Il y a 24 ans, le 3e président de l'Algérie indépendante, Chadli Bendjedid, annonçait sa démission. Une démission qui intervenait dans un contexte très particulier, cumulant des événements fort préoccupants. Bien que la Constitution de février 1989 ne reconnaisse pas les partis politiques fondés sur des bases exclusivement confessionnelles ou régionales, la scène politique nationale a connu la légalisation d'un parti islamiste extrémiste. Malgré les innombrables irrégularités observées, comme à chaque processus électoral (fraudes électorales), le 12 juin 1990, le parti islamiste remporte 856 communes sur 1 500, soit 57%, et 32 assemblées de wilaya sur 48, soit 66%. Cette victoire, loin de refléter l'adhésion du peuple algérien pour le programme du FIS, a été encouragée par la loi électorale. Mais, très vite, la formation de Abassi Madani a commencé à montrer sa véritable identité, en imposant une série de mesures de restrictions dans les communes régies par le FIS et en soulevant un vent de panique. Et, malgré tous ces abus et en dépit du caractère "infréquentable" du FIS, le gouvernement a décidé de convoquer les électeurs pour les premières élections législatives sous l'ère du pluripartisme. Le 14 mai 1991, le FIS, par la voix de son leader Abassi Madani, a annoncé le lancement d'une grève générale illimitée à partir du 25 mai, qui sera suivie de très près par le syndicat islamiste (SIT), en employant un langage belliciste à l'encontre des dirigeants du pays : "Si l'armée intervient, nous nous battrons. Si une goutte de sang venait à couler, je jure par Dieu que nous nous battrons jusqu'à l'anéantissement." La réponse des gouvernants ne s'est pas fait attendre : démission de Mouloud Hamrouche du gouvernement (4 juin 1991) et proclamation de l'état de siège (le lendemain). Seulement, dès le 7 juin, le nouveau chef de gouvernement, Sid-Ahmed Ghozali, a annoncé, à son tour, la tenue des élections législatives, avant la fin de l'année, suivi de Chadli Bendjedid qui a alors informé que les législatives se tiendraient le 26 décembre 1991, non sans préciser que "le second tour pourrait se tenir le 16 janvier 1992". L'autre événement grave de l'époque est l'attentat spectaculaire du 29 novembre 1991 (soit un mois avant le premier tour des législatives) contre la caserne de Guemmar, à la frontière algéro-tunisienne, où trois soldats ont été tués. Le 30 novembre, le général Khaled Nezzar déclare que les auteurs de l'attaque "sont liés indirectement au FIS". Quant à la campagne électorale, elle a été clôturée par un discours du président de la République où ce dernier a affirmé qu'il serait prêt à gouverner avec le parti vainqueur, quel qu'il soit, dans le respect de la Constitution. Le 26 décembre 1991, les élections ont bel et bien eu lieu, en dépit de toutes ces tensions énoncées. Grâce au mode de scrutin, uninominal à deux tours, et à la nouvelle loi électorale, le FIS a de nouveau remporté la victoire. Cette fois, l'idée d'arrêter le processus électoral va germer au sein du gouvernement. Le 11 janvier 1992, le président Bendjedid a remis sa démission au Conseil constitutionnel. Devant le vide juridique, le Haut-Conseil de sécurité (HCS) mettra un terme au processus électoral. Le 14 janvier, le Haut-Comité d'Etat (HCE) est créé, présidé par un historique, Mohamed Boudiaf. Hafida Ameyar