Faute de subvention, c'est sur les dons venant de mécènes et à la demande de l'association, que celle-ci honore les factures Sonelgaz et vient au secours des plus démunis. Le local, vétuste, hideux, humide et insalubre qui abrite l'association locale des non-voyants est situé au fond du marché aux légumes, dans une encoignure, un coin choisi par des commerçants pour y déposer les emballages encombrants, sales, mais encore des ordures. Autant dire que le lieu, soit l'entrée du local, est devenu depuis plus de dix ans, un dépotoir. Certains vont même jusqu'à se débarrasser de leurs ordures en les lançant sur le toit du local dont les occupants, s'ils ne voient rien du préjudice causé, sont parfois indisposés par des odeurs nauséabondes. La pièce faisant office de bureau et de salle de réception affiche la désolation et montre la pauvreté des lieux : pour tout mobilier, l'association dispose d'une table scolaire (en guise de bureau) qui visiblement a servi depuis plusieurs décennies, de trois chaises en piteux état, de deux vieux bancs en bois, d'une armoire et d'un fichier métallique tous deux bancals et rouillés. Un petit réfrigérateur, ancien modèle, émaillé et sans poignée, meuble le réduit attenant. Le sol n'est pas carrelé, les murs sont décrépis et le plafond est auréolé de traces importantes d'infiltration des eaux pluviales. Le local ne dispose, par ailleurs, ni de toilettes ni d'eau et encore moins de chauffage. Le vieil appareil de chauffage électrique posé sur l'armoire métallique – un “meuble” de rebut – n'est pas utilisé de peur que la facture de l'électricité, à la charge de l'association, ne soit trop lourde. Faute de subvention, c'est sur les dons (virés à certaines occasions – comme les fêtes religieuses) venant de mécènes et à la demande de l'association, que cette dernière honore les factures Sonelgaz et secourt les plus démunis parmi les plus de 200 non-voyants que compte le bureau local. Quant à la peinture sommaire du local et certaines réparations, un jeune non-voyant nous avoue que le président a dû puiser dans sa poche pour y faire face. “Outre leur infirmité, certains sont très pauvres et sans famille”, nous apprend un commerçant du marché qui poursuit : “Ils sont nombreux à se rendre au bureau dans l'espoir d'y recevoir une aide matérielle, les 3 000 DA de leur pension mensuelle sont loin de couvrir leurs besoins élémentaires”. À la désolation, s'ajoute le manque d'entretien des lieux. Il y a quelques années, l'association jouissait des services de jeunes recrutés dans le cadre du filet social. Ils étaient au nombre de quatre, dont une jeune secrétaire chargée de la rédaction et la frappe du courrier, de l'établissement des cartes de handicap mais aussi du nettoiement. Elle accompagnait, par ailleurs, le président de l'association, Mohamed Rahem, à la mairie, à la daïra et dans tous ses déplacements à travers la ville. Depuis, l'association n'a plus bénéficié de recrutement de jeunes. Président de l'association depuis 1995, non-voyant, M. Rahem est lui-même un cas : père de 4 filles dont une handicapée à 100%, il vit avec femme (asthmatique) et enfants dans une unique pièce dans le bidonville né autour de l'ancienne ferme coloniale Ambroise (Bouazza-Djelloul) d'où il se déplace chaque matin pour se rendre au bureau. Son unique ressource est sa pension d'invalide de 12 000 DA. Dans ce local où il est chaque jour présent, la tâche du nettoiement lui incombe, notamment à l'entrée du local souvent encombré de détritus. En quittant le local humide et froid, un bref coup d'œil sur le toit bas en éternit nous confirme la situation de laissés-pour-compte des adhérents de cette association : des ordures dont se débarrassent des quidams s'y amoncellent. Il est facile, alors, d'imaginer de quoi sont chargées les infiltrations d'eau de pluie qui tombent à grosses gouttes du plafond. Faute de rénovation et d'aménagement de ce local vétuste et exempt de commodités, l'installation de l'association dans un nouveau bureau apparaît comme une nécessité. Un problème qui n'est, cependant, pas près de connaître une heureuse issue, l'absence actuelle de locaux se posant de manière cruciale à El Affroun.