Il fait partie de la nouvelle génération de politiques qui aspirent à bousculer l'ordre établi. Malgré quelques handicaps, comme l'inexpérience, le black-out de certains médias ou encore les entraves à la pelle du pouvoir pour l'exercice politique, Fethi Ghares, porte-parole du MDS, premier à avoir annoncé sa candidature le printemps dernier, ne se laisse pas décourager par le défi : s'engager dans la course à la présidentielle pour "changer le rapport de force". "Le plus grand danger, c'est la résignation. Dire qu'on ne peut pas changer les choses", dit-il, avec l'assurance d'un militant rompu à la difficulté. Invité hier par l'association Rassemblement Action Jeunesse (RAJ) pour une conférence-débat sur "la situation générale du pays et l'élection présidentielle", Fathi Ghares, dans le prolongement de la décision prise par son parti, celle de se battre "à travers l'urne", ne cache pas ses ambitions : "Mon objectif, c'est de renverser le rapport de force. L'Algérie ne manque pas de savoir-faire, ni d'argent. Ce qui manque, c'est la volonté politique." "Chaque chose a un début. Les Algériens apprennent. En 1954, c'était un cumul", dit-il. "Les élections, c'est un moment important. Il faut peser pour pousser à l'ouverture car le pouvoir veut jouer à huis clos et exclure le peuple", soutient-il encore. "Tout ceux qui aident à la démobilisation font partie du système. Le problème n'est pas l'alternance, mais présenter une alternative à ce système", ajoute-t-il également. Malgré les multiples entraves dont il a eu un avant-goût lors des législatives et même après, à travers les harcèlements de la police et de la justice, Fethi Ghares ne se laisse pas décourager pour autant, y compris pour la collecte des signatures. "Bien sûr que la collecte des signatures est difficile. Même l'exercice politique est difficile. Mais un militant affronte les difficultés", souligne-t-il. Selon lui, la prochaine élection n'est qu'une étape, mais il faut continuer à lutter pour changer le rapport de force. "Je ne suis pas venu pour faire partie du décor." Et si d'aventure le président de la République venait à se représenter pour un nouveau mandat, quelle serait l'attitude du candidat ? "C'est comme s'il ne se représentait pas, il n'y aurait pas de fraude ! Mais je parle du système. Peu importe son candidat car il ne va pas changer son comportement. Moi, je ne définis pas mes objectifs en fonction de ce que fera le système, mais de façon indépendante. Au MDS, nous avons décidé de mener la bataille à travers l'urne." Contrairement à une idée assez répandue au sein de l'opinion, mais également chez certains politiques, Fethi Ghares refuse de parler d'"opacité". "Au MDS, nous n'avons jamais parlé d'opacité. Nous avons dit que ce sont des manœuvres pour empêcher le peuple de se préparer et de s'impliquer. L'idée de la prolongation du mandat, par exemple, procède du parasitage", estime Ghares, non sans observer, autre ruse du régime, que la mise à l'écart de façon peu orthodoxe, l'automne dernier, de l'ex-président de l'APN, Saïd Bouhadja, a servi de "diversion" pour qu'il n'y ait pas de campagne autour de la révision des listes électorales. Même s'il admet que le jeu est fermé, il considère que cela ne constitue pas une raison pour déserter la scène politique. "C'est pour cela que nous luttons. Comme nous nous battons pour l'eau, pour l'électricité, contre le chômage, nous devons nous battre pour l'urne, pour surveiller nos voix", soutient-il. C'est pourquoi il estime que "la jeunesse doit s'impliquer, car il s'agit de son avenir". Quant à l'opposition et à une certaine élite, son verdict est sans appel : "Ils n'ont pas de volonté pour mobiliser. La politique pour certains est devenue une espèce de négociation entre éléments d'une caste." "L'urne est la mère de toutes les batailles. Les forces les mieux organisées sont celles qui réussissent", conclut-il. Karim Kebir