Seize migrants, sur 150, ont été autorisés hier à débarquer du navire Diciotti dans le port de Catane, en Sicile. Selon l'APS, citant des médias, il s'agit des 11 femmes et de 5 hommes, dont deux auraient la tuberculose, pour lesquels le bureau de la santé maritime de Catane a demandé le débarquement, obtenant l'accord du ministère de l'Intérieur. Plusieurs médecins et inspecteurs du ministère de la Santé étaient montés, dans la matinée, à bord du Diciotti, le navire des garde-côtes italiens qui a sauvé les migrants il y a une dizaine de jours, pour contrôler l'état de santé de ces personnes. Par ailleurs, de hauts fonctionnaires du ministère de l'Intérieur étaient interrogés le même jour à Rome sur cette affaire par un magistrat sicilien. Luigi Patronaggio, le procureur du parquet d'Agrigento, en Sicile, qui a lancé le premier une enquête de justice sur cette affaire, a interrogé plusieurs hauts fonctionnaires du ministère de l'Intérieur pour tenter de comprendre la chaîne de commandement qui a donné l'ordre d'interdire le débarquement des migrants. Les délits envisagés sont «séquestration de personnes», «arrestations illégales» et peut-être «abus de pouvoir», selon la même source. Mais le ministre de l'Intérieur et tenant de la ligne dure envers les migrants, Matteo Salvini, a réagi dès vendredi soir, demandant au magistrat de l'interroger directement lui. A Genève, le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a lancé hier dans la journée «un appel aux Etats membres de l'Union européenne pour qu'ils offrent d'urgence des places de réinstallation à quelque 150 personnes secourues qui restent à bord du Diciotti, navire des garde-côtes italiens». «En attendant, le HCR exhorte les autorités italiennes à autoriser le débarquement immédiat des personnes à bord», a-t-il ajouté. Selon le HCR, «la majorité de ceux qui se trouvent à bord proviendraient de pays producteurs de réfugiés». Et d'observer : «Des vies sont en jeu. Déjà en 2018, plus de 1600 personnes ont perdu la vie en tentant d'atteindre les côtes européennes, bien que le nombre de personnes tentant de traverser se soit considérablement réduit par rapport aux années précédentes.» Bras de fer entre Rome et Bruxelles Quelque 700 000 migrants ont débarqué sur les côtes italiennes depuis 2014, mais le nombre de ces arrivées avait diminué de plus de 80% à fin juin par rapport à l'an dernier, selon le ministère de l'Intérieur. Vendredi, le vice-Premier ministre italien, Luigi Di Maio, a confirmé son intention de réduire la contribution de l'Italie au budget de l'Union européenne (UE), faute d'accord à Bruxelles sur le sort de migrants bloqués sur un navire italien. «L'Union européenne a décidé de tourner le dos à l'Italie encore une fois», a écrit Di Maio sur sa page Facebook, précisant que son pays n'a alors pas d'autre choix que de «prendre de manière unilatérale, une mesure compensatrice». «Nous sommes prêts à réduire les fonds que nous donnons à l'Union européenne», a-t-il ajouté, soulignant que l'Italie n'accepterait plus d'être «humiliée». Le leader du Mouvement Cinq Etoiles (M5S, antisystème) est suivi le même jour sur ce point par l'autre chef de file de la majorité gouvernementale (la Ligue, extrême droite), Matteo Salvini. «Si en Europe, ils font semblant de ne pas comprendre, étant donné que nous payons abondamment, on fera ce qu'il faut pour payer un peu moins», a déclaré ce dernier à une radio italienne. «Ils veulent les 20 milliards payés par les citoyens italiens ? Qu'ils démontrent de le mériter et qu'ils prennent en charge un problème que nous ne pouvons plus affronter seuls. Les frontières de l'Italie sont celles de l'Europe», a encore écrit Di Maio. En réaction, la Commission européenne a estimé le même jour que les menaces ne menaient «nulle part». «En Europe, les menaces ne servent à rien et ne mènent nulle part», a déclaré le porte-parole Alexander Winterstein, lors d'un point presse quotidien de l'Exécutif européen. «Les commentaires peu constructifs n'aident pas et ne nous rapprochent pas d'une solution», a-t-il aussi souligné. Le porte-parole a refusé de commenter directement les menaces de Di Maio, préférant répondre par des observations «de nature générale». «Comme nous l'avons expliqué ces derniers jours, la Commission a travaillé et continue de travailler intensivement pour résoudre la situation», a-t-il ajouté. «Donc trouver une solution pour les personnes à bord est notre priorité, c'est ce sur quoi nous nous concentrons et c'est aussi, pensons-nous, ce sur quoi tout le monde devrait se concentrer», a encore déclaré A. Winterstein. Selon les chiffres de la Commission européenne, en 2016 l'Italie a contribué au budget à hauteur de près de 14 milliards d'euros, et reçu 11,6 milliards au travers différents programmes européens. En 2017, les fonds reçus par l'Italie se montaient à 10 milliards, car les chiffres évoluent chaque année.