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«Nous sommes les pionniers de la révolution démocratique»
Publié dans El Watan le 21 - 10 - 2012

Ath Yenni (Tizi Ouzou).
De notre envoyé spécial

Une gerbe de fleurs déposée lors d'une commémoration organisée le 29 septembre dernier orne le monument. 29 septembre comme la date anniversaire de la création du Front des forces socialistes (FFS). Au pied de la stèle s'étale une dalle de béton sous laquelle gisent les dépouilles de sept martyrs en quête d'un statut. «Ils ont tous fait la Révolution. Ce sont des militants nationalistes de la première heure, qui avaient pris les armes dès 1954. Parmi eux figurent de vaillants officiers. L'ironie de l'histoire a voulu qu'ils soient tués par l'ANP, eux qui ont échappé aux griffes de l'armée coloniale», lance un jeune militant de la section FFS de Beni Yenni. Cette stèle, assure-t-on, est le premier monument dédié aux martyrs du maquis de 1963.
Quelques mètres à côté, derrière la grille du cimetière, s'élève un autre monument : deux mains géantes levées vers le ciel. C'est le monument aux martyrs de la guerre de Libération. «Cette stèle (celle du FFS, ndlr) a connu deux inaugurations», explique Da Rezki, ancien maquisard de 1963, un septuagénaire plein de verve, appuyé sur une béquille. «La première fois, elle a été inaugurée en 1989 par maître Ali Yahia Abdennour ; ensuite, elle a été inaugurée une deuxième fois par Hocine Aït Ahmed en 1990.»
Si, côté monuments, très peu de traces de cette séquence tumultueuse de notre histoire sont gravées dans le marbre, en revanche, force est de constater que ces événements sont jalousement gardés dans la mémoire de ceux qui les ont vécus. Parmi eux, Hebib Medjber, 69 ans, un des tout premiers militants du FFS au village de Mouloud Mammeri. Il faut dire que l'homme ne fait guère son âge, lui qui en impose par sa carrure. Hebib Medjber revient sur ces années houleuses qui le poussèrent à prendre le maquis, aux côtés de Da L'Ho, pour contrer le «clan d'Oujda». C'est, faut-il le rappeler, l'une des grosses conséquences de l'été 1962. «Nous sommes les pionniers de la révolution démocratique», dit tout de go Hebib Medjber. «On reconnaît des droits aux tangos et on ne reconnaît pas les martyrs de 1963. C'est injuste !», martèle-t-il.
«J'ai subi des tortures atroces»
Et de nous faire le récit de son engagement précoce : «Je devais avoir à peine 18 ans. Il y avait l'histoire des wilayas, le coup de force de Boumediène. Avant de rejoindre le maquis du FFS, j'ai participé à la lutte interwilayas. J'étais dans la première opposition du temps de Mohand Oulhadj. Après, le colonel Oulhadj a rejoint les rangs de l'ANP à l'appel du colonel Ouamrane, pour participer à la guerre des Sables (contre le Maroc). Il disait que la défense de notre intégrité territoriale était une priorité. Après le retrait de Mohand Oulhadj et la fin de la première opposition, qui avait duré 4 à 5 mois, je suis parti en France pour fuir la répression qui s'abattait sur nous. En mai 1964, j'ai réintégré la deuxième opposition. Nous étions environ une compagnie. Nous étions bien structurés. Mais les consignes de Hocine Aït Ahmed étaient d'éviter au maximum les accrochages avec l'ANP pour nous épargner d'inutiles effusions de sang. Sous Oulhadj, nous étions tout un bataillon, voire plus.»
Selon Hebib Medjber, les foyers de la guérilla kabyle étaient implantés un peu partout, aux Ouadhias, à Ath Yenni, à Beni Douala, à Michelet, à Azazga… Et de poursuivre : «Le 31 décembre 1964, alors qu'on tenait un congrès près d'Azazga, j'ai été arrêté. On sortait de l'Akfadou. Il y avait eu une opération d'envergure dirigée contre nous. Le pouvoir était décidé à en finir avec la ‘smala' du FFS. Nous avions passé trois jours sous la neige, nous étions exsangues, sans provisions, sans armes. Nous avions marché toute la journée. Je n'avais qu'un Mas 36 et 14 cartouches pour toutes munitions. Le combat était inégal. Après mon arrestation, j'ai subi des tortures atroces que même l'armée coloniale n'avait pas pratiquées. La France utilisait la gégène, c'est-à-dire un courant électrique atténué, tandis que moi, je subissais des décharges électriques de 220 volts, directement sur le corps. J'étais flagellé à coups de fouet hérissé de gros boulons.
Après plusieurs jours de torture, j'ai été déféré devant la cour de Tizi Ouzou. Tous ceux qui avaient exprimé leur repentance ont écopé de peines allant de 8 à 12 ans de prison. Il fallait dire ‘je regrette ce que j'ai fait'. Moi je disais ‘ourn'dimghara' (je ne regrette rien). J'assume pleinement ce que j'ai fait ! Le procureur a requis 20 ans de prison contre moi. Mon affaire a été renvoyée devant la cour criminelle. Là, je me suis dit ça va être la peine capitale. Suite à des tractations, j'ai été libéré huit mois après mon arrestation. Après, ma vie a été un enfer. Nous étions traqués par la Sécurité militaire. J'ai dû changer 20 fois d'employeur. J'étais comptable.
Mais je regarde tout cela avec fierté. J'ai fait de la prison pour mes convictions, avec honneur et gloire.» Hebib Medjber, comme les autres militants que nous avons rencontrés, évalue à quelque 450 les combattants tués lors de l'insurrection du FFS. Notre baroudeur regrette que très peu d'entre eux aient été considérés comme des chouhada. «Leurs veuves et leurs enfants ont vécu dans des conditions très difficiles», ajoute-t-il. Interrogé à propos de la revendication du FFS de reconnaître le statut de «martyr» aux militants tués durant cette période, Hebib Medjber répond : «A titre personnel, je n'ai jamais exprimé une quelconque revendication. Mais à l'échelle du parti, la question est prise en charge et j'y adhère entièrement.»
«La majorité d'entre nous étaient d'anciens moudjahidine»
Hassas Saâdi, 73 ans, Da Ravah Ayaniw de son «nom de guerre», est un autre rescapé du maquis de 1963. Barbe blanche et bleu de Chine, ce retraité d'une imprimerie étatique avait d'emblée répondu à l'appel à la résistance lancé par Aït Ahmed. «J'assistais à toutes les conférences itinérantes organisées dans les villages par Aït Ahmed, le colonel Mohand Oulhadj, le colonel Sadek et d'autres. Je me déplaçais aux Ouacifs, aux Ouadhias, partout. J'avais 22 ans à l'époque et j'étais sensibilisé au combat démocratique. Le détournement de la Constituante était quelque chose de très grave, si bien que j'ai rejoint tout naturellement le maquis de 1963. J'étais établi à Alger. J'avais une fille, qui était née en 1962, mais l'appel du devoir passait pour moi avant ma famille. C'est ainsi que j'ai été affecté à la zone 2, près de Bouira. J'y suis resté jusqu'à la fin des combats. Nous avions un armement rudimentaire qu'avaient ramené les moudjahidine car il faut savoir que la grande majorité de nos combattants avaient participé à la guerre de Libération au sein de la Wilaya III. Il y avait dans ma zone environ 200 hommes, un peu plus.
La plupart étaient équipés de vieux Mat 49, des Mas 36 et autres fusils hérités de la Révolution. Notre chef, le commandant Moussa, était un illustre maquisard de l'ALN. Nous avons perdu beaucoup de militants valeureux. En tout, il y a eu quelque 480 morts.» Da Ravah ne renie pas une miette de son combat. «Les gens disaient à Aït Ahmed que ce n'était pas le moment, arguant du fait qu'on sortait d'une guerre féroce. Mais le combat que nous menions était un combat juste, un combat pour la démocratie.» Pour Hassas Saâdi, il ne fait aucun doute que les morts gisant sous cette dalle de ciment nu sont des «chouhada». «Mais moi non plus, je n'ai jamais rien revendiqué. J'ai souffert le martyre pour rejoindre la vie civile et c'est grâce à une intervention que j'ai pu trouver du travail.» Da Ravah estime que la reconnaissance par Abdelmalek Sellal des victimes de 1963 «est un premier pas. Moi je n'ai rien demandé, mais si le gouvernement propose une indemnité pour les victimes, on ne va pas cracher dessus…»
Tous les 29 septembre, les «vétérans» de la guérilla du FFS se retrouvent devant cette stèle pour rendre hommage à leurs compagnons de lutte. «Beni Yenni a donné beaucoup de martyrs», soupire Da Ravah. Le candidat FFS pour les prochaines élections communales, Ismaïl Deghoul, et quelques autres membres du bureau du FFS à Beni Yenni sont, eux aussi, très attachés à cette cérémonie. Ismaïl Deghoul, 37 ans, cadre à la poste locale, se dit fort imprégné par cet héritage. «Pour moi, ces vaillants militants de la première heure sont un symbole très fort qui nous inspire dans notre combat d'aujourd'hui. Ils sont l'incarnation de la ligne historique du parti. Nous les consultons dans tout ce que nous faisons. C'est notre ‘tajmaât el oqal' (le comité des sages).» Pour Ismaïl, Belaïd et les autres jeunes militants du parti, la passation de témoin s'est faite d'une façon tout à fait naturelle. Filiale. «Cette mémoire est perpétuée grâce à la transmission orale. Il est malheureux que cette histoire soit censurée dans les manuels scolaires.»


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