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L'exil fécond
Culture
Publié dans La Nouvelle République le 14 - 06 - 2020

Les faits relatés dans ce livre sont inspirés de la réalité vécue. Cependant, toute ressemblance avec des personnages réels, ayant existé ou existant toujours, n'est que pure coïncidence et ne relève point de la volonté de l'auteur. Mais, qui se sent morveux... se mouche !
L'auteur
En effet, chacun pense qu'il profite de sa part de ces dons du ciel : le pétrole et le gaz. Ah, si Dieu Tout-Puissant ferait en sorte que ces puits deviennent secs, le plus tôt possible, afin que notre jungle se mette au travail et que nos responsables soient moins arrogants !!! A ce propos, je rebondis sur l'état de décomposition qui sévit dans notre contrée et qui met l'ensemble de ses pontes face à un désaveu général parce qu'ils ont abusé du mépris vis-à-vis des populations animales, que nous sommes. Ainsi, je le dis en toute franchise et directement : «Désormais, qui osera nous reprocher notre goût excessif pour l'irrévérence quand tout est pourri dans notre environnement politique, social et économique ?» C'est alors que mon affirmation, qui concerne justement cette décrépitude de nos institutions dans un climat tel, m'oblige à poser la plus terrible des questions à l'égard des gouvernants : «Mais de qui se moque-t-on donc ? Car, quand bien même l'on serait la jungle la plus riche par rapport à d'autres jungles, nos défenseurs n'ont pas le droit de n'en faire qu'à leur guise. Et c'est ce jugement fâcheux que l'ensemble des animaux porte sur eux qui contresigne les rumeurs et nous installe dans l'ingouvernance...» En effet, notre jungle a été témoin d'incroyables tripotages qui ne s'expliquent que par la panne de «ces derniers» ou bien de secrètes épreuves de force à l'intérieur du système». Je dis cela, parce que nous avons tous assisté, confus et désolés à la fois, à la démission de la «caste» – ce que vous appelez dans votre jargon le gouvernement – qui avait en charge les problèmes de la jungle.
Ce fut une démission qui devait intervenir juste après les élections pour changer les membres de la «basse-cour» de notre royaume. Ces dernières aussi, c'est-à-dire les élections, n'ont pas été claires et propres comme dans d'autres jungles qui se respectent. Les animaux ne se bousculaient pas dans les bureaux de vote, ils ne se sont pas exprimés, mais alors pas du tout ! Une forte abstention... caractérisée par le dépit ! Mais les urnes étaient bien pleines, à la fermeture du scrutin, comme par miracle. Quant à cette caste, elle est passée du statut de l'officiel (avant sa démission) au statut du provisoire (après sa démission), pour ne subsister dans l'intérim que soixante douze heures. En effet, comme l'écrivait un journaliste de chez vous, un homme intelligent parmi les humains, «l'anecdote pouvait faire rire si elle n'était pas le plus triste dérapage...». Là, il parlait des problèmes des gens de votre espèce. Et de continuer : «Quand pour corriger ce détestable couac, l'on reconduit avec une légèreté coupable le même exécutif, l'on ne commet pas seulement une double faute. L'on signifie hélas au pays que la bonne gouvernance est le cadet des soucis en haut lieu, lequel, dit-on se concentrerait en priorité sur la recomposition des cercles qui s'impatientent et commencent à le contester».
J'ai pris en exemple cet article parce qu'il colle exactement à la réalité de ma jungle, et parce qu'il reflète parfaitement ces interrogations auxquelles malheureusement notre roi des animaux n'a pas un seul début de réponse. Il n'en aura jamais, je pense, car dans la prostration où se trouve notre jungle et l'état de «notre opinion déboussolée par tant de forfaitures commises au nom du bien public», il continuera à jouer en «maître d'œuvre de l'immobilisme qu'il imputait à son entourage». Il ajoutera, si rien ne viendra pour stopper cette marche infernale vers l'humiliation, «une louche de pagaille et des séquences de silence que cette jungle ne peut pas supporter plus longtemps». D'ailleurs, nous les animaux, sommes conscients qu'un jour, et pour se disculper de tous les malheurs qui nous entourent, le lion, notre roi, se présentera à nous en de parfaites circonvolutions, pardon en de subtils faux-fuyants. Il ne manquera pas de s'attaquer à tout son entourage et aux autres commis, les chargeant de mille et une avanies commises au préjudice des animaux... Mais, comme à l'accoutumée, Il s'en lavera les mains, lui le maître incontesté de ces bois, de ces prairies, de ces steppes et de ces montagnes, enfin de tout l'espace délimitant notre jungle.
La responsabilité, toute la responsabilité, sera assumée par d'autres... ceux qu'il désignera du doigt devant tous les animaux dont certains, parmi les naïfs, diront en soupirant : «Ah, le pauvre roi que n'a-t-il pas fait pour cette jungle pour que des inconscients, ayant pourtant tous les moyens pour travailler et remettre les choses en ordre, viennent lui casser cette bonne volonté avec laquelle il les a pourtant responsabilisés en leur attribuant des postes de souveraineté !». Mais ceux qui comme moi, connaissent bien notre système, ses animaux et ses recettes de gestion, et de plus sont au fait de toute la vérité, savent d'ores et déjà que la pilule ne passera jamais devant une masse consciente de la gravité de la situation. Et du reste, qui ignore que le roi gère à sa façon – ici le terme façon veut dire anarchiquement, machiavéliquement, et une série d'autres épithètes –, et que personne n'a osé lui contester, jusqu'à l'heure actuelle, des nominations abracadabrantes, dans le langage de la jungle ? Notre roi a l'art et la manière de jeter le dévolu sur des animaux qu'il doit utiliser pour des basses besognes, comme il a le talent de choisir ceux qui acceptent – afin de garantir, pour plus tard, leur situation de rente – d'être tancés ou humiliés publiquement, quelquefois ou souvent. De là, je te dis hautement, est-ce peut-être moi, la mouche, ou quelqu'un d'autre parmi les animaux de notre jungle qui avons la décision de nomination, ou bien est-ce notre roi qui dénonce, et dénoncera constamment ce choix malheureux de son entourage qu'il a lui-même investi, qui est donc seul responsable ? La réponse est évidente ! Indépendamment de tout cela, je suis profondément déçue et affligée car, à travers tout notre parcours, nous ne sommes assurés que d'une seule chose : «Nous avons lamentablement échoué, dans notre jungle !» Auparavant, nous avions eu des échecs et c'était tout à fait normal dans la vie d'une société animale comme la nôtre. Mais, c'est la première fois que notre échec est généralisé. Il est partout, dans toutes les régions, dans tous les domaines vitaux de notre jungle.
Et cette déception, dont le lion, notre roi, a fait état devant l'assemblée des animaux, en une séance solennelle, nous a donné des sueurs froides dans le dos. Cela nous a donné aussi des angoisses, principalement à ceux qui, comme moi, persistent à vivre dans notre jungle... malgré la défaillance de ses responsables. Quant aux autres, ceux qui ont des tanières, des repaires, des gîtes et des nids ailleurs, quelque part dans d'autres jungles, bien loin de chez nous, eh bien, rien ne les dérange parce qu'ils ne connaissent pas ce cauchemar. Ils partiront dans leurs résidences à l'étranger au moindre soupçon d'un risque d'atteinte à leurs privilèges indus. Des coopérants nationaux, à double nationalité, aiment à souligner notre jeunesse qui les affuble de beaucoup d'autres noms d'oiseaux. Vois-tu, moi je ne veux plus être la risée des animaux des jungles voisines et de tous ceux qui nous regardent comme des maudits et nous rejettent après nous avoir longtemps respectés... Je ne veux plus être à la traîne du progrès, je ne veux plus être en retard sur les autres car nous avons tout pour être mieux que ce que nous sommes aujourd'hui. Tu sais, moi la mouche, je suis réputée pour être celle qui va partout, et principalement dans la m... mais là, je n'ai pas pu voir, ailleurs, une m... aussi grande, aussi nauséabonde et aussi écœurante que la nôtre. Notre jungle doit être rattachée – une fois pour toutes et le plus tôt sera le mieux – au train de la modernité, en optant simplement pour des programmes convenables et concrets, ces programmes qui mobilisent les animaux dans d'autres espaces.
En somme, elle doit revenir à ce qu'elle fut avant ces deux dernières décennies où la misère s'est enracinée si profondément que des «spécialistes» en évaluation ont affublé ce laps de temps, important bien sûr en même temps que préjudiciable, d'une couleur sombre que d'autres jungles, qui avancent dans la voie du progrès, n'oseraient même pas penser qu'un jour elles porteraient une teinte pareille, semblable à la nôtre. Ainsi, en parcourant les grands espaces de notre jungle ardente et secrète que constatons-nous aujourd'hui, pour nous convaincre que c'est déjà trop tard d'essayer d'explorer une énième fois les voies du «replâtrage», plutôt que de s'acheminer vers une sérieuse refonte de tout le système ? Nous constatons d'abord que notre politique au rabais, rendue obsolète par des comportements de reniement, a annihilé la confiance et les rêves des jeunes animaux qui vivent dans le désespoir. Cela me rappelle ce qu'a écrit un des vôtres, en parlant de vos semblables qui vivent les mêmes drames que nous, dans ce qui pourrait être comparé à notre jungle. Il écrivait, non sans une pointe d'amertume : «Ils n'ont plus rien à perdre et leurs nouveaux points cardinaux sont désormais : suicide, criminalité, terrorisme ou exil par les mers. Pendant ce temps, les supports du régime... et un tas d'autres affairistes qui se plaisent dans la situation de confusion actuelle pour faire prospérer leurs affaires louches, encourageant la corruption par tous les moyens ; pendant ce temps-là, ces hommes pourrissent tout au niveau local et donnent l'impression aux populations des wilayas que la malhonnêteté est le nouveau chemin de la réussite sociale. La délation, le népotisme et le régionalisme font le reste. Dès qu'un cadre honnête lève la tête ou dit une vérité, il est cassé, brisé !
Le silence que j'entends lorsque je passe dans certaines villes de l'intérieur est étrange ! C'est le silence des agneaux ! Pourtant, demain, lorsque le voile se lèvera sur cette période, des vérités assommantes seront dites. Lorsque les gens ne seront plus les esclaves de l'argent, que la vraie société civile, pas celle qui chante les louanges dans les soirées télévisées... lorsque la vraie société dira son mot, ce sera pour condamner l'unanimisme !» Triste constat vous concernant, mais s'appliquant à la lettre à notre propre situation, malheureusement ! Alors, je continue sur ma lancée pour t'édifier encore sur l'état de notre jungle. Car, entre-temps, chez nous, en attendant que des voies s'élèvent, de graves préjudices se commettent tous les jours. Il se passe des choses singulières, ahurissantes, le moins que je puisse dire. Ouvre bien tes oreilles. La situation sécuritaire dans notre univers devrait amener nos responsables à une méditation plus sérieuse quant aux causes et aux conséquences du désastre qui menace les animaux.
Face à ces drames répétés, dont notre faune ne voit pas la fin depuis plus de quinze longues et sanglantes années, la cour du roi – ce qui représente le pouvoir chez vous – poursuit sa fuite en avant, en maquillant la vérité sur la fin de ce drame qui en serait, selon elle, à ses derniers instants. «Mais elle persiste dans l'affirmation et la réaffirmation de sa désastreuse politique de réconciliation nationale dont aucun bilan ni aucune évaluation objective n'ont été présentés aux animaux, qui en sont les premières victimes, ni aux forces de l'ordre, solide rempart de la jungle, ayant déjà payé un lourd tribut.» Vois-tu, ce paragraphe que je mets entre guillemets, je le puise de chez les chroniqueurs de ma jungle. Ils sont agressifs et justes comme les vôtres, et ne laissent passer aucune occasion pour informer et clarifier, mais en même temps établir l'impuissance de nos chefs face à cette situation qui ne trouve pas assez de mots pour être qualifiée.
En outre, elle (la cour du roi) n'hésite pas, chaque fois que les animaux manifestent pour réclamer leurs droits légitimes... de matraquer sans aucun ménagement, au lieu de dialoguer avec eux, comme le prône «visiblement» le roi dans ses discours. De là, l'indifférence, le mépris et la répression ont entraîné des milliers d'animaux à se rebeller ou vouloir fuir leur jungle – comme je l'ai fait moi même il y a si peu – au risque de leur vie. La faune, toute la faune, prise en otage est ainsi devenue l'enjeu d'une lutte entre les clans qui se disputent le pouvoir. Mais, en définitive, c'est toujours les animaux qui paient au prix fort la facture de la mort. Le lion, roi de la jungle, absent toutes les années de la tragédie et des drames nous ayant déchirés et endeuillés, «fait intervenir ses services plutôt que sa personne par un communiqué de circonstance, réaffirmant des vérités éculées». Par ailleurs, si d'autres rois, dans leurs jungles respectives, se soucient de leurs animaux, en se montrant plus entreprenants et plus dynamiques dans les réalisations, le nôtre, brocarde ses subordonnés «pour se dédouaner». Mais la vérité finit toujours par s'imposer puisque, dans son style anarchique et incohérent, il finit par avouer lui-même son propre échec et même sa faiblesse... Dans une jungle lointaine, un monarque, «devant ses échecs répétés a fini par jeter l'éponge. Le nôtre, aura-t-il la dignité d'en faire autant ?» Je ne le pense pas.
J'y suis, j'y reste ! C'est la sempiternelle chanson des rois des jungles de notre région. Ils sont là, jusqu'à trépas, ne laissant aucune chance à l'alternance pour s'exercer dans des conditions normales, dûment appliquées par ailleurs, conformément aux aspirations des animaux. C'est pour cela que je reviens dans ma jungle. Parce qu'il faut agir, avec l'aide de mes pairs, convenablement, consciemment, courageusement... il faut agir pour améliorer les choses chez nous. Il faut agir pour donner des lueurs d'espoir à la jeune génération qui se mobilisera pour réveiller les consciences et corriger le parcours ô combien tortueux et pénible... Il faut agir parce qu'il faut sauver notre espace. – Tu vois pourquoi, je te paraissais rassurée et pleine de volonté pour revenir dans ma jungle et entreprendre un combat autrement plus dur et peut-être plus long pour arriver à imposer des idées, car demain ce sera une autre vie. Du moins, je l'espère du plus profond de moi-même. Ainsi, je n'ai pas à attendre que les heures sombres se reproduisent et s'éternisent pour prendre conscience et aller au devant de mon destin lié à celui de tous les animaux de ma jungle. Car, qui pourrait nous interdire le printemps, comme disait quelqu'un de très éveillé ? Voilà une mission impossible ! Impossible oui, car le printemps n'a pas pour vocation de s'arrêter devant la fourberie des puissants et d'avoir peur de ces magouilles de prédateurs qui nous menacent par leur système décadent et sans principe et, de plus, qui gouvernent par le mensonge et la prévarication.
C'est alors que je reviens chez moi, gonflée à bloc et le cœur plein de bons sentiments pour préparer l'avenir. Je reviens chez moi, obstinée et inflexible, décidée à ne pas me taire, à aucun prix, d'aucune façon et sur aucun sujet. Je reviens chez moi pour mettre en exergue ce que j'ai vu, ce que j'ai constaté pendant tout le temps que j'ai passé dans cette jungle d'exil qui m'a parue comme une ruche d'abeilles, constamment en mouvement, immanquablement installée dans la rénovation et le développement. Enfin, je reviens chez moi parce qu'il doit nécessairement se produire une véritable rupture au niveau des animaux, au niveau des méthodes de gestion, bref au niveau de tout le système qui est usé et qui ne répond plus à nos aspirations. Ainsi, revenir chez moi, parmi les miens, avec une sérieuse et utile expérience, c'est montrer aux autres, qui vivent et se plaisent à l'extérieur, que je n'ai pas de jungle de rechange car c'est çà ma jungle, et comme vous le dites si bien, dans votre langage... c'est çà «bladi». De plus, je ne suis pas de «ceux qui emmènent leur patrie à la semelle de leurs godasses», encore une autre expression si chère à certains jeunes parmi les êtres humains. J'ai en effet compris le message de ces animaux durant mon séjour à l'étranger. C'est le message de toutes les autres jungles qui ont érigé le labeur en vertu cardinale, mieux encore, en culte et en acte de foi. Je l'ai bien compris à travers ce paon qui fait une bonne distance, chaque matin, qui travaille d'arrache-pied toute la journée et qui refait le même itinéraire le soir, pour enfin arriver éreinté la nuit à son nid.
Je l'ai compris chez ce cheval qui, pour améliorer son niveau de performance et donner le maximum sur le plan du rendement, ahane des heures et des heures, partagé entre l'atelier et l'université du soir. Je l'ai compris en des manifestations de clarté dans les positions et dans le respect du droit, comme ce léopard par exemple, grand Chancelier de la jungle qui, pour un petit reproche à cause d'une faveur qui passerait inaperçue dans notre jungle, s'est fait justice lui-même pour échapper au déshonneur. Je l'ai compris enfin chez ce faucon qui a démissionné, laissant la grande responsabilité qu'il exerçait dans sa jungle à cause d'une évaluation incorrecte de la construction de son nid. On lui reprochait de n'avoir pas fait une déclaration complète aux services des domaines... pas plus ! J'ajoute que cette construction a été réalisée avec ses propres deniers. Ce qui n'est pas le cas, dans certaines étendues de ce monde animal, et plus précisément dans la nôtre. De tout cela, je retiens que notre jungle souffre d'un manque flagrant d'ardeur à la besogne, de liberté, d'honnêteté, de sérieux, de transparence, de justice, de concorde et d'amour. Il faut le redire encore, quitte à paraître redondant et fastidieux.
Notre jungle vit dans une ambiance où la rapacité est devenue l'ingrédient premier pour faire réussir le plat de leur propre réussite, c'est-à-dire celle des grands animaux – c'est-à-dire des responsables – et des malhonnêtes parmi eux qui, toujours boulimiques, se taillent les meilleures affaires et les «bonnes occasions» pour augmenter leurs biens et leur... pouvoir. Elle vit encore avec ce régionalisme qu'ils utilisent (le roi lion et ses sbires) comme le critère essentiel de tous les choix pour nommer des animaux aux grandes missions de la jungle. Il faudrait être, en quelque sorte, du même coin de la jungle pour avoir droit à des places de choix dans la hiérarchie du pouvoir. Et là, bien sûr, il y a les capacités du candidat. Elles sont tout autre chose que dans les jungles du monde. Ne vous étonnez pas ! La plupart du temps, elles sont ce que sont les appréciations de la famille du... roi lion. En termes plus clairs, le candidat devient un responsable potentiel et est intronisé là où on a bien voulu le placer quand le ou les «frangin(s)» décident qu'il y sera malgré et contre tous. Pardon, même ces «tous» ne réagissent pas. Autant pour moi... que suis-je en train de raconter ! De tout cela, également, je suis convaincu que le constat le mieux partagé, par tous mes semblables les animaux, se reproduit dans la morosité, le pessimisme et l'affliction dont est accablée notre vie quotidienne.
C'est ainsi, qu'en tant que sujet passionné du «bien-faire», je décide de mettre ma volonté, mon expérience et ma passion au service de ma jungle, parce que si les autres ont réussi avec les mêmes ingrédients et les mêmes ambitions, il n'y a pas de raison à ce que nous – je veux dire tous les animaux réunis – ne puissions pas produire les mêmes résultats chez nous, peut-être mieux... au vu de la manne divine que nous possédons. En tout cas, si ce n'est pas nous qui allons nous refaire, qui viendrait nous refaire, nous secouer, nous réformer ? Qui viendrait nettoyer nos étables et nous débarrasser de notre surplus de crasse ? Qui va mettre un terme à cette dégradation continue, cette désuétude et ces excès de démagogie ? Doit-on importer des animaux, sous forme de coopérants techniques, pour y faire face et nous faire plaisir ? Devons-nous donner notre jungle en gérance à d'autres sociétés d'animaux, sous prétexte que ces «autres» ont plus de savoir-faire et certainement plus d'expérience que nous ? Non, nous devons nous prendre en charge sérieusement, car nos animaux ont du caractère, ils ont de la compétence et ils savent, dans un contexte régulé, répondre présents, comme ils l'ont toujours fait au cours de notre Histoire, depuis la nuit des temps ! Nous devons changer notre destin par nous-mêmes.
Et notre jungle a besoin d'une grande transformation tant au niveau du système «qui est au bout du rouleau», qu'au niveau de ses dirigeants qui ne répondent plus aux exigences des temps modernes. Vois-tu, c'est dans ce cadre-là que la gazelle, l'éléphanteau, et des légions d'autres animaux, dans la nouvelle génération, qui vivent dans notre jungle ou qui se sont expatriés, crient à la face du lion, de la louve, de l'ours, du tigre, du chacal et autres, de la hyène et du serpent : «De grâce, laissez-nous faire notre avenir et celui de notre jungle !» Ils leur disent : merci beaucoup pour ce que vous nous avez fait jusqu'à maintenant. Nous vous respectons parce que vous êtes nos parents, nos aînés, mais, s'il vous plait, comprenez que c'en est terminé pour vous ! Comprenez que votre temps est révolu à... jamais ! Comprenez que notre jungle a besoin d'une relève, d'un sang nouveau, qu'elle a besoin d'une sérieuse alternance, concrète et efficace pour qu'elle puisse extirper ce mal dont vous avez semé les racines ! Regardez autour de vous, dans d'autres jungles, où tout change, se rajeunit et progresse... Vous avez eu votre chance quand vous aviez notre âge... Donnez-nous la nôtre aujourd'hui et la jungle et ses habitants vous en seront reconnaissants... Ayez ce courage des grands pour reconnaître que le temps qui vous a été imparti par l'Histoire est achevé et que celui des autres est arrivé... Oui, le tour des autres est arrivé et les mythologies ridicules que vous nous avez inculquées et qui se sont accumulées au fil des années, n'ont plus de mise aujourd'hui dans les jungles qui se respectent et qui ont déjà fait leur preuve dans le cadre des réformes.
Et encore, n'est-ce pas qu'une génération pousse l'autre ? Cela aussi, il faut le comprendre ! Vois-tu, enfin, pour clore ce propos que j'espère convaincant, je jette à tes pieds une belle prescription que j'ai glanée au gré de mes écoutes, lors de ces chaudes journées d'été où nous trouvons, spécialement nous les mouches, notre champ de prédilection. Je la fais mienne à cause du bon sens qu'elle véhicule : «Aime et fais ce que tu veux !». Ce bel adage nous vient de si loin, du temps où les hommes étaient savants et les animaux pleins de sagesse, selon Jean de La Fontaine... Il nous vient de votre saint et distingué philosophe, l'éminent Saint Augustin. – En effet, je te comprends, lui dis-je après cette longue diatribe, je sais maintenant pourquoi tu as fait l'impossible pour me rencontrer et revenir avec moi dans ta jungle. Un autre n'aurait pas saisi ton message et, peut-être même, t'aurait prise pour une folle petite bestiole qui veut faire de l'esprit. Tu as tenté une expérience. Elle a été concluante puisque tu vas la mettre à profit pour essayer de changer ce qui pourrait être changé dans les esprits et dans les faits. Pour cela, tu as déjà ma bénédiction et tous mes encouragements. Peut-être qu'un jour, nous les humains, pourrions-nous balayer devant chez-nous pour revenir à ce que nous étions antan, respectés par tous car crédibles dans nos positions et nos intentions... ?
Je comprends en fait, que l'idée de partir vers d'autres cieux pour les conquérir t'a obnubilée depuis toujours. Tu as fini par la concrétiser car, la situation de crise que vivait et que vit, jusqu'à présent, ta jungle, est pour beaucoup dans ta prise de position. Je sais maintenant, d'après tout ce que tu m'as raconté, que tu ne pouvais évoluer dans cet environnement qui te tenait tellement à cœur. Ainsi, tu l'as quitté. Je t'ai aidé pour cela. Et là, où tu es arrivée, tu as réussi à trouver ta place dans un monde qui te fascinait et qui te fascinera toujours pour ses grandes réalisations et son cadre de vie, autrement plus élaboré, autrement meilleur. Oui, tu as connu ce que tu n'as jamais connu dans ta jungle qui s'est virtuellement tournée vers d'autres pratiques, hélas, au-delà de la morgue, au-delà de l'outrecuidance. La mouche a donc tenté cette expérience, celle d'émigrer, comme ces millions d'autres bestioles et d'autres animaux qui ont pu sortir de leur jungle. Ils se sont installés ailleurs, dans de prospères forêts et d'opulentes prairies pour découvrir ce qu'ils n'ont pu percevoir chez eux. Mais ce que la mouche a vu dans le sérieux de la vie d'ailleurs, lui a paru «impressionnant», en comparaison de l'atmosphère de chez elle.
Ainsi, elle est revenue à son espace, malgré les difficultés, malgré les injustices, malgré les frustrations. Elle est revenue pour combattre, et pour réussir. «Au moins dans sa jungle natale, les pierres la connaissent, même si elles se rassemblent la nuit pour la tuer. Là-bas, rien ne se ressemble pour quoi que ce soit». Là, je reprends – parce qu'ils collent très bien à mon texte – les termes d'un roman écrit par un de nos semblables, pour illustrer cette vaine espérance de l'exil. La moralité de cette histoire est que la mouche a compris que malgré tout (le tout ici signifie tous les problèmes que nous avons exposés) elle doit se rallier à cette conviction très audacieuse : «Il y a plus de bon que de mal» partout, y compris dans la jungle. Il faut donc la «travailler», (la jungle), en d'autres termes, la corriger, la réformer, persuader ses animaux, les intéresser, les encourager pour les amener à adhérer pleinement aux réformes qui doivent être engagées pour la résurrection de leur environnement, dans le cadre d'un développement durable.
Car, les infaillibles changements, que traduisent ces réformes une fois engagées, sont le fruit de nombreuses et délicates batailles livrées par les sujets de la jungle contre eux-mêmes pendant des années, et qui finissent par concevoir des traditions. Ce sont ces dernières, au bout du compte, qui forment le véritable garant d'une vie meilleure, florissante et juste. Ce langage, qui traduit les espoirs des animaux de la jungle, ne peut être assimilé à un langage de courtisans qui font dans la «langue de bois» pour tirer profit ou, tout simplement, pour plaire aux seigneurs du moment. C'est un langage qu'utilisent les sujets conscients qui ont compris qu'il n'y a que le changement radical avec le travail et la détermination qui puissent rendre le sourire et le prestige à un monde qui a perdu ses repères.
(A suivre)


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