En clôture de son 21e Sommet, qui vient de s'achever à Addis-Abeba, l'Afrique réitère son soutien «indéfectible et inconditionnel» à la décolonisation du Sahara occidental. Malgré le lobbying agressif de la diplomatie marocaine, les pays membres de l'Union africaine restent intraitables sur le droit inaliénable du peuple sahraoui à l'autodétermination. La veille de cette rencontre, le Maroc avait conditionné sa participation par l'exclusion de ce dossier de l'ordre du jour. L'organisation panafricaine a naturellement rejeté ce chantage, en infligeant un autre camouflet diplomatique au royaume chérifien. En 2011, le roi Mohamed VI avait catégoriquement refusé toute coopération de son pays avec Christopher Ross, l'émissaire du Secrétaire général de l'ONU sur la question, avant de revenir sur sa décision suite à des pressions américaines et françaises. Ce revirement amer a été vécu comme un cuisant échec par le makhzen. Récemment encore, le Maroc a été épinglé sur les multiples violations des droits de l'Homme dans les territoires sahraouis occupés. Amnesty International, entre autres ONG présentes sur place, dénonce régulièrement un recours excessif à la force contre les manifestations pacifiques des activistes sahraouis. Ces dénonciations ont inspiré un projet d'élargissement du mandat de la Minurso (Mission des Nations unies pour le référendum au Sahara occidental) en lui joignant une prérogative de veille sur le respect des droits humains et des libertés fondamentales. C'est la France, pesant de tout son poids au sein du Conseil de sécurité de l'ONU, qui a ajourné cette proposition. Sur au moins ces trois points-là, l'occupation marocaine a nettement perdu ses «duels» face au mouvement indépendantiste. En faisant le choix stratégique de la lutte pacifique, les Sahraouis mettent constamment les forces coloniales marocaines en échec et gagnent les faveurs de l'opinion publique mondiale. Même en France, où les dirigeants, de gauche comme de droite, accordent un blanc-seing au royaume pour d'évidents intérêts économiques et géostratégiques, l'opinion est largement en faveur de la revendication légitime du Polisario. Englué dans une profonde crise socioéconomique, le Maroc perd la tête et multiplie les revers, dévoilant du coup la face hideuse de son occupation illégitime du Sahara occidental. Au plan interne, la situation est aussi chaotique. Une dette extérieure de plus de 35 milliards de dollars, un déficit commercial en nette progression, la paupérisation de larges couches sociales, les abus de pouvoir, la corruption des services de l'Etat et l'enrichissement ostentatoire du Palais sont autant de griefs brandis sur le front interne remuant. Le mouvement 20-Février milite ouvertement pour une monarchie constitutionnelle afin de soustraire le pays à l'emprise absolutiste du roi et de ses relais. Pour se tirer momentanément d'affaire, le makhzen met les bijoux de la couronne en vente. De nombreuses entreprises publiques sont proposées à la privatisation. Les pétromonarchies du Golfe s'y disputent déjà les belles possessions. Ainsi pris en étau entre le mécontentement interne et ses échecs diplomatiques récurrents, le Maroc porte le dossier sahraoui comme un lourd fardeau. La conjoncture est incontestablement favorable au Front Polisario qui, comprenant parfaitement cette situation, multiplie les actions de mobilisation en sa faveur. L'ONU estime aussi que le temps est venu de régler définitivement ce conflit. Elle multiplie les efforts pour arriver à «de réelles négociations» entre le Maroc et le Front Polisario et «met en garde contre la poursuite du statu quo actuel». Visiblement, tous les indices sont favorables à la libération du dernier pays colonisé d'Afrique. En tout cas, la prétention marocaine est battue en brèche de toutes parts. K. A.