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«La protection de la démocratie est l'affaire de tous et pas uniquement celle des politiciens»
Publié dans El Watan le 09 - 05 - 2012

Interview réalisée à Dakar (Sénégal)
–Vous-êtes vous remis des journées passées en prison lors de l'élection présidentielle ?
J'ai effectivement passé des moments très difficiles en prison. Vu mon statut de coordinateur du Mouvement du 23 juin (M23) qui voulait mettre dehors Abdoulaye Wade, le pouvoir m'avait constamment dans son collimateur. Il voulait tout me mettre sur le dos, à commencer par la mort d'un policier. On voulait aussi me condamner pour atteinte à la sûreté de l'Etat et pour plein d'autres griefs. Heureusement que les procureurs ont refusé de marcher dans le stratagème des autorités. Il faut dire aussi que la pression de la rue et de la communauté internationale a été très forte. Au bout d'un certain temps, elle a fini par porter ses fruits. Le pouvoir a été obligé de reculer. C'est comme cela que j'ai pu sortir de prison.
-Le succès remporté par le M23 permet-il de dire, aujourd'hui, que la démocratie sénégalaise est sauvée et qu'elle est entrée dans un processus irréversible ?
En Afrique, je pense qu'il ne faut jamais être imprudent au point de dire «c'est fini, nos problèmes sont réglés… c'est la démocratie». Je me souviens qu'en 2000, avec l'élection d'Abdoulaye Wade au pouvoir, des universitaires très sérieux avaient publié des articles dans lesquels ils s'étaient avancés à dire que le Sénégal était sorti de l'auberge et que, justement, notre démocratie était irréversible. Surtout que le président élu avait fait la promesse de respecter la Constitution et de consacrer le principe de l'alternance au pouvoir. Le temps a fini par montrer qu'ils avaient eu tort. Abdoulaye Wade a non seulement épuisé ses deux mandats, mais il a voulu en faire un troisième. Pis encore, se faire réélire, lui et son vice-président, avec seulement 25% des voix. Le pire est qu'il a été suivi dans son œuvre par le Conseil constitutionnel. La suite des événements vous la connaissez. Morale de l'histoire : il faut toujours rester vigilant, retenir que nos démocraties sont en construction et qu'il faut, par conséquent, travailler à les consolider. La priorité, à mon sens, consiste à enraciner la culture démocratique dans nos sociétés. C'est d'autant plus important que nos élites politiques renient souvent leurs engagements après s'être installées au pouvoir.
-Qu'est-ce qui a motivé votre décision de vous mettre en avant ces derniers mois ? Les partis politiques étaient-ils trop faibles pour barrer la route à Abdoulaye Wade ?
Quand le président Wade a pris la décision de modifier la Constitution et de faire élire un président et un vice-président avec 25% des voix (le projet de ticket), nous avons réagi en tant que société civile. Nous n'avons pas considéré alors que la protection de la démocratie était uniquement l'affaire des politiciens. C'est comme cela que nous avons lancé notre slogan «Touche pas à ma Constitution». Le terrain était déjà fertile à la contestation. Les gens ont répondu spontanément et en grand nombre à notre appel. Par ailleurs, nous avons pris l'initiative de prendre attache avec les formations politiques et les convaincre de mener des actions communes et de conjuguer nos efforts pour faire barrage au projet de Wade. La société était déterminée à se faire entendre. Nous avons été surpris par la présence massive de la population à nos manifestations. C'était la première fois, depuis les indépendances, que nous avions eu des manifestations de cette ampleur. Encore une fois, j'insiste pour dire qu'il s'agissait d'actions citoyennes. Nous avons réagi en tant que citoyens.
-Et que pensez-vous de l'entrée en scène des jeunes du groupe «Y'en a marre» ? Vous attendiez-vous à ce que les jeunes s'impliquent autant dans votre combat ?
Tout à fait. Je m'y attendais. Cette réaction est le résultat du travail de promotion de la citoyenneté et des droits de l'homme que nous avons investi dans la société ces dernières années. Nous sommes heureux de constater, qu'aujourd'hui, il a porté ses fruits. Notre action a vraiment eu un impact chez les gens. L'engagement extraordinaire de jeunes chanteurs, de poètes, que je qualifierai de maudits et dotés d'un courage extraordinaire comme ceux du groupe Y'en a marre» a été aussi d'un apport non négligeable. Leur projet et leurs mots d'ordre ont eu un large écho auprès des jeunes. Il y a eu un effet boule de neige. C'est ce qui a fait que la jeunesse était très fortement impliquée dans notre mouvement. Je vous rappelle aussi que Y'en a marre était fortement impliqué dans les manifestations de rues et notamment dans les rassemblements à la place de l'Obélisque, au centre de Dakar. C'est l'ensemble de ces facteurs et l'implication de différents mouvements qui ont permis le succès du Mouvement du 23 juin.
-Dans quel état Abdoulaye Wade laisse-t-il le Sénégal ?
Jusqu'en 2004, le président Wade a tenu ses engagements qui consistaient à promouvoir la bonne gouvernance et les droits humains. C'est d'ailleurs sous sa présidence que la peine de mort a été abolie. Le fait aussi qu'il ait investi dans le développement des infrastructures, la modernisation de Dakar et la modernisation de l'Etat est une chose positive. Et les gens le reconnaissent. Mais après 2004, son pouvoir a connu une dérive monarchique. Il a tenu coûte que coûte à promouvoir son fils Karim, de façon à ce qu'il lui succède le moment venu. C'est à partir de ce moment qu'Abdoulaye Wade à renoncer à promouvoir les droits humains. Conséquence : le Haut-Commissariat aux droits de l'homme a fini par devenir une coquille vide. Aujourd'hui, les fonctionnaires de cette structure sont payés à ne rien faire. Le Comité sénégalais des droits de l'homme a été également négligé.
Tout le volet inhérent aux droits humains et à la bonne gouvernance a été oublié. Cela a fait que les détournements de fonds sont devenus légion. L'impunité s'est généralisée de manière choquante. La justice fonctionne selon la règle des deux poids deux mesures. Aujourd'hui, Abdoulaye Wade paye très cher le reniement de ses engagements. Son parti, le PDS, est en train de voler en éclats. Et je suis persuadé qu'il n'est pas au bout de ses soucis, surtout que maintenant il n'a plus de bonbons à distribuer. Les gens n'ont plus aucun respect pour lui. Malheureusement pour lui, il est sorti de l'histoire par la petite porte. Je suis persuadé que c'est ce qui arrivera à tous les dictateurs.
-Pensez-vous maintenant que la situation changera sous Macky Sall et qu'il rompra avec les pratiques du passé ?
En tournant la page Wade de la manière que vous connaissez, les Sénégalais ont ouvert une brèche. Le peuple sénégalais voulait se débarrasser de la gouvernance de Wade. C'est fait. Le président Macky est arrivé avec de nouvelles propositions et une volonté d'opérer une rupture avec la gestion passée. En ce qui nous concerne, nous sommes à un stade où nous observons. Si des initiatives allant dans le sens de la bonne gouvernance, du renforcement des institutions démocratiques, de la promotion des droits humains sont prises, bien évidemment nous soutiendrons. Il n'y a aucun problème. Maintenant, s'il y a des problèmes, nous réagirons en toute indépendance. Mais pour le moment, nous sommes dans un round d'observation.
Les nouveaux ministres viennent à peine d'occuper leurs locaux. Cela dit, nous suivons avec beaucoup d'intérêt ce qui se passe. Nous rappelons juste au nouveau gouvernement que les Sénégalais ont besoin de dirigeants qui sachent prendre des initiatives et qui sachent également être comptables de leurs actes devant le peuple. Aujourd'hui, les gens n'ont pas peur d'exprimer ce qu'ils pensent. Le nouveau gouvernement sera probablement le plus surveillé de l'histoire. Au-delà, Macky Sall, nous le connaissons personnellement. Je pense qu'il a vraiment la volonté de changer les choses. Pourvu que ce qui est arrivé aux autres ne lui arrive pas, à savoir s'enfermer dans une bulle et s'extraire de la réalité. Ce sont des choses qui très souvent arrivent aux gens qui arrivent au pouvoir.
-Quelles doivent-être, selon vous, les priorités des nouveaux décideurs ?
Tout est prioritaire lorsqu'on regarde l'état dans lequel se trouve aujourd'hui le Sénégal. Rien que pour parler du domaine qui est le mien, je pense qu'il est impérieux de bâtir des institutions de défense des droits humains fortes, indépendantes et légitimes. Des institutions qui permettent de nous faire avancer. Concernant la justice, le premier des combats est la lutte contre l'impunité. C'est un cancer qui gangrène la société. Durant l'ère Wade, beaucoup de gens ont été tués sous la torture. Cela est même arrivé dans les locaux de la police. Les auteurs de ces crimes n'ont pas été sanctionnés à ce jour, malgré leur identification. Le pire est que très souvent, les plaintes se retournaient contre les victimes.
C'est scandaleux. Il faut veiller à ce que de telles pratiques innommables ne se reproduisent plus. C'est fondamental, lorsqu'on aspire à bâtir un Etat de droit. Il faut aussi veiller à la transparence dans la gestion des finances publiques. Il y a beaucoup trop de corruption au Sénégal. Il me semble que, là aussi, il faudra faire preuve de pédagogie. Une pédagogie qui ne s'appuie pas seulement sur la répression. Mais il faut aussi que des mesures exemplaires soient prises pour envoyer des signaux assez forts pour dire que désormais nous avons tourné la page des détournements de fonds et de la corruption. Mais nous savons que cela ne sera pas facile. Le phénomène est devenu endémique. Il sera possible d'y arriver qu'avec l'aide de l'opinion et de la population.

-Et qu'en est-il de la révision de la Constitution et du retour aux deux mandats présidentiels ?
Sur cette question aussi, le président Sall a fait des promesses très fermes. Nous pensons très fort que nous allons y aller, car c'est la raison d'être du M23. Nous avons lutté pour qu'on ait une Constitution avec un mandat de 5 ans renouvelable une fois et qui garantisse l'alternance. Nous remercions Macky Sall d'avoir fait cette promesse au M23 et d'avoir annoncé une assemblée générale du Mouvement. De ce point de vue, je pense qu'il va tenir sa promesse. Elle lui tient à cœur. Il sait que cette nouvelle Constitution est attendue par tous les Sénégalais.


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