Originaire de Khenchela, Kamel Berkane retrace dans Histoire brève et authentique de l'Algérie les principaux événements du premier siècle de la colonisation pour ensuite évoquer son parcours personnel. Engagé dans les rangs de la police française, il a joué un rôle important en faveur des combattants de la Wilaya I de l'Armée de libération nationale. Tarek Hafid Alger (Le Soir) - Le livre de Kamel Berkane est un recueil de macro et de micro-histoire. Dans la première partie d'Histoire brève et authentique de l'Algérie, l'enfant des Aurès retrace les raisons qui ont conduit à l'invasion d'Alger par l'armée de Charles X et évoque, successivement, les différentes phases de la «conquête» et de la «pacification» menées par les troupes françaises. Kamel Berkane s'attarde sur les crimes contre les populations de différentes régions d'Algérie. «Les opérations de razzias et les massacres, qui firent périr des centaines de milliers d'innocents, ne sensibilisèrent outre mesure ni les médias, ni les politiques, ni les militaires. On brûle les habitations, les moissons, les récoltes et on vide les silos de céréales et, même, on coupe les arbres fruitiers. On tue les hommes, les femmes, les enfants et on sabre dans le dos les fuyards. Le butin constitué en biens et en animaux est emporté pour être vendu au profit du Trésor ou des officiers, qui s'enrichissent.» L'auteur semble vouer une grande admiration à l'Emir Abdelkader qu'il cite dans plusieurs chapitres de cette première partie. Intitulée «dans l'antre du colonialisme : l'impossible coexistence entre les Français d'Algérie et les indigènes au XXe siècle», la seconde partie du livre est essentiellement autobiographique. Kamel Berkane pose le décor, Khenchela, sa ville natale, «que les Romains appelaient Mascula». Fils d'un blessé de guerre — son père a perdu un bras durant le conflit de 14-18 —, il fait partie de quelques «indigènes» privilégiés à avoir pu accéder à l'école grâce à l'intervention des anciens combattants. «Le jour de la rentrée scolaire fut une journée triste pour ma sœur, plus âgée que moi : elle ne cessa de pleurer, parce qu'elle aurait souhaité, elle aussi, s'instruire. Hélas, on n'avait pas prévu d'école pour les filles indigènes !» Il se rappelle cependant que les filles de «caïds et de fonctionnaires de la commune mixte» avaient eu accès à l'école suite à l'intervention d'un administrateur. Ces écolières deviendront les «cinq intruses». Après avoir travaillé dans un salon de coiffure pour payer des cours par correspondance, le jeune Kamel décide de passer un concours d'un établissement militaire, l'Ecole de l'armée blindée et de la cavalerie (EABCA) de Hussein Dey. Les choses s'accélèrent pour lui dès le début des années 50. Il participe, sous la direction de Abbès Laghrour, futur commandant de la Wilaya I, à l'organisation des premiers réseaux de collecte et d'acheminement d'armes dans les Aurès. Un engagement qui s'arrêtera net à cause d'une convocation pour passer son service militaire à Batna. Kamel Berkane entamera ensuite une carrière dans la police française qui lui permettra de jouer un rôle important auprès des fidaîynes et moudjahidine de l'ALN. Faux papiers, transfert de messages, libération de détenus..., l'apport de l'agent Berkane a été crucial. A l'indépendance, il poursuit une carrière au sein de la Direction générale de la sûreté nationale avant de prendre sa retraite en 1981. Publié aux éditions Sydney Laurent (Paris), son livre, dont le sous-titre est «De la volonté génocidaire du colonialisme français à une indépendance confisquée par un pouvoir violent, incompétent et anti-libéral», aborde également la phase postindépendance. Dans cette dernière partie, Kamel Berkane dresse un constat court mais sans complaisance de ce qu'est devenu l'Algérie. T. H.