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"La politique de la planche à billets a atteint ses limites"
Alexandre Kateb, économiste, maître de conférences à Sciences-Po Paris
Publié dans Liberté le 24 - 01 - 2021

Alexandre Kateb, économiste, conseiller auprès de nombreux gouvernements et institutions financières, analyse dans cette interview certaines mesures prises récemment par l'autorité monétaire et le gouvernement algériens pour faire face à la crise économique et financière en cours. Selon lui, "le statu quo est entretenu par le discours sur l'Etat social qui est très largement devenu un mythe et ne correspond pas à la précarité réelle qui existe et à une pauvreté qui ferait honte aux héros de 1954."
Liberté : Depuis mars 2020, la Banque d'Algérie a baissé à trois reprises le taux des réserves obligatoires des banques avant de dispenser carrément certaines banques de l'obligation de constituer des réserves de sécurité. Ces interventions sont symptomatiques d'une grave crise de liquidités. Jusqu'où ira la Banque d'Algérie dans ses tentatives de libérer la liquidité ? Le retour à la planche à billets est-il désormais inévitable ?
Alexandre Kateb : La crise de liquidités que connaît le système bancaire algérien est la conséquence des déséquilibres internes et externes accumulés au cours de ces dernières années et qui ont été mis en évidence de manière particulièrement frappante en 2019, dans un contexte politique agité, et en 2020, en raison du double impact de la chute du prix du pétrole survenue au premier trimestre 2020 et des mesures prises pour endiguer la pandémie de Covid-19. L'Etat par ses déficits et sa dette croissante a siphonné une grande partie de la liquidité bancaire.
Dans ce contexte, l'intervention de la Banque d'Algérie était logique. Elle a répondu de manière forte et appropriée. De nombreuses autres banques centrales dans le monde ont fait de même pour soutenir leurs économies fragilisées par la pandémie.
En Algérie, le problème de liquidités est davantage structurel et c'est pourquoi il faut des réformes structurelles pour en sortir. À partir de septembre 2017, la planche à billets a servi à financer l'Etat. Indirectement, elle a bénéficié aux banques en injectant de la liquidité dans le système bancaire. Néanmoins cette politique a un coût. La contrepartie en est soit l'épuisement des réserves de changes, soit une dévaluation du dinar. On atteint donc les limites de ce type de mesures.
Le gouvernement prévoit de combler les déficits budgétaire et courant en recourant aux leviers de la politique monétaire, dont l'usage des réserves constituées par la Banque d'Algérie. Qu'en pensez-vous ?
Comme je l'ai expliqué ci-dessus, les limites de la politique de financement non conventionnel, autrement dit, de la planche à billets, ont été atteintes.
J'ajoute que l'essentiel de la croissance en Algérie a été tiré par la dépense publique. Or, l'efficacité de cette dernière diminue au fil du temps. Ce qui s'est produit dans les années 2010. L'Etat avait beau continuer à injecter de l'argent en finançant des grands programmes, le "rendement" de ces investissements et leur impact réel sur la croissance et sur la productivité totale des facteurs était de plus en plus faible, pour ne pas dire négatif. Il y a eu un énorme gaspillage d'argent public. Un pays comme la Chine qui est l'usine du monde peut se permettre de recycler ses réserves de changes en autoroutes désertes et en lignes de train à grande vitesse qui fonctionnent à perte. Mais contrairement à la Chine qui produit tout, l'Algérie ne produit rien, à l'exception du pétrole et du gaz qu'elle extrait du sol et pour lesquels la demande mondiale est en phase de s'épuiser. Il faut revoir tout le modèle économique.
L'évaporation des réserves de changes à court terme est-elle une perspective crédible et comment le pays pourra-t-il y faire face ?
Certains pays peuvent vivre avec des réserves de changes équivalant à trois ou quatre mois d'importation, même si pour les pays en développement et émergents, le FMI conseille de garder des réserves représentant au moins six mois d'importation. Le cœur du problème n'est pas là. Il ne faut pas se focaliser sur le niveau des réserves, mais sur leur dynamique et sur la capacité à assurer le financement de la balance courante. On touche là à la politique commerciale et plus encore aux réglementations sur le change et sur les mouvements de capitaux. Le problème c'est l'archaïsme du système bancaire et financier algérien qui ne permet pas à l'économie algérienne de s'insérer de manière satisfaisante dans l'économie mondiale. Or, cet archaïsme est tributaire de dogmes qui sont datés, mais qui n'ont jamais été remis en cause parce que cela arrange bien les "insiders" dans un système économique et politique fondé avant tout sur le recyclage de la rente. Le statu quo est entretenu par le discours sur l'Etat social qui est très largement devenu un mythe et ne correspond pas à la précarité réelle qui existe et à une pauvreté qui ferait honte aux héros de 1954.
Le dinar connaît une forte dévaluation depuis 2014. La monnaie nationale continuera à perdre de sa valeur dans les prochaines années. Quelles sont les limites de ce levier monétaire ?
Le dinar demeure surévalué même en intégrant les dernières projections du gouvernement. Il n'y a qu'à voir l'écart conséquent entre les taux de change officiel et officieux. Le fait même qu'il puisse y avoir un tel écart persistant dans le temps est un indicateur du décalage entre les politiques mises en œuvre et la réalité économique et sociale. L'Algérie a vécu au-dessus de ses moyens pendant la période d'aisance financière des années 2000. Le contre-coup a été brutal mais prévisible. Il a été mal géré. La dépréciation du dinar a été stoppée au printemps 2016 et le gouverneur de la BA, qui était favorable à cette politique, a été limogé par le président Bouteflika. Il faut bien comprendre qu'un dinar surévalué est un dinar rationné qui ne sert que les intérêts d'une petite minorité d'importateurs et d'insiders. On retombe encore une fois sur l'économie politique de la rente.
Acculé par la crise financière, le gouvernement envisage d'ouvrir le capital de certaines banques et entreprises publiques à travers la Bourse. Pensez-vous qu'il s'agisse de la solution idoine pour la recapitalisation des banques et des entreprises publiques ?
Le programme d'ouverture du capital des grandes entreprises publiques a été stoppé après la crise financière de 2008. Il a été relancé en 2012-2013. Si vous vous en souvenez, il y avait à l'époque une liste d'une dizaine d'entreprises publiques qui étaient pressenties pour être introduites en Bourse. Mais là encore, il n'y avait aucune véritable volonté politique d'introduire ces entreprises en Bourse. On ne peut pas ouvrir le capital de certaines entreprises publiques sans d'abord les restructurer et les recapitaliser. Dans le cas contraire, les investisseurs auraient l'impression d'acquérir des parts minoritaires de certains "canards boiteux". Or, toute restructuration a des conséquences sur l'emploi, surtout dans un contexte où il s'agit d'entreprises sur-staffées avec une très faible productivité du travail. Il faut donc commencer par introduire en Bourse des entreprises qui sont en bonne santé. Je pense notamment à Djezzy, dont le rachat partiel par l'Etat a été une erreur qui a coûté cher au Trésor algérien. Il faut également inciter les groupes privés à s'introduire en Bourse pour créer une dynamique.
Le ministre des Finances vient d'annoncer la reprise du chantier de réforme des subventions. Quelles sont vos suggestions pour que cette réforme soit soutenable et réalisable ?
La reprise de la réforme des subventions est une bonne nouvelle. Cela dit, il faut savoir de quoi on parle. Les subventions les plus coûteuses sont celles sur les produits énergétiques, en particulier sur les carburants et sur le gaz de ville. Or, une réforme de ces subventions ne peut se faire en deux semestres. Pour parler clairement, il s'agit d'augmenter fortement le prix de l'essence et du gasoil. Or, il n'y a aucun calendrier prévisionnel ni aucune annonce crédible sur ce sujet. Les augmentations des prix sont faites de manière ad hoc au gré des lois de finances qui se suivent, mais sans une véritable stratégie d'ensemble. Les autres subventions importantes sont celles qui concernent le logement. Là encore on ne perçoit pas de réelle volonté de mettre en place une réforme d'envergure. Dans ce domaine, c'est la nécessité qui dicte sa loi. Les comptes de l'Etat sont dans le rouge, or la politique de soutien au logement promotionnel est poursuivie. Il y a eu une gabegie importante de moyens dans ce domaine qui se poursuit. Mais je ne vois pas de volonté de s'attaquer à cette question sensible.

Propos recueillis par : Ali Titouche


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