Un ancien homme politique français célèbre pour ses capacités de retournement a rabaissé le caquet à un de ses pourfendeurs par cette simple réplique passée à la postérité : «Ce n'est pas la girouette qui change de direction, c'est le vent.» Edgar Faure - pour ne pas le nommer -, qu'aucun vent contraire de la 4e et 5e République n'avait pu emporter, s'inscrivait ainsi en faux contre la péjoration trop injustement collée à l'opportunisme dans son sens de conformation ou adaptation à certaines situations et circonstances. Le général de Gaulle, par exemple, est dépeint par nombre d'historiens et politologues sous les traits d'un doctrinaire opportuniste. Est-ce à dire qu'il n'y aurait pas de mal, dans une société politique et civile, à ériger l'opportunisme en ligne de conduite ? Qu'en est-il en Algérie à l'heure de quelques incertitudes, majeures et redoutables, et d'une recomposition du champ politique qui se fait toujours désirer ? A en juger par l'état d'esprit général qui prévaut à moins de deux mois des élections législatives, ça semble aller du clair-obscur à l'amphigouri, le tout porté par des discours qui, hélas, renseignent sur une culture politique trop configurée par le sens du vent. Quand on passe son temps à scruter quel centre de décision du pouvoir indique la flèche de la girouette, il ne faudra pas s'étonner que des pans entiers de la société répondent par la désaffection. Il y a quelques jours, le chef d'un parti islamiste déclarait voir comme un bon signe (pour les formations de sa mouvance) les manœuvres en cours, d'après lui, pour reconduire la même majorité de partis du pouvoir. C'est ce même responsable politique qui avait annoncé, le mois dernier, que son parti se préparait à intégrer le prochain gouvernement. Chez les partis réputés, à tort ou à raison, démocrates, les pratiques de désignation des candidats à la députation n'ont rien à envier à celles qu'ils pourfendent chez les autres : frère, sœur, copain, passent avant les militants qui ont donné le meilleur d'eux-mêmes à leur parti. Que celui qui n'a jamais pêché jette la première… Et que dire des programmes, ou plutôt axes programmatiques, sur lesquels comptent se faire élire des prétendants à la «dignité de représentant de la nation» ? Déclarations absconses et promesses bassement plébéiennes le disputent à l'invective gratuite mais intéressée contre d'autres partis sommés (et c'est le comble) de ne plus s'opposer. Rien que cela ! Inutile de chercher où est le cap ni la grande idée-force qui le sous-tend. On y trouve rarement des positions dictées par ce souci d'un «opportunisme circonstanciel», en fait en prise avec les réalités de la vie des citoyens. Les offres de service, les louanges sans à propos, les caresses dans le sens du poil pour obtenir un coup de pouce ne peuvent tenir lieu de doctrine ou lettre d'engagement. A. S.