Cela fait déjà un mois que plusieurs familles du village Ikouvaène dans la commune de Aïn Zaouïa, à une cinquantaine de kilomètres au sud du chef-lieu de Tizi Ouzou, se trouvent sans abri, face au «mutisme total des responsables de la daïra et de la wilaya». En effet, le glissement de terrain, qui a eu lieu le 3 mars dernier au village, a endommagé 17 habitations, occupées par 32 familles. Des personnes constamment en danger de mort Les témoignages des chefs des familles sinistrées, recueillis sur place, n'en disent pas mieux. «Depuis le 3 mars, jour de la catastrophe, aucune solution concrète ne nous été donnée, et le chef de la daïra de Draâ El Mizan, que nous avons approché à deux reprises, ne s'est même pas déplacé sur le lieu», dénonce A. Titouche, membre du comité de village, un sinistré qui a fait d'un garage son lieu d'habitation avec sa famille ainsi que d'autres voisins dans le même cas. Notre interlocuteur ne s'arrêtera pas là, regrettant que «ce ne sont pas les photos qui manquent, mais des solutions dans l'immédiat». A M. Ramdani de lancer aussi cet appel de détresse lorsqu'il nous expliquera que sa maison «abritait 21 personnes, tout simplement en danger de mort à tout moment». Son habitation, qui se trouve au-dessous de la route qui traverse le village, a été sérieusement touchée par l'affaissement, causant d'énormes dégâts à l'intérieur. Des fissures aux balcons et aux escaliers, ce qui signifie que la bâtisse ne répond plus aux normes de sécurité. Le risque est constamment présent ! «Le glissement a affecté un terrain en pente accentué au cœur du village, et a enregistré des dégradations importantes au niveau des constructions longeant l'axe principal du village», est-il expliqué dans le compte rendu de la direction de l'urbanisme et de la construction, réalisé par le laboratoire central des travaux publics, antenne de Tizi Ouzou. Dehors, sans prise en charge Côté prise en charge, il est utile de signaler que plusieurs personnes sont encore sous le choc, témoignent les sinistrés. «Aucun service de soins ou de prise en charge médicale ou psychologique ne s'est déplacé ici afin de s'enquérir de notre état de santé», déplore M. Titouche. «C'est la première fois qu'une catastrophe pareille survient au village, ce qui laisse les enfants, femmes et personnes âgées surtout sous l'effet du choc et de la peur constante à cause de la dégradation continue des habitations et la profondeur de l'affaissement, qui se poursuit de jour en jour», ajoute le même interlocuteur. Des familles sont actuellement relogées et prises en charge par des voisins qui ont vu leurs habitations épargnées par le glissement de terrain. La route traversant le village est fermée à la circulation. Le chef de daïra aux abonnés absents Ce qui est absurde dans cette histoire, c'est que les services du CTC (contrôle technique des constructions) de la wilaya de Tizi Ouzou n'ont pas trouvé mieux que de «conseiller aux villageois de continuer à dormir dans leurs habitations tout en étant sur leurs gardes», raconte Djamel Berkani, un jeune d'Ikouvaène, profondément touché par «le laisser-aller du chef de daïra», qui selon lui a fait «comme s'il n'existe pas». Drôle de suggestions et de conseils qui parviennent d'un service censé protéger les citoyens contre les risques du genre ! Attend-on de signaler des pertes humaines pour que l'on réagisse sérieusement ? La question mérite d'être posée. Deux réunions ont eu lieu entre le comité de village d'Ikouvaène, les 5 et 9 mars dernier, avec les responsables de la daïra, pourtant, même si le premier responsable de Draâ El Mizan parait «aux abonnés absents», selon les sinistrés, du moment qu'aucune mesure concrète n'est prise à ce jour. Contrairement à leur position vis-à-vis du chef de daïra, les villageois ont tenu à remercier le P/APC de Aïn Zaouïa qui a fait de son mieux en se rapprochant des sinistrés depuis les premières heures du glissement. Il a ensuite mis à leur disposition des salles de classe d'écoles primaires afin de reloger les familles en attendant d'autres solutions. «Il est constamment présent avec nous, par son soutien et ses démarches auprès des responsables de la daïra et de la wilaya», reconnaissent les membres du comité de village. En outre, il convient de rappeler que les citoyens de ce village ont protesté à deux reprises contre cette «situation qui n'a que trop duré». La première, le 9 mars dernier, lorsqu'ils ont bloqué le CW128 reliant Boghni à Tizi Ouzou, tandis que l'autre a eu lieu le 30 mars dernier lorsqu'ils ont fermé le siège de l'APC de Aïn Zaouïa. Leurs actions n'ont pas trouvé une oreille attentive paraît-il.