C'est au mois de juin de 2016 qu'éclate l'affaire Coca-Cola faisant état d'une escroquerie qui se chiffre à des milliards de centimes. Ce lundi, le tribunal correctionnel d'Es-Senia a traité une partie de l'affaire, celle-ci étant divisée sur trois compétences territoriales : Oran, Tlélat et Senia. Selon certaines sources, le montant de l'escroquerie s'élève à près de 3 000 milliards de centimes. Hier, la justice s'est penchée sur une partie de ce montant, où le fisc réclame plus de 150 milliards de centimes. Amel Bentolba - Oran (Le Soir) - La partie civile est représentée par trois principales victimes dans cette affaire, mais il y a un 4e homme, victime également, et qui semble être le principal déclencheur de toute l'enquête. Il s'agit de Z. M. Amine, un commerçant, client habituel et très actif auprès de la société SBOA Coca-Cola. Informé par ses agents distributeurs que sa marchandise de boisson gazeuse Coca-Cola lui était refusée par les détaillants sous prétexte qu'ils préféraient l'acheter auprès d'autres grossistes qui, eux, la leur cédaient avec des promotions intéressantes. Or, Z. M. Amine savait que SBOA Coca-Cola ne lui avait pas parlé de promotion et ainsi sa marchandise allait lui rester sur les bras. S'informant sur les noms de ces grossistes qui distribuaient la marchandise en question à de bas prix, ils étaient au nombre de trois, il s'est rendu chez eux. Durant le procès, il déclare «Lorsque je suis arrivé dans le quartier où habite M. Mohamed, j'ai été face à un vendeur d'oignon qui n'a rien à voir avec le commerce de Coca-Cola. Ce dernier m'affirme que, de toute sa vie, il n'a jamais eu à vendre ne serait-ce qu'un bouchon de bouteille de boisson.» C'est ainsi que l'enquête débute. M. Mohamed explique qu'effectivement, un jour, il a été en contact avec l'un des accusés dans cette affaire, KH. Y., un client grossiste de Coca-Cola, qui l'aurait aidé dans ses démarches pour obtenir un registre de commerce et qui lui a conseillé de se rendre à l'usine déposer son dossier afin de distribuer la boisson à son compte. Le dossier étant déposé, la victime a attendu une réponse qui ne venait toujours pas. Au bout d'une année, il s'est dit que la réponse était négative et n'a plus cherché à comprendre après que son seul contact (KH.Y.) ne décrochait plus son téléphone. Une fois l'affaire éclatée, la victime apprend que le dossier avait été accepté et que son contact KH.Y. et ses présumés complices commandaient la marchandise en son nom et qu'il devait la somme de 48 milliards aux Impôts, lui simple vendeur de légumes, puisque toutes les transactions se faisaient en son nom et qu'aucune somme n'était déclarée. De ce fait, le fisc se tourne vers lui et lui réclame ladite somme. Le même scénario s'est répété avec deux autres victimes, Bel Ahmed et Ben Mohamed, qui ont été conseillés par ce même client afin de créer un registre de commerce et de déposer leur dossier complet auprès de SBOA Coca-Cola pour distribuer leur produit. N'ayant jamais eu de réponse quant aux suites données à leur demande, ils ont laissé tomber. Mais ils ignoraient qu'en fait, le dossier était accepté et que d'autres personnes utilisaient leur registre de commerce, leurs bons de commande, signaient à leur place et agissaient depuis plus d'une année à leur insu. D'où les sommes faramineuses qu'ils se voient réclamer par les Impôts. A eux trois cumulent près de 150 milliards de centimes. L'accusé Kh.Y. n'agissait pas seul puisqu'il comparait avec quatre autres accusés qui, selon l'enquête, étaient tous au courant, laissaient faire et aidaient à ce que la marchandise soit commandée au nom des victimes mais livrée dans les hangars d'autres grossistes qui la revendaient à de bas prix et, bien sûr, ne déclaraient rien au fisc, puisque tout était au nom des trois victimes qui allaient se retrouver bientôt devant la justice puisqu'officiellement, c'est à eux que le fisc réclame les 150 milliards. Parmi les accusés figure également le frère de KH. Y. (KH. M.), ainsi que K. S., administrateur des ventes chez SBOA Coca-Cola, de même que A. O., directeur national des ventes chez la même entreprise, et A. M. F., directeur des ventes. Les cinq personnes sont accusées d'escroquerie, d'usage de faux, d'utilisation de registre de commerce d'autrui et de concurrence déloyale. Tous ont nié les faits qui leur sont reprochés. Seulement des faits et des preuves incontestables les accablent durant leur procès notamment deux témoignages directs. Celui d'un ancien employé de l'usine qui a, d'ailleurs, déposé plainte contre eux dès qu'il a démissionné, les accusant d'utiliser les registres de commerce d'autres personnes à leur insu et de commander la marchandise et la revendre à bas prix. Il y avait également le témoignage de l'employé de Flèche Bleu chargé du transport des commandes aux clients qui a affirmé que la marchandise commandée aux noms des victimes était livrée ailleurs chez les deux frères accusés (avec pour preuve, le relevé détaillé du GPS. Une marchandise qui lui était remise au niveau de SBOA Coca-Cola et, par conséquent, les responsables de l'entreprise accusés dans cette affaire étaient au courant, même s'ils ont continué à nier. A l'issue d'un procès qui a duré plus de six heures, le parquet a requis deux ans de prison ferme à l'encontre des deux frères commerçants, un an contre K. S. l'administrateur des ventes et quatre ans de prison ferme contre les deux responsables des ventes A. O. et A. M. F. Le verdict est mis en délibéré.