L'élection présidentielle de 2014 se profile déjà à l'horizon. Les candidats supposés, déclarés ou non, donnent le prétexte pour réfléchir sur les motivations ou les chances de ceux qui aspirent, légitimement ou pas, à assumer la fonction de président de la République. Et cela ne se fera pas sans la cohorte des candidats à la candidature, en provenance d'Algérie, du Canada, d'Angleterre, de Suisse, de France et de Navarre. Ils sont 85 pour l'instant dont 18 chefs de parti, d'anciens hauts responsables, militaires à la retraite, émigrés, avocats, anonymes, des petites gens, peut-être même un chanteur de rap et un écrivain, certes renommé, mais visiblement en quête d'inspiration pour son prochain roman, qui, je le subodore, aura pour décor les prochaines joutes électorales. En la circonstance, on ne pourra pas échapper au ballet des inévitables fantaisistes et autres parvenus, qui au-delà de leur culot, n'ont de la fonction présidentielle, qu'une vision sommaire et parcellaire des responsabilités de président de la République. L'ont-ils rêvée enfant cette ambition ? "Mon enfant, quand tu seras grand, tu seras président de la République !" Allez savoir. Il y a aussi ceux qui se présenteront pour des motifs narcissiques ou nombrilistes, pour plaire à la famille et aux amis, sachant pertinemment qu'ils n'iront pas plus loin que le dépôt du dossier de candidature. Il y a également les inévitables lièvres et peut-être même quelques hases, dont une sage-femme, paraît-il, qui feront partie du décor, sans plus. Il y a enfin une autre catégorie, celle des apprentis présidents qui pensent avoir découvert, sur le tard, cette vocation et rêvent déjà de pouvoir, de dorures, de palais, de privilèges et de voyages en avion présidentiel. Ils émergeront rapidement de leur rêve et retourneront, qui à ses affaires dans le secteur informel, qui à son association de quartier, ou tel autre encore à la conduite de son «partillon» à peine éclos. Tous ces candidats-là auront peut-être quelques lignes dans les journaux locaux, cela est suffisant pour leur assurer une gloire éphémère au sein de leur famille et dans leur quartier. Autant dire que l'ambition, ou les rêves même les plus fous, ne suffisent pas, car la fonction de président de la République, une charge en fait, est trop sérieuse. Elle exclut tout caprice ou autre comédie. "C'est la rencontre d'un homme ou d'une femme avec son peuple", pour paraphraser le général De Gaulle. Ceci dit, et pour revenir aux choses sérieuses, toutes les élections passées nous ont permis de constater que dans les starting-block, il n'y a pas, au départ, que des candidats fantasques, il y a aussi, fort heureusement, des candidats autrement plus crédibles. Mais quelles que soient les raisons de tous ces candidats, ils ne mesurent pas, pour un certain nombre d'entre eux, la gravité de leur démarche. Oui, on ne s'improvise pas candidat et, a fortiori, président de la République. On le devient suite à un parcours politique, ponctué par une volonté ferme d'aller plus loin, pour servir le pays et le peuple. C'est une alchimie entre l'envie, le devoir et la circonstance. Certains mêmes y ont pensé chaque matin en se rasant. Chez nous, si tout le monde se rase le matin, qui pourrait, cependant, rêver devenir président en 2014 ? Difficile question au demeurant, et y répondre tout de suite n'est pas facile. En revanche, la question de savoir qui pourrait ne pas être président en 2014 a été plus ou moins «tranchée» par l'excellent Kamel Daoud dans une de ses précédentes chroniques, où il a passé en revue tous les candidats potentiels, ou du moins ceux dont le nom revenait, régulièrement, à chaque échéance présidentielle ; il en a dressé le tableau suivant : Benflis déjà recalé, mou ou perçu comme tel, incapable de décider, l'homme s'est fait avoir par le passé. Benbitour a trop parlé et peu de gens l'ont compris ; son défaut, il croit que les Algériens sont comme lui, lettrés, intelligents et technocrates. Aït Ahmed est trop vieux, il représente le souvenir pas l'avenir. Zeroual est le président des Algériens qui ne veulent pas être responsables ou élus et qui veulent vivre en Algérie sans jamais y toucher ou s'impliquer. Hamrouche ne voudra pas, il a compris, il a vu et il est reparti. Ghozali, on ne peut rien en tirer, sauf une vengeance. Touati, Menasra, Djaballah sont des personnages secondaires, pour toujours. Ouyahia peut servir le pouvoir, mais desservir la cause. Belkhadem oui mais, l'Algérie en pâtirait. Ajoutons à cette liste Abdelaziz Makri qui a décidé, en fin de compte, de boycotter au grand dam d'Abou Djora Soltani qui, il n'y a pas si longtemps, ne cachait pas son désir d'être intronisé candidat de la mouvance pour la présidence de la République. Mais ça c'était avant l'avènement de Makri. Il y a aussi le cas de Louiza Hanoune, et son obsession d'établir un nouveau record du monde "de la femme candidate à une élection présidentielle", à croire qu'elle est en compétition avec Arlette Laguillier. À moins de trois mois de la présidentielle de 2014, voilà ce qui ressort de notre classe politique et du niveau d'estime dont elle jouit. L'autre constat qui reste à faire concerne également l'environnement culturel, social et politique qui se caractérise par un encéphalogramme des plus plats : des partis qui n'ont jamais été en ordre de marche. Une société civile qui n'a jamais émergé de son hibernation. Une élite universitaire timorée, qui ne phosphore pas aux idées ou qui en produit très peu. Une population éloignée «de la chose politique», car trop préoccupée par sa subsistance. Et depuis peu, on note, avec stupéfaction, des échanges d'accusations gravissimes, au sommet de l'Etat, ce qui plombe l'ambiance politique et qui laisse la population pantoise. Voilà où nous en sommes donc, bien après 1989, année de l'ouverture politique, année de naissance des associations à caractère politique qui, faut-il le noter au passage, ont toujours ou presque, les mêmes «zaïms et zaïma». En principe, quand vous faites de la politique et quand vous devenez le leader d'un mouvement politique, suffisamment influent et puissant pour prétendre à gouverner, vous travaillez à forger votre personnalité et à forcer le destin ! Mais force est d'admettre que le costume présidentiel, si lourd à porter, est sans doute mal taillé pour certains, qui hésitent, ne sont pas sûrs de vouloir y aller ou, tapis dans l'ombre, attendent un quelconque signal ou, comble du comble, se confinent dans le "soutien" de tel candidat, ou affichent leur opposition au quatrième mandat du Président en exercice. "Ce poids du costume, c'est en fait la chape de l'histoire qui s'abat sur vos épaules. Président de la République, vous ne faites pas l'histoire, vous êtes l'histoire", a prévenu Nicolas Sarkozy, lors d'un de ses débats télévisés. Donc, si les acteurs politiques, membres influents de partis, élus nationaux, personnalités reconnues, maillons importants de la chaîne de commandement, dont la première ambition, au-delà de la redondance des formulations "intérêt général", "service des citoyens", "défense des constantes", etc., est de se construire une carrière jusqu'au sommet de l'Etat, si ces gens-là ne veulent pas être candidats et/ou ne présentent pas le bon profil, ou comme le MSP, jettent l'éponge, que faut-il retenir, ou quelle attitude faut-il adopter ? Les forcer à y aller, par-devers eux ? Leur dire que la nation a besoin d'eux ? De toutes les façons, dans un régime présidentiel comme le nôtre, la fonction de président de la République est non seulement une charge, comme affirmé supra, mais aussi un métier dont il faut maîtriser les rudiments. Tant mieux si cela fait débat et je vais tenter de m'en expliquer, à travers ces quelques exemples choisis : Nicolas Sarkozy, l'ex-président français, n'a-t-il pas déclaré qu'"il s'adonnait au dur métier de présider ?" Il répéta volontiers : "Si je ne fais pas le travail, qui le fera ?" Le même Sarkozy s'est adressé aux ouvriers des chantiers navals de Saint-Nazaire, de cette manière : "Votre métier est dur, le mien aussi. Mais je le fais !" (Le Figaro). Le président Hollande, l'actuel président de la France, au plus bas dans les sondages, fait l'objet de commentaires acerbes de la part de sa presse nationale, qui reprend à l'unisson la formulation : "...Le métier de Président est rude..." Ceci pour décrire les difficultés que rencontre le président à faire le job. Le président américain Barack Obama qui doit sa victoire aux réussites de son mandat, mais aussi à sa fameuse déclaration, reprise comme un slogan de campagne : "Un deuxième mandat pour finir le job" et aussi "We can't finish the job of deficit reduction with ..." Il n'y a pas donc de place pour ceux qui n'ont ni l'étoffe de président de la République, qui n'en connaissent pas le b.a.-ba, ou qui temporisent, hésitent, hument le vent, attendent un quelconque appel ou qui se découvrent des vocations sur le tard. C'est bel et bien un métier et celui qui serait, investi par le Conseil constitutionnel et donc candidat le 17 avril 2014, doit en posséder, au moins, les rudiments, sachant que l'école des présidents de la République n'existe pas encore. En tous les cas, il doit se déclarer très vite, maintenant, car le président de la République actuel, répondant au journaliste français El Kabbach, n'a pas caché qu'"il ne sait faire que ça", comprendre "c'est mon métier" et cela sonne comme un avertissement à ses concurrents directs, du moins ceux qui souhaitent en découdre avec lui comme Ali Benflis qui, faut-il le dire, est aussi un homme d'Etat à prendre en considération, au regard de son parcours comme chef de gouvernement ! C. A. [email protected] (*) Cadre supérieur de la nation Nom Adresse email