Le procès de 94 islamistes accusés de complot contre la sûreté de l'Etat s'est ouvert hier devant la Cour suprême fédérale à Abou Dhabi, en l'absence de la presse internationale et de défenseurs des droits de l'Homme, interdits par les autorités. Ces islamistes, arrêtés entre mars et décembre 2012, sont membres ou proches du groupe Al-Islah, lié aux Frères musulmans. Parmi eux figurent deux avocats spécialisés dans les droits de l'homme, Mohammed al-Roken et Mohammed al-Mansouri, des juges, des professeurs, des étudiants et au moins dix femmes. Des proches de ces islamistes ont indiqué sur Twitter avoir été autorisés à assister à l'ouverture du procès, qui s'inscrit dans une campagne contre les islamistes aux Emirats. Le procureur général des Emirats a annoncé fin janvier que les prévenus étaient poursuivis pour «avoir créé et dirigé un mouvement ayant pour objectif de s'opposer aux fondements du régime politique dans le pays et de prendre le pouvoir». Ils risquent jusqu'à 15 ans de prison. Amnesty International a indiqué dimanche que les autorités émiraties avaient interdit à plusieurs observateurs internationaux, «ce qui laisse planer de sérieux doutes sur le caractère transparent et équitable de la procédure». Human Rights Watch (HRW) a appelé le secrétaire d'Etat américain John Kerry, attendu hier soir aux Emirats, à «demander aux autorités des Emirats de mettre fin à ces pratiques honteuses et d'assurer un procès équitable aux 94 activistes». La presse locale a été autorisée à assister à l'audience, mais pas les représentants des médias internationaux. Parallèlement au procès, les arrestations se poursuivent parmi ses sympathisants, a annoncé Al-Islah a indiqué sur son site Internet, faisant état de sept interpellations ces derniers jours. Outre les islamistes locaux, les autorités émiraties ont arrêté entre le 21 novembre et le 7 janvier 13 islamistes égyptiens, dont des médecins, des ingénieurs et des professeurs d'université habitant dans le pays depuis de nombreuses années. Ils sont accusés, selon la presse, de diriger une cellule liée aux Frères musulmans qui recrutait des expatriés égyptiens, recueillait des informations sensibles et envoyait illégalement des fonds à la confrérie au pouvoir en Egypte. Les relations entre Abou Dhabi et le Caire sont tendues depuis que les candidats des Frères musulmans ont remporté les élections législatives et présidentielle après la chute de Hosni Moubarak. Il y a un an, le chef de la police de Dubaï, le général Dhahi Khalfane, avait même ouvertement accusé les Frères musulmans de comploter pour renverser les monarchies arabes du Golfe.