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Chronique africaine. « À mes chers parents gaulois » : Solde de tout compte
Publié dans El Watan le 05 - 06 - 2010

Entre l'autobiographie, l'essai historique et le pamphlet pour tordre le coup aux mépris anciens et nouveaux.
L'auteur sénégalais, Fadel Dia, mérite une lecture attentive de son dernier ouvrage, A mes chers parents gaulois, le premier ayant été publié en 2000 sous le titre de Mon village au temps des Blancs. Né en 1939, c'est sur le tard, et après avoir pris sa retraite d'une longue carrière de professeur d'histoire à l'université de Dakar, qu'il se décide à régler ses comptes avec le colonialisme, une certaine France et les Français. Ceci peut paraître étonnant lorsque l'on sait qu'il a occupé le poste de secrétaire général de la Conférence des ministres des pays ayant en partage le français, une langue qu'il manie avec élégance, dans la droite ligne de la tradition des romanciers et essayistes sénégalais de grande facture.
Cet ouvrage est la conséquence d'une longue maturation, le résultat d'une longue expérience. Ce n'est pas un ouvrage que l'on écrit à l'âge de vingt ans. Fadel Dia apporte une réflexion, à la fois mûre et fraîche, dans le sens où il exprime des idées et des ressentis que ses compatriotes, tels Cheikh Anta Diop ou Amadou Hampate Bâ, ont exprimé en des termes acerbes. Les positions critiques du colonialisme de Dia Fadel s'expriment à partir de ses propres expériences et de ses propres réflexions sur le quotidien et sur sa pratique des Français installés au Sénégal ou de France. Cet ouvrage semble se situer dans la ligne réactive au discours de Dakar du président Sarkozy sur l'incapacité des Africains à se projeter dans l'avenir, et aux discours venant de métropole sur les bienfaits du colonialisme. Pour Fadel Dia, qui est un enfant de la colonisation, le français est décidément « l'orateur, le préposé aux discours et aux ordres, l'officiant, le commettant ». Il a fréquenté les bancs de l'école coloniale où il a appris, comme des milliers de Sénégalais, ou d'Algériens d'ailleurs, que ses ancêtres étaient les Gaulois. Initié à la grande littérature française où Victor Hugo et Chateaubriand occupaient une place respectable au détriment de la culture spécifiquement africaine, il écrit avec ironie : « la colonisation n'est-elle pas émancipatrice ? »
A partir de la culture imposée, mais parfaitement intégrée (car derrière l'idéal littéraire, il y a celui de 1789, la Révolution française), Fadel Dia dénonce l'incapacité et l'impuissance du Français à « s'ouvrir » à la culture africaine, alors que l'Africain connaît tout de la culture française. Le déséquilibre est souligné avec force et il ironise sur l'amitié franco-africaine : « N'exagérons pas ! », écrit-il, car « dans ce soi-disant couple d'amis, l'un était le colonisateur et l'autre le colonisé. » Ses fonctions l'ont amené à côtoyer des officiels français, de hautes personnalités et des gens de la rue dans les villes françaises, et le constat est amer. Le désenchantement s'installe, car il réalise qu'il demeure « un sous-fifre » dans la condescendance feutrée des coopérants et des officiels à l'égard des Sénégalais et des Africains en général. Dans A Mes chers parents gaulois, Fadel Dia exprime son désaveu de cette fausse égalité exprimée après les indépendances, car il a toujours su qu'on le toisait de haut, malgré ses diplômes et ses fonctions et qu'au niveau psychologique, les choses n'ont pas beaucoup évolué. Dans la postcolonialité, il y a un relent de la colonialité et tout l'ouvrage s'articule autour de cette idée. Cette autobiographie dénonce avec force le comportement de nombreux Français qui se sentent toujours en pays conquis au Sénégal. Le désamour des Africains s'accentue par manque de respect et de reconnaissance de l'Autre, aujourd'hui indépendant. Fadel Dia exprime le non-dit que beaucoup de politiciens tentent de taire. Si de telles attitudes ont été dénoncées durant la colonisation par des auteurs comme Sembène Ousmane ou Léopold Sédar Senghor, l'originalité de cet ouvrage postcolonial est de montrer la perduration d'attitudes ancrées dans certains esprits, comme la condescendance, sinon le mépris.
C'est avec pertinence qu'il exprime ses ressentiments en utilisant des formes de proverbes africains comme celui-ci : « Ce n'est pas en raccompagnant son hôte jusqu'à la sortie du village qu'on peut lui faire oublier l'accueil discourtois qui lui a été réservé. » Une allusion à ceux que l'on renvoie comme des malpropres, aux sans-papiers, alors que les Européens, malgré leurs manières précieuses et leurs habits scintillants, n'étaient que des « barbares » qui sont restés des siècles en Afrique sans autorisation. Fadel Dia mêle à son histoire le grande Histoire lorsqu'il dénonce l'utilisation des tirailleurs sénégalais en Algérie et à Madagascar en vue de la pacification, au moment où ces tirailleurs servaient de supplétifs aux troupes françaises. Il rappelle qu'ils étaient renvoyés « dans leurs gourbis » dès les guerres terminées, voire même éliminés dans le cadre du « blanchiment des troupes ».
En effet, des milliers de soldats sénégalais furent jetés à la mer après le débarquement en Provence, un fait historique passé sous silence par les chefs d'Etat africains et par les hôtes français lors de la commémoration du soixantième anniversaire de ce débarquement en 2004. Par ailleurs, aujourd'hui, cette vieille relation entre l'Afrique et la France est mise à mal du fait de la question des visas, que Fadel Dia fustige : « Les Français nous quittent et nous ferment leurs portes. » Il ne comprend pas qu'un Sénégalais puisse avoir un visa de dix ans pour les Etats-Unis sans problème, alors qu'il doit « négocier au corps à corps un visa de trois mois pour rentrer en France ». Pour Fadel Dia, amoureux de la France des droits de l'homme et des belles lettres, il y a les mots et il y a les actes. Ces derniers ne concrétisent, malheureusement pas, cette amitié ; cette « Teranga » proclamée, mais non assumée. Au fond, Fadel Dia raconte avec tristesse la fin d'une longue relation, une sorte de divorce, à un moment où une entente sereine, dans le respect mutuel, devenait possible. Mais la frilosité et le déficit d'idéal de la France profite décidément au monde anglophone.
Fadel Dia, A mes chers parents gaulois, éditions Les Arènes, Paris, 2007


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