Au-delà du départ de Bouteflika, en attendant d'acter les autres exigences de la rue, le Mouvement populaire a mis à nu l'inutilité des partis, aussi bien de la majorité que les préposés à l'opposition. Les marches des vendredis ont balayé ce qui pouvait rester de crédibilité, dans ces structures partisanes, déjà sérieusement malmenées par les différents scrutins passés, les écartant définitivement de la scène politique. Les taux records d'abstention ont mis à nu le divorce des Algériens avec les formations politiques, quelle que soit leur obédience, et la présence de sigles ne refermant que quelques militants, et c'est un euphémisme, ont contribué complètement à les discréditer. La réunion parlementaire d'hier, qui a consacré Bensalah comme chef de l'Etat par intérim, a irrémédiablement coupé les ponts du peuple avec «ses» élus, eux qui ont applaudi, encore une fois, les directives de leurs bienfaiteurs. Ces parlementaires semblent dire aux Algériens qu'ils baisent la main qui les nourrit et les paye grassement en plus des primes et autres cadeaux. Les Algériens se retrouvent bien seuls malgré les tentatives de l'opposition de prendre le train du hirak' en marche, cependant le passif étant trop lourd à porter et les compromissions trop nombreuses à oublier, le peuple ne fait plus confiance à des profils recyclables qui ont porté l'habit du système. Une opposition de salon, de façade et des intérêts personnels, qui s'est fait piéger par les manipulations du pouvoir en place. En revenant en arrière, on ne peut que constater que Bouteflika a très bien manœuvré pour écarter ces partis à force de transactions douteuses, de passe-droits personnels et de coups d'état internes. Les deux présidents des partis satellitaires du pouvoir, Taj et MPA, étaient deux anciens militants dans les partis de l'opposition qui ont fini par retourner leur veste. L'inconsistance des programmes et le peu de représentativité populaire de ces formations ont, considérablement, rogné de leur influence avant de perdre la partie. Aujourd'hui, ces partis ne représentent plus grand-chose, aux yeux des citoyens, se retrouvant largués, à la rue non pas pour accompagner le Mouvement mais pour y pêcher une nouvelle virginité populaire. Aujourd'hui, le peuple, dans sa formidable diversité, donne des gages d'assurance et de maturité politique et envoie un message fort aux nouveaux décideurs à travers des marches millionnaires exemplaires de l'aveu du monde entier. Ce peuple est, aujourd'hui, mûr de choisir ses représentants, son président, ses ministres et sa constitution et l'épouvantail d'un candidat islamiste à la tête du pays ne fait plus recette. Le peuple s'est affranchi de toute représentativité structurelle, refusant tout parrainage ou procuration, capable de conduire le pays vers la rive du salut pour peu qu'on lui donne, enfin, la parole et la possibilité de le faire.