Le treillis bleu frappé d'une bande rouge les a fascinées, la noblesse de la mission les a passionnées, elles ont bravé de nombreux préjugés pour intégrer le corps de la Protection civile, un choix loin d'être "atypique" considèrent-elles, malgré tout. Meriem, Samia, Naima, Hayet et Ouardia estiment que l'intégration de la femme au sein des pompiers est acquise à cinq sur cinq. Elles s'enorgueillissent d'ailleurs, d'appartenir à un corps qui a été le premier parmi ses semblables, en Afrique et dans le monde arabe à ouvrir ses portes à la femme et dont "l'expérience en la matière est citée en exemple" dans des manifestations internationales de la Protection civile. Meriem, Samia, Naima Hayet et Ouardia, officiers respectivement dans la gestion des crises et risques, ingénieurs, architecte et médecins, ont toutes en commun cette passion pour le métier. Elles estiment que la femme en Algérie a gagné sa place parmi les pompiers et qu'il faut travailler par objectif, dont le prochain est d'accéder au "niveau de la gestion des crises et de la prise de décisions". "Maintenant, il faut penser comment progresser. Il faut travailler par objectif", note Naima corroborée par Ouardia : "Il est vrai que rien ne lui a été offert, mais la femme au sein de la Protection civile a gagné sa place, c'est acquis, n'est-ce pas les filles?", interroge-t-elle cherchant l'approbation de ses collègues. Une affirmation qui ne semble pas faire l'unanimité cependant, puisque Meriem laisse transparaître une réticence, rappelant à l'occasion qu'"il reste encore à faire", en pensant aux postes clés. Les cinq dames de feu refusent implicitement le "catalogage" dont les femmes pompières font l'objet, expliquant qu'elles n'ont pas "souffert" plus que les autres femmes dans d'autres secteurs, parce qu'elles ont choisi un métier réservé traditionnellement aux hommes, soutenant que les raisons sont à chercher dans la culture de la société, dont les us et coutumes ne leur concédaient pas de travailler dans certains domaines. Elles font remarquer toutefois, que les "choses ont évolué depuis". Les souvenirs de leur début de carrière, ou plus exactement le début du processus de "féminisation" du corps à partir de 1999, les invite à avoir une pensée pour leurs centaines de collègues "femmes", qui n'ont pas pu résister à "l'appel du feu" et ont embrassé une carrière dans l'opérationnel. "Plus exposées aux questionnements par rapport à un tel choix, et plus confrontées au machisme de la société à l'époque", relèvent-elles. "C'est peut-être parce qu'on nous voit un peu masculinisées à cause de l'accoutrement réglementaire", lance Ouardia. "Ce sont surtout les rangers", rétorque Samia avec une note d'humour, non sans relever que depuis qu'elle a opté pour l'uniforme elle "se sent différente". "Caractère trempé", "plus aguerrie" "plus solide et endurcie", ce sont autant de termes par lesquels elles se définissent, soulignant que ni ces traits de caractère, ni le treillis bleu n'enlèvent à leur "féminité" qu'elles tentent d'assumer pleinement". Mieux encore, disent-elles, "la Protection civile a tout à gagner en poursuivant sur cette voie car l'expérience a montré que ses équipes sont mieux acceptées dans les foyers parce qu'elles comptent des femmes". L'évolution qu'a connu la femme au sein de ce corps s'inscrit, selon ces Dames, dans le long processus du combat de la femme algérienne depuis la Révolution, et même avant. L'Algérienne a enregistré une avancée considérable en matière de droits en comparaison à d'autres pays. Elles en veulent pour preuve les derniers amendements introduits dans le code pénal incriminant la violence à l'encontre des femmes, lesquels constituent un autre pan dans la construction d'une société bâtie sur "le respect et l'égalité". Même si elles partagent la même passion et les mêmes aspirations, ces dames "tout feu, tout flammes", apprécient différemment le 8 mars. Samia va jusqu'à réfuter le mot "fête et tout le folklore qui va avec". "Ce n'est pas la fête de la femme, c'est la journée de la femme. Il ne s'agit pas de sortir pour festoyer", dit-elle interrompue par Meriem qui considère qu'à chacune sa façon de faire et que c'est aussi une occasion pour les femmes de l'Algérie profonde de faire entorse à un quotidien qui n'est pas toujours rose, même si l'espace d'une demi-journée". L'intervention de Naima régule le débat estimant que c'est une date sans plus qui nous permet à toutes de faire une halte, une rétrospective et prospective. Et ce "folklore" tant rejeté par beaucoup constitue une motivation pour revoir également le côté culturel de la femme. "Peut être sans cette date, on nous oublie carrément, mais aussi on pourrait penser à redoubler d'efforts lors de cette journée au lieu de déserter nos lieux de travail. Ce sera également une façon de faire entendre nos voix", propose-t-elle.