Lancer un projet culturel au long court, résister face aux obstacles et tenir le flambeau toujours allumé n'est pas chose facile. Le challenge devient d'autant plus compliqué quand l'initiative porte le label associatif dans une petite bourgade campagnarde. A ce propos, l'exemple de l'association Ciné+ de Timezrit (Vallée de la Soummam) mérite d'être illustré. Créée en 2005, ce collectif œuvre crânement à la promotion du 7e art à travers la formation de jeunes amateurs aux techniques cinématographiques et à la création d'espaces de rencontres et d'échanges avec des professionnels. Le paradoxe : à des kilomètres à la ronde, on ne trouve aucune salle de cinéma fonctionnelle ! La projection vidéo supplée à cette carence, sinon on est obligé de solliciter la cinémathèque de Béjaïa, 50 kilomètres plus loin. Mais malgré tous ces aléas, Ciné+ a réussi à organiser et clôturer récemment, non sans succès, la deuxième édition de son Festival du cinéma jeune public, sympathiquement baptisé «L'envol de la cigogne». La manifestation, dédiée à la mémoire de feu Abderrahmane Bouguermouh, a suscité l'intérêt de centaines de cinéphiles de la région. Afin de répondre aux attentes de tous les passionnés, les festivités se sont étalées dans l'espace environnant pour toucher plusieurs autres communes comme Béjaïa, Tichy, Amizour, El Kseur, Sidi Aïch, Tinebdar et Ouzellaguen. Une vingtaine de spécialistes (producteurs, réalisateurs et acteurs) ont répondu présent pour encadrer des ateliers, présenter des œuvres et livrer des témoignages. En guise d'hommage au cinéaste Abderrahmane Bouguermouh, décédé récemment, ses films la Colline oubliée, Kahla oua Beiydha, Cri de pierre et Regard de la main ont fait le tour des maisons de jeunes et des centres culturels des communes hôtes. Des expositions et des communications sur l'artiste et ses œuvres ont naturellement jalonné ses projections. En matière de conférences thématiques, Anis Lessouad, le directeur de Nabeul Nights film festival (Tunisie), s'est penché sur les mutations et les perspectives du cinéma tunisien postrévolutionnaire. Hachemi Assad, commissaire du Festival du cinéma d'expression berbère (Algérie), et Rachid Bouksim, commissaire du Festival Issni N'Ourgh (Maroc), ont abordé les expériences et les parcours du cinéma Amazigh au Maghreb. De nombreux courts-métrages, principalement œuvres de jeunes cinéastes, ont été aussi à l'affiche. On citera notamment Khouya de Yanis Koussim, les Souliers de l'aïd et Demain Boutheina de Anis Lessouad, Ça tourne à Alger de Salim Aggar, et Repères et héritages de Tlemcen de Saïd Mehdaoui. Dans cette même section, la Résistance au Sud-ouest de Larbi Lakhal et Cessez le feu d'Ahmed Zir évoquent les souffrances de la guerre d'Algérie et le doux souvenir de l'Indépendance. Revigoré par cette manifestation, Ciné+ ambitionne de vulgariser l'image dans les villages isolés de la région et se promet, à ce même niveau, d'encourager les initiatives culturelles à travers l'aide à l'émergence de nouveaux talents. Tout un programme qui mérite l'appui des autorités locales et des sponsors. K. A.