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La lettre de Mostefaï à lamine debaghine fait des vagues
Publié dans El Watan le 08 - 12 - 2004

Le regretté Mohamed Bensalem, compagnon UDMA du président Ferhat Abbas à Laghouat, dans les territoires du Sud, qui a combattu l'administration militaire, la grosse colonisation et les grandes féodalités et qui a été l'organisateur de cellules FLN et de maquis ALN dans le sud algérois, a résumé ainsi son parcours : «J'ai commencé le combat sans fortune et, après trente-deux ans de lutte, la victoire acquise, j'ai l'honneur de ne posséder, comme il y a trente-deux ans, aucune fortune. (El Moudjahid du 4 avril 2000, p.l7)
Cette profession de foi qui exprime, on ne peut mieux, la culture militante UDMiste, faite de dévouement et de désintéressement, au sens matériel et symbolique du terme, m'est revenue à l'esprit à la lecture de la «Lettre à Mohamed Lamine Debaghine» parue sous la plume de Chawki Mostefaï dans El Watan du 18 novembre 2004.
N'eussent été les paroles fielleuses avec lesquelles son auteur évoque Ferhat Abbas et son parcours d'homme politique et de militant, je me serais contenté de lire cette lettre avec l'étonnement compatissant de tout lecteur qui ne comprend pas l'appel presque désespéré d'un homme qui, à l'hiver de sa vie, demande instamment, et sans vergogne, à un ancien dirigeant de la révolution algérienne de témoigner de l'existence de hauts faits qu'il aurait accomplis et que ni les acteurs de cette dernière ni les historiens n'ont rapportés.
Ce qui choque en effet dans cette lettre, c'est la propension de Chawki Mostefaï à mettre au service de sa quête immodeste de reconnaissance imméritée une prétention qui, tout en frisant la mégalomanie, se nourrit d'une volonté manifeste de dénigrer et de rabaisser de prestigieux aînés dans le militantisme et l'action politique.
Les exemples d'une telle attitude et d'une telle disposition d'esprit foisonnent dans son discours. Je n'en citerai que quelques-uns.
Il en est ainsi de ce petit groupe de collégiens non-structurés qui forme, aux yeux de M. Mostefaï, «un îlot assez insolite pour la région, le Constantinois, où régnait sans partage la fédération des élus avec, comme figures de proue, le médecin de Constantine, le docteur Benjelloul et le pharmacien de Sétif Ferhat Abbas».
Question à M. Mostefaï : par quelles activités, militantes ou autres, ce petit groupe de collégiens, qu'il dit avoir animé, se singularisait-il pour pouvoir soutenir la comparaison avec un mouvement politique implanté dans tout le pays et dont l'un des leaders, Ferhat Abbas, avait déjà croisé le fer avec des ténors de la colonisation comme
L. Bertrand, E. F. Gautier, André Servier, etc.?
Ainsi en est-il également de cette infamante sentence que Chawki Mostefaï attribue – chose dont je doute d'ailleurs – à l'un de ses camarades du collège de Sétif : Ferhat Abbas, «ce zazou de la politique». Ainsi en est-il enfin de cette lumineuse réflexion : «Combien était plus réaliste à nos yeux la revendication de 1'indépendance comparée à la fumeuse politique d'assimilation d'un peuple arabe et musulman à une communauté étrangère et catholique de surcroît. Cela dépassait l'entendement. Et c'est vrai, Ferhat Abbas n'était pour nous qu'un rêveur, plus ou moins bien intentionné, pétri d'une bonne dose d'inconscience.»
Question à Chawki Mostefaï : comment des collégiens dont «la jeunesse et (1′) inexpérience se sont heurtées de plein fouet à des réalités concrètes et des difficultés insoupçonnées», des collégiens dont il a fini par reconnaître qu'ils étaient «naïfs», comment donc des collégiens qui étaient «interloqués» par le seul fait de voir de jeunes militaires français jouer au football avec insouciance – alors que leur pays venait d'être occupé par les nazis – peuvent-ils apprécier correctement l'action d'hommes politiques de l'envergure de Ferhat Abbas et être en mesure de décider qu'ils ne sont rien d'autre que des zazous, des rêveurs ou, pire, des inconscients? Le lecteur aura conclu de lui-même que cette sentence et ce jugement ne sont pas sortis de l'esprit d'adolescents encore naïfs et impatients mais de celui d'un homme avancé dans l'âge qui rêve, plus d'un demi-siècle après, de vider je ne sais quelle stupide querelle.
C'est pourquoi, il est temps que chacun reste le père de ses œuvres.
Monsieur Chawki Mostefaï, qui a peut-être croisé la route de Ferhat Abbas, sait pertimemment que mon oncle a servi son pays avec honneur, intelligence et constance.
Face donc à son cynisme et à la mauvaise foi caractérisée qu'il étale à longueur de colonnes, rappelons, pour le lecteur non averti, certaines dates et certains évènements auxquels le nom de Ferhat Abbas est intimement lié, évènements et dates qu'acteurs et historiens n'ont pas manqué de consigner.
1934. Ferhat Abbas – «ce Kabyle de Djidjelli» comme le désignaient avec une condescendance de mauvais aloi quelques adversaires de l'époque – est élu au Conseil municipal de Sétif alors qu'il était fraîchement installé dans la capitale des Hauts-Plateaux. Cette élection, ainsi que celle de ses compagnons, exprimait la confiance mise en lui par les habitants de sa ville d'adoption et ce, au grand dam de certaines notabilités qui considéraient cette région comme une seigneurie. Tout en signifiant la ruine de réputations usurpées, elle constitue, selon l'avis de tous, un tournant politique historique non seulement pour la ville de Sétif mais également pour tout le Nord constantinois.
1939-1940. Ferhat Abbas se lance dans la lutte antifasciste et antinazie. Pendant qu'un garnement agité projetait de manière fantaisiste «le déclenchement d'une lutte insurrectionnelle de libération nationale pour le 1er octobre 1940», Ferhat Abbas, lui, conscient des enjeux planétaires que représentait la lutte contre l'Allemagne hitlérienne, eut en effet l'honneur insigne de s'engager volontairement pour participer à l'écrasement de la bête immonde au nom des idéaux de liberté qu'il défendait depuis les années vingt du siècle passé et au nom de la liberté qu'il cherchait pour son peuple.
Quand on sait de quels crimes atroces contre l'humanité a été capable la folie totalitaire, on ne peut que s'interroger sur certains traits de la personnalité de Chawki Mostefaï que révèle indéniablement la condamnation sans appel qu'il prononce en 2004 ( ! ) contre l'engagement antifasciste de Ferhat Abbas.
1940-1942. Préfigurant la naissance du Manifeste, un rapport est remis par Ferhat Abbas au Maréchal Pétain le 10 avril 1940, suivi le 20 décembre 1942 de la remise d'un mémorandum aux autorités alliées, rapport et mémorandum qui résument ses positions constantes relatives à l'affranchissement politique des Algériens musulmans et à l'abolition du système colonial.
1943-1944. En février 1943, Ferhat Abbas donne naissance, à Sétif (rue Selliguène), au Manifeste du peuple algérien qui exprime l'aspiration à un Etat national souverain, au progrès, à la démocratie, à la justice sociale et à la modernité. Il le présente aux Autorités alliées ainsi qu'au gouvernement français le 31 mars de la même année. Il constitue ensuite, en mars-avril 1944, l'Association des amis du manifeste et de la liberté (AML)
L'article 4 des statuts des AML préconise de «rendre familière l'idée d'une nation algérienne et désirable la constitution en Algérie d'une république autonome fédérée à une république française rénovée, anticolonialiste et antiimpérialiste».
Ce projet, pour le service duquel a été créé un instrument de mise en œuvre – les AML en l'occurrence – relève d'une stratégie du possible qui a contribué à faire avancer la cause nationale et à ouvrir par la suite la perspective de la lutte armée de Libération nationale.
Tout comme d'ailleurs relevait de la même stratégie le projet que Ferhat Abbas a défendu au Congrès musulman à travers la notion d'assimilation, qui continue à chagriner tant Chawki Mostefaï et qui ne signifiait rien d'autre que l'égalité des droits et le respect de la personnalité musulmane.
En tout état de cause, la création des AML qui sont un front avant l'heure – un front avant le front – représente l'un des actes fondateurs de l'émancipation du peuple algérien qui laissera une empreinte durable. Cette stratégie du possible a été au cœur de toute l'œuvre politique et militante de Ferhat Abbas. N'est-ce pas lui qui disait : «Je préfère le compromis honorable à la violence et, connaissant le passé colonial, j'appréhendais surtout les révoltes et la mort de multitude d'innocents. C'est pourquoi j'ai cherché longtemps la solution de conciliation.»
Comme a été d'ailleurs au cœur de ses préoccupations les plus profondes l'état d'avilissement dans lequel se trouvaient les masses populaires pour lesquelles Ferhat Abbas nourrissait le projet généreux de les voir accéder à une vie décente, à l'instruction, à la connaissance et à l'éducation. Il aimait à répéter que la concrétisation de ces dernières constitue l'acte patriotique par excellence, acte qui est seul à même de les affranchir de l'illusion, de la mystification et de l'imposture dans lesquelles on a toujours voulu les enfermer.
C'est cet homme, qui n'est plus de ce monde, que Chawki Mostefaï insulte allègrement à un moment pourtant où, dans la vie d'un individu, les passions et les haines sont généralement apaisées. L'aveuglement qui est encore le sien aujourd'hui me fait penser à ces peintres qui ont des difficultés à distinguer dans leur art le soleil levant du soleil couchant. S'agissant du combat de Ferhat Abbas, il a été incapable de distinguer ce que d'autres ont vu très tôt: l'aurore naissante d'un peuple en train de revenir douloureusement à la vie. Pour terminer, je ne peux que m'élever contre le frétillement et la joie de boy-scout qu'il dit avoir ressentis en recevant les félicitations d'un Haut Commissaire français sur l'esplanade de Boumerdès. Il aurait été plus décent pour lui de rendre hommage au président de l'exécutif provisoire, le regretté Abderrahmane Farès, homme de courage, de modestie et de sagesse qui, lui, jouissait de la confiance totale du FLN et de la considération de ses compagnons.
Un dernier mot : il est important, pour tout homme, quel qu'il soit, de se remémorer toujours cet enseignement de notre foi : «Renonce aux contrevérités et aux mensonges par esprit d'honneur. Si tu n y renonces pas par crainte du péché.»
La vérité n'est pas ailleurs.


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