Dans une déclaration rapportée par les médias, le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale considère que les diabétiques consomment beaucoup de médicaments et leur recours aux bandelettes pour l'automesure du taux de glycémie est exagéré. Depuis quelques années déjà, la Caisse nationale des assurances sociales (CNAS) des travailleurs salariés connaît un véritable déséquilibre financier. Même si des experts citent plusieurs facteurs, le ministre du Travail, de l'Emploi et de la Sécurité sociale évoque une nouvelle hypothèse : le gaspillage. Dans une déclaration rapportée par les médias, Mourad Zemali, en marge d'une visite de travail à la wilaya de Boumerdès, considère que les diabétiques consomment beaucoup de médicaments et leur recours aux bandelettes pour l'automesure du taux de glycémie est exagéré. «Un diabétique n'est pas censé mesurer son taux de glycémie chaque matin. Mesurer deux fois par jour est extrêmement exagéré et c'est la source de ce grand gaspillage. Le chapitre des bandelettes dans le budget des remboursements de la CNAS dépasse les 10 milliards de dinars. C'est beaucoup ! Où va-t-on avec ces dépenses ?» s'interroge le ministre dans une vidéo qui a fait polémique sur les réseaux sociaux. L'indignation des diabétiques sur la Toile est palpable, considérant que le recours aux bandelettes et à l'autocontrôle de glycémie ne sont pas un luxe mais une nécessité vitale. Dans le groupe «Diabétiques Algériens Diabète» comptant plus de 26 000 adhérents, la colère a atteint son summum, au point où une lettre ouverte, rendue publique, a été adressée à M. Zemali. «Des propos qui font mal au cœur venant d'un haut commis de l'Etat. Je vous invite dans ce cadre à vous préoccuper du grand gaspillage qui se fait au niveau de votre département ministériel, comme l'affaire des 20 milliards de dinars qui ont été déposés auprès de la banque Khalifa par M. Sidi Saïd à l'époque où il occupait le poste de président du conseil d'administration de la CNAS. Examinez de même les dépenses des prises en charge médicales à l'étranger dont ont bénéficié les membres influents du système pour se soigner dans des cliniques européennes (France, Suisse) tandis que nous diabétiques, nous continuons à utiliser des moyens archaïques (stylos à insuline, glucomètres, etc.). Dans des pays qui ont une réelle considération pour leurs malades, les diabétiques ont droit aux moyens de haute technologie, tels que le freestyle libre et la pompe à insuline. Des équipements qui devraient être mis à notre disposition, si l'Etat voulait assurer une prise en charge correcte de ses malades au lieu de les accuser gratuitement d'une situation qui, en vérité, a été plus provoquée par une mauvaise gestion et l'absence d'une politique sanitaire à la hauteur des exigences actuelles», lit-on dans ce message. Où faire des économies ? Signalons, qu'il est recommandé, par le commun des endocrinologues et diabétologues, pour les diabétiques de type 1, de faire deux prises de glycémie avant et après chaque repas. Selon ces spécialistes, ce sont ces mesures qui déterminent le dosage d'insuline. Pour les diabétiques de type 2, le malade mesure son taux de glycémie 2 à 3 fois par jour. Une boîte de bandelettes, cédée à 1500 DA, contient 50 unités. Le besoin de 2 boîtes par mois est alors inévitable. Est-ce une déclaration voulue pour que ces bandelettes ne soient plus prises en charge par la CNAS ? Pour Djilali Hadjadj, spécialiste de la question de la sécurité sociale, le gaspillage est une triste réalité, mais qui touche bien d'autres pathologies et branches de dépenses de la CNAS. «Des études ont démontré que ce qui est acheté en médicaments dépasse le besoin réel et le volume différentiel n'est pas consommé, explique-t-il. Le tort n'est pas celui des malades mais des fournisseurs, tels que les laboratoires pharmaceutiques, qui se sucrent sur le dos des diabétiques et des malades en général. Sur un budget annuel de dépenses estimé à 450 milliards de dinars, la CNAS dépense 200 milliards de dinars pour le remboursement. Un pays comme la France, à titre d'exemple, ne dépense que 25% de ses recettes pour ce volet. Si la CNAS veut vraiment faire des économies, elle a beaucoup de chapitres à revoir, tels que la nomenclature qui dépasse les 2000 médicaments. Un chiffre qui dépasse largement nos besoins. Il en est de même pour les importations de médicaments.» Signalons que selon la Fédération internationale du diabète (FID), l'Algérie comptait environ 1,8 million de personnes atteintes de diabète en 2017.