Chacun selon sa personnalité et, bien entendu, sa culture, a, dans la tête, les vacances qu´il aimerait bien passer, une fois dans sa vie, si jamais il lui arrivait de mettre la main sur une partie au moins de cette satanée cagnotte de pétrodollars qui ne cesse d´enfler, d´enfler sans que cela produise un effet quelconque sur ce petit peuple que l´on accuse (à tort peut-être) de vivre sur le dos de Sonatrach et de ses associés...Si au moins tout un chacun avait un père qui aurait subi les effets bénéfiques qu´a eus l´Indépendance et tous les redressements qui ont suivi sur....Vaut mieux se taire : les rotatives ont des oreilles! Il vaut mieux rêver qu´on a gagné honnêtement au loto, sans avoir bénéficié d´un quelconque piston ou d´avoir hérité d´un lointain cousin d´Arabie Saoudite qui avait, juste avant d´avaler son extrait de naissance après une crise d´apoplexie survenue au bord d´une piscine bien fréquentée (rien que la jet-set!) de la Côte d´Azur, des actions douteuses dans une compagnie texane (de pétrole bien sûr!). Ou alors quand on n´a pas l´ombre de l´ombre d´une chance d´avoir ce cousin d´Amérique ou d´ailleurs, avoir le génie d´avoir mis au point un brevet Sgdg que les multinationales s´arrachent à prix d´or ou alors (puisque le rêve est permis...) avoir sorti un de ces tubes qui rendrait jaloux Cheb Khaled au temps de sa gloire, à l´époque de Canal+... Ainsi, le portefeuille bien garni d´une bonne quantité de devises fortes on peut rêver à l´aise ( seul le rêve est permis et garanti par toutes les Constitutions du monde à condition, bien sûr, qu´ il soit décent et qu´il ne porte atteinte ni à la moralité publique ni aux valeurs sacro-saintes de la Révolution, des institutions, ni à la liberté de penser, ni à la notion de propriété privée...On peut rêver de ces vacances que l´on a l´habitude de vivre par héros américain interposé (avec, bien entendu, les effets néfastes des artifices des scénaristes hollywoodiens en moins, comme les courses-poursuites, les quiproquos, l´arrivée impromptue de la belle-mère et de sa fille éplorée sur les lieux du flagrant délit d´adultère ou bien les histoires scabreuses de Cosa Nostra...). Ces vacances de rêve sur une immense plage, à l´ombre d´un immense parasol lui-même planté sous un cocotier qui berce sa palme au son d´une musique hawaïenne sortie d´une vague paillote d´où émerge une ravissante jeune femme avec, à la main, un daiquiri dont la fraîcheur n´a d´égal que le sourire qu´elle destine à son heureux élu, le tout accompagné d´un balancement des hanches qui reléguerait Samia Gamal à la galerie des débutantes...Ceci est le rêve d´une victime des films de série B. Il y a le rêve de l´adolescent qui planifie sans cesse des vacances sans fin avec la fille d´en face: cela se passe toujours dans une île mais alors très déserte où, tous les deux, ils rejouent à l´infini leurs séquences préférées du Lagon Bleu...Il y a le rêve de l´émigré professionnel qui a laissé toute sa smala au bled et qui rêve, lassé de servir de vache à lait à toute la tribu, de revenir au pays uniquement pour retaper la maison des ancêtres et cueillir de ses propres mains des figues enrobées de rosée matinale avec une entêtante odeur de sève...Il y a le rêve du nationaliste-redresseur qui se voit, lui et sa famille, dans un complexe touristique conçu par Pouillon, inauguré par Boumediene et qui a encore quelques jours avant d´être privatisé et livré aux mains des charognards qui...Chut...! les rotatives peuvent s´emballer! Le service est impeccable, les serveurs sont gentils, il n´y a pas de mouches dans la chorba et il y a de l´eau H 24 ! Le rêve ! Il y a l´autre côté du rêve, c´est le cauchemar: louer à prix d´or un appartement à Tichy, découvrir le lendemain que c´est un lieu surpeuplé par une faune indescriptible de jeunes venus de tous les coins du pays à pied, à cheval, en voiture, en moto ou à vélo...On découvre soudain qu´il faut une heure pour traverser cette bourgade sous une pluie battante (alors que tous les dépliants touristiques ont promis et le beau temps et une circulation fluide...) Sacrée pluie dont la côte jijélienne a le secret: deux heures ont suffi pour transformer la plage en bourbier: alors tout le monde a eu la même idée en même temps. Puisqu´on ne peut pas se baigner, pourquoi ne pas visiter les Grottes Merveilleuses. 30 kilomètres de bouchons ! Ce n´est pas merveilleux? Qui dit mieux?
