De notre bureau : Détresse n «Je ne peux plus assurer la scolarisation de mes enfants avec mon minable salaire et je me dois d'empêcher mes deux filles de poursuivre leurs études.» C'est ce que nous a confié, dans la douleur, M. Souhil, père de cinq enfants scolarisés, ancien employé des postes et télécommunications, sorti à la retraite en 2006. Il avoue ne pas pouvoir se résigner à tendre la main ou aller faire la queue devant les associations de bienfaisance. «Je me dois de fournir un dossier et de m'inscrire avant d'être affilié et bénéficier d'une quelconque aide.» Au niveau des établissements scolaires de ses enfants, il a été précisé que la contribution de l'Etat n'est pas encore délivrée alors que certains enseignants exigent – déjà – la présentation de gros cahiers, des livres et les réponses à des exercices. «Mes filles ont leur personnalité et n'acceptent pas d'être quelque peu traitées en pauvres. Ce sont elles qui m'ont supplié de leur faire interrompre leurs études malgré leurs bons résultats en juin dernier.» «N'était ma foi profonde en Dieu, je me serais déjà jeté du haut d'un pont ! L'idée de mettre fin à mes jours m'a taraudé l'esprit depuis le début du ramadan. J'ignore comment les gens arrivent à joindre les deux bouts mais moi je n'en peux plus. Ma femme a fait du pain que nous avons revendu à des voisins durant le ramadan mais cela ne suffit pas. Il n'y a pas eu un seul jour – durant tout le ramadan – où nous avons pu déguster de la zlabia et ne me dites pas qu'il est facile d'en avoir auprès des âmes charitables.», soupire encore ce père de famille natif de Blida. Agés de sept à dix-sept ans, les cinq enfants doivent être habillés et porter des tabliers. «rien que pour les blouses, j'ai dû me débrouiller pour les dénicher auprès d'un grossiste à 3 000 DA et je ne parle pas de la qualité.» Concrètement, la famille vit en se partageant un salaire de près de vingt mille dinars et aucun «faux frais» n'est admis. «Je n'ai ni véhicule ni téléphone et je prends rarement le bus et les visites familiales sont limitées au strict minimum. J'aimerais bien que les responsables tentent l'expérience d'une vie durant un seul mois avec mon salaire et tout ce que cela suppose comme frustration. Je n'ai pas de vacances à offrir à mes enfants et mon honnêteté ne m'a pas permis de faire des «extras» à travers d'autres activités.» M. Souhil citera toutes les petites responsabilités, du syndicalisme à la vie associative et qui auraient permis de «se débrouiller». Un trousseau scolaire – tout à fait ordinaire – atteint les dix mille dinars ; trois mensualités totales sont donc nécessaires pour couvrir les besoins d'une rentrée «normale». Mellak victime de sa naïveté Un grand homme s'est éteint à Blida ce jeudi. Ali Mellak, 57 ans, a été finalement le maire le plus populaire de la ville de Blida dont il était natif. Universitaire et amoureux de la nature, il avait réussi le tour de force de «rouvrir» le jardin Patrice-Lumumba aux citoyens. Destitué en avril 2005 avec d'autres présidents de commune pour la fameuse affaire des «factures surfacturées» alors qu'il avait été le seul à s'opposer à leurs paiements, le défunt dut attendre longtemps avant d'être réhabilité sans toutefois réintégrer son poste d'élu. Dans son combat contre le wali de l'époque, il avait vu juste en déclarant à l'époque : «c'est le début de la fin, mais j'ignore si ce sera lui ou moi !» Lui qui ne voulait que «sauvegarder l'éthique de l'administration», comme il l'avait déclaré, tombera bien avant l'administrateur, sans que son parti, à travers la démarche de ses militants, de la kasma et de la mouhafadha, ait eu à le soutenir, prouvant ou démontrant qu'ils étaient au service des hommes forts du moment. La confiance aveugle de l'honnête homme dans l'appareil du parti fera encore des siennes en 2007 lorsqu'il se représentera comme candidat et toujours en tête de la liste. Cette dernière sera plébiscitée par la population blidéenne mais les autres élus, dans leur grande majorité, l'empêcheront d'occuper ce poste pour lequel il souhaitait apporter des changements radicaux dans l'intérêt de la commune : les élus décidèrent de coopter un des leurs par un vote interne et ce sera le début d'une crispation interne qui le mènera jusqu'à l'arrêt cardiaque survenu le jour même de l'Aïd. A son enterrement, tout Blida et les autorités seront présents. On a même remarqué la présence de Ali Benflis, l'ex-premier ministre, aux côtés des familles blidéennes. Basket-ball Le TBB Blida ignoré Vainqueur de la coupe d'Algérie à la fin de la saison écoulée, le Trèfle basket-ball Blida (TBBB) se voit menacé dans sa survie devant l'absence de toute aide financière lui permettant, au moins, de maintenir le cap. Noureddine Guessaïbia, manager du club et ancien basketteur – qui a même fait dire à quelqu'un qu'il était né avec un ballon de basket dans les bras – n'en revient pas : «Notre adversaire en finale a obtenu pour cette place de dauphin une aide de plus de dix millions de dinars alors que nous n'avons même pas été reçus dignement pour avoir défendu haut la main les couleurs de la wilaya et de la ville.» Rentrée sportive également en septembre, le club a vu quelques-uns de ses meilleurs éléments partir sous d'autres cieux plus compréhensifs sur le plan des engagements financiers et ce jeune club – moins de six années d'existence – devra sans doute rentrer dans les rangs et se contenter de seconds rôles et peut-être même disparaître si rien n'est fait pour sa survie. Formation professionnelle quand la bureaucratie fait des siennes Depuis deux années, Djamel Belfodil, un enseignant aujourd'hui à la retraite, ne cesse de ronger son frein pour avoir été victime d'une bureaucratie ne voulant pas dire son nom. Dans le cadre du Mepi, programme du département d'Etat américain avec le ministère de l'éducation nationale pour la formation des enseignants d'anglais, une année de formation a été programmée en 2007 pour 24 enseignants à Blida et le même chiffre à Sétif. Ce programme pilote était destiné à former encore des enseignants du moyen et du secondaire. L'enseignement – ou la formation – était sanctionné par un diplôme, le Quilt Certificate, délivré par un établissement international, sis à Vermont, aux USA. «J'ai été appelé à l'issue du cycle de formation par deux fois pour des conférences au collège de Ben-Boulaïd à Blida par deux groupes d'évaluateurs venus des Etats-Unis et je reçus, le 4 mai 2008, un premier courriel où on m'apprend que je suis retenu pour un programme de formation qui aura lieu dans plusieurs villes américaines, dont Washington.» Quelques mois plus tard, exactement le 18 octobre, l'enseignant formateur a eu un second contact pour les formalités d'obtention du visa programmé pour le 21 octobre, soit trois jours plus tard. «Dans les cinq mois écoulés entre les deux dates, je considère que toutes les formalités entre les deux parties étatiques étaient déjà accomplies. Or, à ma grande surprise, le contact avec mon ministère n'a eu lieu que le 27 octobre suivant. J'avais entre les mains le visa, les billets d'avion et le pécule que je devais toucher sur place, étant censé prendre le vol Alger-Washington via Paris prévu le samedi 1er novembre à 11h. Je n'ai été informé de l'annulation du programme par la direction de l'éducation nationale de la wilaya de Blida que le mercredi précédant mon départ. Depuis, aucune excuse jusqu'à ce jour.» Le tort psychologique occasionné n'a pas été évalué et comment convenir de mesures à même de réparer le préjudice envers cet enseignant, sa famille, son entourage professionnel et jusqu'à l'homme de la rue à travers les parents d'élèves ? «Depuis, j'ai quitté le corps de l'éducation nationale avec, en travers de la gorge, comme un couperet qui m'empêche toujours de voir l'avenir avec sérénité.» Après un long moment de silence, il conclura : «Et dire que j'ai toujours participé à la formation des enseignants de la wilaya de Blida durant une dizaine d'années, répondant toujours présent, étant également de toutes les commissions pour les examens et concours. Le service de la formation à la direction de l'éducation de Blida peut en témoigner.»