Le journaliste et écrivain Nourreddine Louhal était l'hôte de la médiathèque Rachid-Mentouri, mercredi après-midi, dans le cadre des "Mercredis du verbe", pour parler de son dernier ouvrage Alger la mystique - Ziyarates autour des fontaines, paru en novembre 2018 aux éditions Tafat et Aframed. En présence d'amoureux de la Casbah, d'artistes et d'amis, l'auteur a gratifié, près de deux heures durant, l'assistance de sa belle parole, l'amour qu'il voue à l'ancienne citadelle qui l'a vu naître, tout en déplorant, en cette veille de la journée nationale de la Casbah, son état actuel. Il y a 22 ans jour pour jour, la journée nationale de la Casbah avait été décrétée. Pour honorer cette date et le quartier de son enfance, l'écrivain a ainsi expliqué que consacrer un livre aux mythiques fontaines qui ont la renommée de l'ancienne citadelle était dans le but "d'apporter un plus par rapport à ces ouvrages qui évoquent la Casbah". "Alger est devenue pour moi une ligne éditoriale", a lancé l'auteur. "J'ai parlé de ses cinémas, des jeux de notre enfance et de ces choses qui ont malheureusement disparu. Après ces thèmes, je me suis intéressé aux fontaines, car j'estime que nous avons tous été au contact de ces sources d'eau à un moment de notre vie." Et d'évoquer le cheminement de l'écriture de ce bel ouvrage, où il y raconte son enfance, l'histoire de chaque fontaine et sa légende, et les traditions qui sont nées autour de ces symboles du vieil Alger. "Corinne Chevallier, petite-fille de l'ancien maire d'Alger, Jacques Chevallier, m'a poussé à chercher davantage dans ce sens, de ressusciter la belle histoire de ces fontaines. Mais ce qui m'a fait de la peine au cours de mes investigations, ce sont ces fontaines qui ont été ensevelies sous le béton, à cause des travaux d'embellissement de la ville", regrettera l'orateur. "Les clous, avaloirs et autres éléments m'ont permis de retrouver les traces de ces fontaines disparues. J'ai également découvert des fontaines de zaouïas de marabouts originaires de Béchar. À travers ces lieux, j'ai su qu'il existait beaucoup de poésie, à l'image de la fontaine de Adjadjel." S'agissant du temps qu'il lui a fallu pour la rédaction de cet ouvrage minutieux et informatif, Louhal dira : "Deux années ont été nécessaires. Je me suis réellement intéressé au sujet en 2016, et l'ai fini en octobre 2018. Je peux dire, sans prétention aucune, que c'est une première dans la littérature algérienne, parce que jamais personne n'a écrit sur les fontaines de la périphérie d'Alger." Et d'ajouter : "Dans ma quête, je me suis déplacé jusqu'à Birkhadem qui est en fait «le puits de l'esclave», au nom d'une jeune Noire qui donnait à boire aux guerriers de l'Emir Abdelkader." La sauvegarde et le recensement des fontaines a aussi été l'un des principaux axes de la rencontre, tant assistance et auteur avait à cœur d'échanger davantage sur les fontaines qui ont malheureusement disparu, et l'avenir de celle qui résistent encore. "Le seul inventaire qui existe est celui de la wilaya d'Alger, mais cette dernière a attribué de simples numéros à ces fontaines. Ce qui est dommage aussi, ce sont ces fontaines sur lesquelles on a construit, au vu et au su de tous. Mais ce que je peux dire est que l'inventaire doit aussi se faire au gré de nos souvenirs." Pour l'auteur, préserver ce qui reste s'avère délicat, dans la mesure où, dit-il, "il y a eu des pillages à la Casbah, des gens ont détruit l'âme du quartier. Ce sont pourtant des endroits officiels et constitués". Et d'ajouter à propos de l'architecte français Jean Nouvel, devant chapeauter le projet de sa rénovation : "J'ai été le premier à applaudir cette nouvelle. La Casbah est en ruine, si nous n'avons pas pu la restaurer pourquoi quelqu'un de France n'aurait pas le droit de le faire ? Parce qu'il porte en lui les traces du colonialisme ?" En parlant d'histoire justement, et de guerre de libération plus particulièrement, l'écrivain est revenu sur le rôle des fontaines au temps de la guerre, qui ont joué "un grand rôle" selon lui. Yasmine Azzouz