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Un sanctuaire du savoir en ruine
La medersa er-rachidia de cherchell
Publié dans L'Expression le 02 - 09 - 2021

J'ai commis, de par deux fois, un écrit accompagné d'accablantes photos, sur notre Médersa Er-Rachidia de Cherchell, qui fut, hier, un sanctuaire du savoir, mais qui est devenue,aujourd'hui, hélas, une bâtisse en ruine, aux porte et fenêtres murées. Franchement, un patrimoine de cette importance, victime de l'indifférence, voire du mépris des autorités locales qui n'ont pas osé se manifester pour sauver de l'abandon, de la désuétude, ce lieu de culture, tout en essayant, à tout le moins, d'atténuer notre frustration, nous qui avons passé notre enfance dans ce que fut ce sublime et merveilleux endroit.
Il est sûr, évidemment, qu'à la lecture de cette autre publication, ces honorables autorités vont m'opposer leur logique qui les fait - administrativement selon eux -, non concernés par ce bien qui est géré par le statut des biens habous ou autres waqfs. Ils vont certainement me contredire avec cette réplique, ou je ne sais quel autre faux-fuyant... En tout cas, cette situation ne peut plus durer et, l'autorité locale, de par les pouvoirs qui lui sont conférés, dans la logique de la gestion des affaires publiques, a le devoir de prendre en charge les «biens perdus», quoiqu'en soit leur origine, pour en faire des lieux de culture ou de bienfaisance. Notre Er-Rachidia, ne doit pas souffrir, davantage, de l'inconscience des siens et de leur mépris, un terme que je répète, pas pour mon propre plaisir, mais pour dire la vérité.
Alors, au gré de ma relecture de mon ouvrage «Lalla Zouleikha Oudaï, la mère des résistants», j'ai pensé, après réflexion, qu'il était de mon devoir de soumettre ce passage à votre appréciation - vous les autorités de notre pays et, principalement, celles de Cherchell et de sa wilaya - si vous vous donniez la peine de le lire avec une certaine attention.
En effet, le chahid El Hadj Larbi Oudaï, avait dit un jour à son épouse: «Pour ce qui est de la Médersa, «Er-Rachidia», nous la rebâtirons demain, si nous serons de ce monde...» Il lui avait tenu ce langage, un jouir, quand elle prenait attache avec les moudjahidine. Et ainsi, de chaque voyage au maquis où elle accomplissait des missions non seulement difficiles,mais aussi dangereuses, Lalla Zouleikha Ouddaï rapportait son lot d'espérance et de certitudes, quant à la poursuite, avec détermination, de notre combat contre les forces du mal. Elle rapportait également, non sans grand plaisir, ces leçons vivantes, qui exprimaient une pensée et une volonté, en tout cas qui exprimaient cet amour inégal de la patrie.
Un soir, à son retour du maquis, Lalla Zouleikha, racontait à sa fille Khadidja, une de ces magnifiques histoires qui méritent de figurer dans notre patrimoine immatériel.
D'un ton solennel, elle devisait doucement, avec modération, pour permettre à sa fille de bien s'approprier la leçon et l'assimiler: «Khadidja, ma fille, nous étions autour d'un plat de couscous - une fois n'est pas coutume quand les djounoud pouvaient se permettre ce luxe de manger, ensemble -, et la discussion nous faisait voyager très loin, dans le futur. Nous étions arrivés à l'indépendance de l'Algérie. Ah! Quel beau jour que celui de voir la liberté, le drapeau flotter sur tous les mâts, sur les frontons des administrations qui seront algériennes et, pourquoi pas, sur les portes et balcons de maisons? Ah! Ce jour-là que ne ferons-nous pas pour le voir arriver et, y assister si Dieu veut!». Sa fille Khadidja écoutait pieusement le récit de sa maman. Elle comprenait tout. Elle saisissait au moindre détail, les inflexions de son langage. Elle était adulte à son âge. Et comment ne l'était-elle pas quand, à la maison, elle vivait en compagnie d'une maman affectueuse, d'une maîtresse de céans ordonnée, minutieuse et trop attachée à l'éducation de ses enfants? N'était-ce pas la bonne ecole, avant celle de Ben Badis ou de Jules Ferry?
«Ton père, Khadidja, nous parlait de cette belle histoire qu'il m'avait pourtant cachée; mais je lui pardonne - en affichant un léger sourire au coin de ses lèvres - parce qu'il s'agissait d'une bonne action altruiste, une action de bonne facture et qui s'est terminée par un geste militant au profit de notre lutte. Il nous racontait comment a-t-il ramassé de l'argent, en travaillant très dur, pour les mettre au service de la science et de la culture, une fois l'indépendance acquise. Quel geste magnifique aurait fait ton père, pour ce secteur éternel du savoir!
Tu sais Khadidja, ton père a beaucoup appris, comme moi d'ailleurs, dans cette école du nationalisme. Elle nous a appris le don de soi; elle nous a appris l'altruisme et comment vivre pour les autres, les nécessiteux, ceux qui ont besoin d'être aidés. Et Cherchell était un foyer, incontestablement florissant, prospère, par le nombre de militants qui activaient en ville et aux alentours, en se dispersant et en répandant la bonne parole dans toute la région. N'en démontre que par ceux qui ont eu des démêlés avec la police. Inutile de citer des noms, parce qu'ils sont nombreux et plusieurs d'entre eux ont été appréhendés et ont goûté les vicissitudes de la prison avant et après les sanglants événements de mai 1945.
Ainsi, pour revenir à cet argent économisé par ton père, il nous racontait qu'il avait l'intention - puisque le colonialisme ne l'a pas fait - de reconstruire la Médersa «Er-Rachidia», l'Ecole arabe de «Aïn-Qciba» où tu vas actuellement, tous les jours. Il racontait qu'il voulait agrandir cette école que vous, nos enfants, fréquentez jusqu'à aujourd'hui, et apprenez les valeurs de nos ancêtres et la foi du Saint Coran..., cette foi qui a permis l'émergence d'illustres savants qui ont bouleversé le monde, pendant ce qu'on appelait le Moyen Âge, ou l'âge des ténèbres, en parlant de l'Occident.
Cependant, je dis plutôt malheureusement, pour son projet de réaménagement de l'école et de son agrandissement et, fort heureusement, pour la révolution, parce que cet argent, un bon pactole, n'a pas eu le temps de «chauffer sa cache», et il est sorti si vite pour alimenter l'organisation du FLN, en ses débuts de la guerre de Libération nationale. Tant mieux, applaudiraient tous les patriotes du pays! Et bravo pour ton père, parce que l'intention y était et, re-bravo pour lui, parce qu'il continue de lutter, maintenant, par la force de ses bras et sa foi, contre le pire ennemi de notre peuple.
Pour ce qui est de la Médersa, «Er-Rachidia», nous la rebâtirons demain, si nous serons de ce monde, dans l'Istiqlal, sinon, eh bien, ceux qui auront la chance de vivre ces moments augustes de triomphe et de célébration de notre réussite, qu'ils prennent leur responsabilité pour reconstruire... et cette belle médersa et l'Algérie, toute entière! Tu vois, ma fille, qu'en haut, au maquis, là où est ton père, on ne parle pas uniquement d'embuscades, d'accrochages, de sang et de mort, comme pensent les colonialistes, notamment le commissaire Costes, quand il désigne le moudjahid par des substantifs tels le bandit, l'assassin et le hors-la-loi. Au maquis, les «frères», comme nous les appelons, dans notre langage de la révolution, parlent également d'avenir, de culture et de sciences.
Voilà Khadidja, ce que je voulais te dire et surtout pas un mot à tes frères. Ils sont encore petits et ils ne doivent rien savoir de ton père qui, pour eux, est toujours à La Mecque.
Dors, maintenant ma fille, et fais de beaux rêves!...».
Ce sont là des extraits de mon ouvrage: «Lalla Zouleikha Oudaï, la mère des résistants». Et cette discussion a eu lieu au cours de l'année 1956, un mois avant le martyre de Si Larbi son époux.
Elle le rejoint et tombe au champ d'honneur le 25 octobre 1957, après avoir longuement milité en tant que responsable depuis le déclenchement de la lutte armée. Ainsi, jusqu'à ce jour fatidique de son martyre, elle n'a pas parlé, puisque aucun combattant de son réseau n'a été inquiété.
Son corps ne fut jamais retrouvé jusqu'à ce jour de 1984 où un fellah déclare se souvenir avoir enterré le corps d'une femme trouvée sur la route. Il indique l'endroit; on pioche, on déterre et on découvre des ossements et des morceaux de tissu. C'est Zouleikha Oudaï. Elle est aujourd'hui enterrée au cimetière des chouhada de Menaceur. Quant à la Médersa «Er-Rachidia» après toute cette ambiance du djihad, de l'engagement et du dévouement, elle persiste dans son esseulement et son abandon, elle s'enfonce dans son délabrement et vit douloureusement, à cause de l'indifférence des responsables locaux, tous les aspects de l'humiliation. En tout cas, les concernant, l'Histoire saura les placer là où il faut, en tant que responsables inconscients de la valeur d'un patrimoine, aussi important que cette medersa...
À bon entendeur salut!
*Auteur


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