour assurer la nourriture de pas moins dix-huit bouches, entre frères, sœurs, parents, fils et filles. Autrement dit, «36 métiers, 36 misères» ironise le maire d'Aghribs, Rabah Irmèche, pour montrer «le courage et la grandeur d'âme de cet homme exceptionnel, qui ne s'est jamais plaint de quoi que ce soit». Il peut rester sans manger aussi longtemps qu'il le peut en simulant avoir déjà mangé à sa faim pour permettre à l'autre, à l'invité, au parent ou à l'hôte, de manger le bout de pain encore disponible, mais insuffisant pour tous. Il peut partager sa chemise pour que l'autre, son concitoyen, ne prenne pas froid.
Les produits et fruits de son jardin, qu'il entretient en permanence, appartiennent à tous. Tous peuvent y goûter, y prendre le nécessaire, sans contrepartie, sinon juste un merci. Ce personnage aux qualités humaines rares, c'est Mohand Akham, ou «Dda Mohand», comme l'appellent, affectueusement, femmes et hommes, jeunes et enfants de son village, Taboudoucht (Aghribs), ou tous ceux qui le connaissent hors de cette contrée des Aït Djennad, d'Azeffoun…
Issu d'une famille nombreuse et pauvre, Dda Mohand a connu, tout jeune —il avait à peine 9 ans au lendemain de la 2e Guerre mondiale— toutes les misères et les féroces famines d'alors. Il perdit sa maman en la période du typhus. Plus tard, il sillonne toute l'Algérie, notamment l'ouest du pays et même le Maroc, pour gagner un bout de pain pour sa famille. Dda Mohand n'a pas été à l'école, «mais l'école de la vie l'a cultivé et formé suffisamment» dira encore de lui le maire d'Aghribs. Et cette culture de la vie l'inspire chaque jour pour peindre ce qu'il a sur le cœur. C'est ainsi qu'il s'adonne à la peinture à l'eau ou à l'huile en peignant de beaux tableaux, qu'il expose et vend parfois pour assurer la pitance quotidienne à sa famille.
En 1958, à 22 ans, il rejoint la Révolution algérienne au Maroc où il rencontre un maquisard particulier, Argentin de nationalité, mais farouche ami de l'Algérie en lutte. Il s'agit de Roberto Muniz Mahmoud, ou «Mahmoud l'Argentin, Roberto l'Algérien», comme l'avait qualifié une fois un journaliste dont il ne se souvient pas du nom, nous dira le concerné. Roberto Muniz était alors ajusteur en mécanique et Mohand Akham, mécanicien aussi. Partisans avec sa femme, en Argentine, des luttes ouvrières et des droits des peuples, ils vouent un amour fou pour la Révolution algérienne en marche.
En 1956, Roberto Muniz réussit à organiser à Buenos Aires des meetings pour permettre au groupe de militants FLN sur place d'expliquer la lutte des Algériens contre le colonialisme français. Avec l'encouragement de ses camarades et de sa femme, Roberto débarque en Algérie en 1959 pour pouvoir aider cette Révolution, comme l'ont sollicité les représentants du FLN dans ce pays de l'Amérique du Sud. Ainsi, au Maroc, le FLN/ALN mettra à sa disposition, en compagnie d'un groupe de maquisards, parmi eux Mohand Akham, un atelier de fabrication d'armes de guerre. Ils y réaliseront ainsi plus de 10 000 mitraillettes et 100 000 chargeurs de munitions (10 chargeurs pour chaque mitraillette), ainsi que deux sortes de mortiers, un de 50 mm de diamètre et l'autre de 60 mm de diamètre, explique encore Mahmoud Roberto Muniz.
Ce matériel de guerre sera acheminé ensuite vers l'ALN de l'intérieur, nous dira-t-il. A l'indépendance, Dda Mohand Akham regagne son Taboudoucht natal pour continuer à travailler sa terre et entretenir ses arbres en plantant d'autres, tout en continuant à peindre de temps à autre des tableaux et fresques murales dans des cafés ou des restaurants, dans lesquels il exprime la misère des femmes et des hommes en Kabylie, la souffrance et la résistance des moudjahidine, des villages de l'Algérie sous les bombardements de l'aviation coloniale française. Quant à son ami, «Mahmoud l'Argentin», le FLN lui proposera de prendre la nationalité algérienne, s'il le désirait. Volontiers, bien sûr, mais à condition de ramener sa femme qui se trouvait, elle, à Buenos Aires, la capitale argentine. Simple formalité, le couple Muniz sera algérien à part entière.
Des retrouvailles, de la joie et une pluie de larmes de bonheur
Vendredi dernier (30 mai), Mohand Akham a soufflé ses 78 bougies, une occasion que Mme Djamila Kabla-Issiakhem, native de Taboudoucht elle aussi, et le fils du peintre, Abdeslam Akham, ont préparée adroitement, avec la «complicité» du maire d'Aghribs, pour rendre un méritoire hommage à ce moudjahid, à cet artiste-peintre, à ce paysan d'une immense modestie. Pour une telle fête, la famille Akham, avec la «complicité» de Mme Kabla Issiakhem et de M. Irmèche, a invité «discrètement» le compagnon d'armes de Dda Mohand, Roberto l'Algérien (91 ans) et son fils, prénommé «Mahmoud» par amour pour l'Algérie, faut-il le noter.
Djamila Kabla-Issiakhem, quant à elle, avait pris contact avec une pléiade de ses amis artistes et poètes d'horizons divers qui vouent, comme elle, un respect et une affection sans bornes à l'artiste-peintre et maquisard. Ces artistes de grande renommée sont notamment Aziz Fellag, un natif de cette région d'Azeffoun, Moussa Bourdine, «avec lequel j'ai grandi au Clos Salembier» précise Mme Kabla, Rachid Djemaï, sculpteur et un puriste dans le travail d'art, Naïma Doudji, enseignante en peinture et fille de moudjahid, Samia Skenazene, artiste-peintre, native de Tala Tegana (Fréha) «qui nous revient, tel un précieux cadeau, après 35 ans d'exil en France», explique encore Mme Kabla, Meriem Aït El Hara, «une autre artiste qui a pris part, en 2008, à un grandiose hommage que nous avions organisé à la mémoire de M'hamed Issiakhem et qui avait rassemblé plus de 50 artistes invités» ajoute l'oratrice, Valentina Ghanem, encore une artiste de Russie, qui a épousé un Algérien et sa nationalité, Fella Hassen, talentueuse journaliste bien connue de la Chaîne III de la Radio nationale, la jeune peintre miniaturiste, Rabhia Belabbes, venue de Tissemsilt «pour Dda Mohand, cet immense homme, tout fait de bonté», Fodil Bir, un jeune poète d'Aït Ouchene, village natal du grand musicologue universel, Iguer Bouchene, ainsi que le frère aîné de Dda Mohand, Belkacem Akham, lui aussi peintre, poète et ancien maquisard. Nous vous épargnons la description des chaudes larmes de joie versées par cet ensemble de personnalités du monde de l'art et de la Révolution à leur arrivée et lors des retrouvailles avec Dda Mohand, tous pris d'une forte émotion et de joie en même temps, en se sachant tous en bonne santé, après des années sans nouvelles de part et d'autre.
Présent sur les lieux, Ali Boucherrab, artisan bijoutier, patron de l'école de formation «Louiz Aqbor» de Fréha, avoue avoir eu «peur pour le cœur de Dda Mohand et de celui de Roberto au moment de leur rencontre» devant le spacieux local, mitoyen de la maison des Akham, aménagé à l'occasion en un espace d'exposition de tableaux de peinture et de photos historiques de Dda Mohand et de ses compagnons d'armes. Mahmoud Roberto Muniz et son fils, Mahmoud lui aussi, quadragénaire, ont fait une surprise à leur hôte de Taboudoucht en lui remettant un de ses beaux tableaux peints et abandonnés dans la «ferme-atelier» de fabrication d'armes au Maroc, un trésor que Roberto craignait de laisser se perdre sur place au moment de regagner l'Algérie.
Ce tableau, datant de 1961, montre une zone du village natal de l'auteur, avec une maison kabyle traditionnelle, ainsi que des paysans et des paysannes débitant et ramassant du bois, ramenant des provisions d'eau, etc. Des images nostalgiques défilant alors dans l'esprit du peintre qui se trouvait très loin du foyer familial de Taboudoucht. Roberto, qui est auteur, rappelons-le, de l'ouvrage «Mahmoud l'Argentin, un moudjahid latino-américain», édité par Marinoor et remis aussi à la famille Akham, déclamera ensuite un poème en espagnol en l'honneur de son compagnon d'armes, alors que le fils, Mahmoud Muniz, lira, devant une forte assistance de femmes, d'hommes et d'enfants, plongée dans une indescriptible émotion, un texte qu'il intitula «Akham» (La maison), sacrant «cette amitié entre deux hommes, car il ne s'agit pas de maison, l'un du Sud de l'Amérique et l'autre des montagnes du Nord de l'Afrique, la Kabylie. Quelle cause les a rassemblés et unis au Nord de l'Algérie ? Celle d'un peuple opprimé…» souligne en substance Mahmoud Muniz.
En visitant l'exposition, Samia Skenazene a été agréablement surprise de découvrir des photos de son père en compagnie de son compagnon d'armes, Mohand Akham. Elle promit alors de «faire tout pour récupérer des œuvres de cet auteur, détenues chez un membre de son entourage afin d'enrichir et protéger ce patrimoine artistique de Dda Mohand». «Après un an et demi de travail de fourmi avec cette cheville ouvrière qu'est le jeune Abdeslam Akham dans toutes les manifestations culturelles et artistiques, comme lors de la réalisation, en 2007, par les villageois de Taboudoucht, de la stèle à l'effigie de M'hamed Issiakhem, je m'engage encore, dans la continuité de l'œuvre, avec les mêmes collaborateurs, pour mettre en avant cette région jusqu'à devenir un vaste foyer de Beaux-arts et de rassemblement de nos artistes» a promis, en outre, Mme Kabla, une pionnière infatigable en la matière et amoureuse folle des arts en général.


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