Encore une fois, le ministre du Commerce, Mohamed Benmeradi, avoue que le phénomène de surfacturation dans le domaine de l'import existe réellement. Cet aveu, le ministre du Commerce l'a fait lundi lors d'une réunion avec les membres de la commission des finances et du budget de l'Assemblée populaire nationale (APN), consacrée à l'examen du rapport d'évaluation de la Cour des comptes sur l'avant-projet de loi portant règlement budgétaire 2015. Le ministre va encore plus loin en affirmant que ce phénomène ne peut être évalué en raison, selon lui, de l'absence de statistiques. Le ministre a ajouté, par ailleurs, que son département œuvrait, à travers la formation, à maîtriser des mécanismes internationaux susceptibles d'évaluer la surfacturation, en procédant à une comparaison entre la valeur des exportations et celle des importations du pays d'origine. Ce n'est pas la première fois que Mohamed Benmeradi avoue l'existence de ce phénomène de surfacturation. En décembre dernier, lors d'une rencontre avec les responsables locaux de son secteur, le ministre avait indiqué que "nous sommes certains qu'il y a un phénomène de surfacturation", ajoutant qu'aujourd'hui "très souvent, les importations ont servi à faire des transferts beaucoup plus qu'à approvisionner l'économie nationale. Cela, je le dis et je l'assume". L'aveu du ministre, de décembre dernier, réitéré lundi à l'APN, est une vérité connue de tout un chacun. En effet, chaque année, les services des douanes enregistrent une moyenne de 400 à 500 contentieux dans le cadre de la lutte contre la surfacturation. Le montant des infractions de change qui ont pu être mises au jour par les douanes algériennes, se chiffre à plusieurs dizaines de millions de dollars dont la majorité est commise lors d'opérations du commerce extérieur. Ces infractions de change liées au commerce extérieur sont souvent menées à travers la majoration de la valeur en douane déclarée à l'importation (surfacturation), la minoration de la valeur en douane déclarée lorsqu'il s'agit d'opérations d'exportation et le non-rapatriement des montants en devises de marchandises exportées. L'ex-ministre du Commerce, feu Bekhti Belaïb, avait estimé que la surfacturation des produits et services importés par l'Algérie représentait pour le pays 30% du montant global de ses importations. Un chiffre qui avait soulevé une grande polémique qui avait contraint le gouvernement à le nier. Face à ce phénomène de surfacturation, l'Algérie a engagé, récemment, des négociations avec l'Union européenne et la Chine, ses plus gros fournisseurs, pour lutter contre la surfacturation pratiquée par certains importateurs algériens. Dans ce sens, un projet est en cours d'élaboration à travers lequel l'Algérie a demandé à l'UE de mettre à la disposition des Douanes algériennes les données relatives aux valeurs des produits qui sont importés auprès de l'Europe afin de contrecarrer la surfacturation. Outre l'UE, un projet d'accord d'assistance mutuelle et administrative avec la Chine est aussi en négociation pour lutter contre ce phénomène. Mais quel serait l'impact sur le phénomène ? La question mérite d'être posée puisque depuis des années déjà, les autorités multiplient les mesures pour essayer d'endiguer le phénomène. Crédoc, licences d'importation et interdictions d'importation, il y a même eu institution d'un fichier national des fraudeurs ou contrevenants à la réglementation de change et mouvement de capitaux. Mais sans grand impact sur le phénomène de la surfacturation, ces mesures atteignant vite leurs limites. Au jour d'aujourd'hui, la situation n'a guère changé et si les choses restent en l'état, le manque à gagner sera encore plus important. Saïd Smati