Accusé, à tort ou à raison, d'avoir été à l'origine des manifestations qui secouent depuis quelques jours la Kabylie, en écho au refus de la commission idoine de l'Assemblée d'un amendement dans la loi de finances 2018 sur la promotion de tamazight, le PT, auteur de la proposition, n'a pas manqué de charger les partis du pouvoir, seuls à devoir "assumer", selon lui, toutes "les conséquences" de leur refus d'offrir tous les moyens pour l'épanouissement de cette langue. "Ceux qui parlent de manipulation méprisent les étudiants et le peuple algérien", soutient Louisa Hanoune lors d'une conférence de presse animée hier à Alger. "Ils osent accuser le PT de manipulation, toute honte bue ! Les partis de la majorité et de l'allégeance portent seuls la responsabilité des conséquences des développements induits par le refus de l'amendement sur la promotion de tamazight et la création de postes d'emploi", affirme-t-elle. Selon la secrétaire du PT dont le parti proposait, en vain, l'amendement depuis 2002, la réaction de la population, si elle n'était pas prévisible, illustre des changements au sein de la société. "Pourquoi y a-t-il eu manifestations cette fois-ci alors que cela fait quinze ans que nous proposons l'amendement ? En réalité la situation générale de l'Algérie d'aujourd'hui n'est plus celle de 2003 (...) lorsqu'il y a colère, indignation ou tension sociale, personne ne sait quel événement peut créer le déclic", dit-elle. "Avec cette dynamique, l'université reprend son rôle. Même les lycéens ont participé. Ceux qui croient que les lycéens ne sont pas concernés se trompent", estime-t-elle encore, considérant "qu'il est tout à fait normal que la dynamique vient de Kabylie, bastion des luttes". Si elle rejette l'accusation de manipulation qui cible son parti, Louisa Hanoune soutient, cependant, qu'il peut y avoir des opportunistes qui peuvent surfer sur cette vague contestataire. "Qu'il y ait des manipulateurs, des aventuriers qui s'infiltrent dans le mouvement et essayent de le chevaucher et de le détourner, cela est normal et survient dans tous les pays du monde", souligne-t-elle en évoquant le cas du MAK (Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie) dont les partisans ont été "isolés" par les manifestants, selon elle. "Faut-il rappeler que le MAK est contre la constitutionnalisation de tamazight ? Au contraire, il veut la ghettoïser (...)". Mais elle ne s'étonne pas que l'accusation de "manipulation" vienne du FLN. "Que le FLN le dise ne nous surprend pas, car c'est le même parti qui a nié tamazight depuis l'Indépendance, son idéologie étant basée sur l'arabo-baâthisme", rappelle Louisa Hanoune. Aussi disculpe-t-elle l'opposition. "Les partis de l'opposition n'assument pas la responsabilité de ce qui s'est passé ou de ce qui peut se passer. En janvier, les prix des produits (...) vont augmenter à cause de la hausse des prix du carburant. Est-ce le PT qui va assumer les conséquences de ces augmentations ou ceux qui ont voté pour cette loi de finances anticonstitutionnelle ?". Toutefois, elle s'est étonnée de la réaction du FFS et du RCD à l'égard de son parti. "Je ne comprends pas. Je suis surprise. Mais il est certain que je ne vais pas tomber dans le piège de la diversion." Karim Kebir