Une alouette est de retour à Alger (à titre posthume certes), portant sur son aile un premier roman, de Assia Djebar, qui étanchera, momentanément, la soif, des amoureux de la littérature algérienne, de qualité, car il s'agit bien d'un écrit qui fera date et ce, dès sa parution, en 1957. Soixante ans après, les éditions Barzakh ont eu l'intelligent réflexe de sortir de l'oubli, le premier récit de l'enfant de Cherchell, qui «osa», à 20 ans, écrire «La Soif» (ed. Juilliard-1957)... L'audace est à souligner, car la normalienne de l'époque, au geste qu'on qualifierait presque d'effrontée, avait écrit ce texte, au moment où des écrivains français décidaient de secouer le chêne multiséculaire à l'ombre duquel s'était épanouie la littérature française, jusque-là... En effet, c'est en pleine éclosion du Nouveau Roman, que Assia Djebar, arriva... Le cénacle était déjà en conclave...Michel Butor, Nathalie Sarraute, Alain Robbe-Grillet en étaient les figures (devenues depuis) tutélaires... Ce style que suggéra, avant de l'imposer, l'auteure des «Alouettes naïves», qui s'était appuyée d'emblée et essentiellement, sur le Je, narratif. Assia Djebar, dans son espace géopolitique, fut pionnière dans l'introduction du «je» au féminin... Du Nouveau Roman, tout comme Kateb Yacine, Mouloud Mammeri et Mohamed Dib, Assia Djebar, lui aura donc «emprunté» ses nouveaux outils, pour l'époque, qu'étaient le flash-back, le flash-forward, pour raconter la condition de leur pays, l'Algérie et ces «Damnés de l'Histoire», qu'étaient les Algériens colonisés... À l'aune de la réalité, présente, qu'un certain Code de la famille, a tenté avec plus ou moins de... malheurs, de façonner, «La Soif» de Assia Djebar, constitue bel et bien un brûlot à mettre entre toutes les mains!... Le portrait de Nadia, que narre «La Soif», cette jeune femme libre (du moins de penser par elle-même), qui se joue des convenances existantes (qui restent, on ne peut plus, d'actualité) est un hymne à la libération de la femme, mais aussi de l'homme, dans cette Algérie des années cinquante. Cette Algérie qui avait affûté les armes de son indépendance politique, mais qui, visiblement, et avec le recul (sans user du flash-forward, pour autant) n'en avait pas fait autant pour la libération citoyenne des Algériennes et des Algériens. C'est ce qui s'appelle «rester sur sa faim» et «La Soif» de Assia Djebar n'y est pour rien, bien au contraire, elle avait foré un puits (de réflexion) dès 1957... Il y a déjà soixante ans... Reste alors à lire le roman et garder l'espoir. Car, l'espoir il y en aura toujours... Il existe certainement en Algérie, une petite-fille de «Nadia», appelons-là, Fatma-Zohra, qui a saisi le témoin... La course de relais continue et en littérature aussi... Elle s'appelle Faïrouz Recham auteure de «Tacharaftou Bi Rahilek», dont le personnage principal s'appelle... Fatma-Zohra, comme une certaine Imalayène!