Je ne dirai pas que cela me fait doucement rigoler. Parce que la situation ne prête même pas à sourire et qu'il serait indécent d'affirmer le contraire. D'accord ! On ne rit pas et on ne sourit pas. Mais alors, comment réagir à des affirmations du genre ? Pendant 57 ans, le peuple, dont on dit vouloir libérer l'initiative, n'y a jamais eu droit au sens démocratique du terme. Et voilà que les mêmes profils, aux affaires depuis toujours, prétendent qu'ils le feront. Mais pas tout de suite. Seulement après des élections qui consacreraient de nouveau leur autorité à la tête de l'Etat ! Quand je lis à propos de ces derniers qu'ils ont l'intention de redonner la parole au peuple, je me demande pourquoi ils ne commencent pas par libérer ceux qui n'ont pas attendu leur permission pour récupérer l'avantage de dire. Ce qui crée en fait tout le malaise que l'on devine au sein du pouvoir, c'est que la rue ne réclame pas seulement son «indépendance», mais aussi et surtout l'alternance au pouvoir. Des dizaines de personnes sont en prison pour avoir dit ce qu'elles pensaient d'élections imposées à un peuple qui n'en veut pas dans les conditions actuelles et qui, par conséquent, dit qu'il n'ira pas voter. Ce qui est consternant, c'est que l'on veuille, par tous les moyens et contre leur volonté, imposer au pays de reconduire les mêmes à la magistrature suprême. Pour éviter le chaos, affirme-t-on ! Combien de fois a-t-on entendu au sommet avertir de cette manière ? Parmi les clientèles familières et même les nouvelles recrues qui rêvent d'un destin «exceptionnel», il y en a qui, parce qu'elles sont dans le calcul permanent, ont allègrement rompu avec le «tout va bien, Madame la Marquise», mais gardent, au fond d'eux, la certitude qu'ils ne seront pas jetés aux oubliettes et que le système aura incontestablement besoin de leur concours. Complots ourdis par des chapelles bien de chez nous et pas de ces lieux où il est conseillé d'oublier que l'on n'a pas toujours été exemplaire ? Les promesses liées aux rendez-vous électoraux lui étant tristement familières, la rue algérienne ne veut plus de ces remakes de films outrageusement sarcastiques ! M. B.
