Le ministre des Travaux publics, Farouk Chiali, en visite dans la wilaya de Tipasa le 15 août 2020, selon ses déclarations à la presse, a fait savoir que ses services ont pris attache avec les entreprises de réalisation et que le dossier sera présenté au président de la République, Abdelmadjid Tebboune, vers la fin du mois de septembre 2020. Or, le président de la République dans le cadre de la relance économique et celle des projets en souffrance, avait réagi au rapport du mégaprojet présenté par le ministre chargé du dossier. Pas du tout convaincu, Abdelmadjid Tebboune, avait instruit lors du Conseil des ministres tenu le 28 juin 2020, «de réexaminer le dossier du Grand port commercial centre (GPCC) d'El Hamdania (Tipasa), en rappelant les détails de ce dossier et les pertes occasionnées par son retard dans la réalisation». Il avait instruit le Premier ministre, Djerrad, de prendre de nouveaux contacts avec le partenaire chinois et d'étudier le projet sur de nouvelles bases dans la transparence, avant de le soumettre au Conseil des ministres dans un délai de trois mois. «Ce projet sera réétudié dans tous ses aspects, économique, social, et stratégique, y compris son impact sur l'agriculture», déclarait Chiali Farouk, à Tipasa, au mois de juillet 2020. La faisabilité du mégaprojet (3,6 milliards de dollars US) sur le site El Hamdania est remise en cause après le départ d'el-issaba, qui voulait imposer sa construction. Etonnement, il y aurait un décalage entre l'instruction du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, et la dernière déclaration de son ministre des Travaux publics. Tribulations de Chinois en Algérie El Watan aura été l'unique média national qui avait alerté les hautes autorités du pays à maintes reprises depuis 2016, sur la catastrophe sociale, écologique (terrestre et marine), agricole, culturelle et touristique qu'engendrera la construction du port commercial dans cette partie est de la ville de Cherchell. (El Watan du 29/12/2017 ) et (El Watan du 13/10/2019). Les potentialités touristiques, culturelles, agricoles, environnementales au pluriel. Une seule et unique variante pour ce mégaprojet avait été imposée et soumise pour son exécution. Depuis que l'ancien Président déchu a donné «inconsciemment» son accord pour sa construction lors du Conseil des ministres tenu le 30 décembre 2015, toutes les déclarations officielles du Premier ministre Sellal et ses ministres, avaient dévoilé leurs mensonges, leur manque d'arguments pour convaincre. En réalité, ce mégaprojet n'a été précédé par aucune étude avant que les dirigeants du pays ne décident de son implantation à l'est de la commune de Cherchell. Le Premier ministre Sellal annonçait à la Télévision nationale, à deux reprises, que le port commercial Centre sera construit à l'Ouest de cette même localité côtière. Il suffit de consulter les archives. Plus grave encore, aucun ministre impliqué dans ce mégaprojet n'avait daigné effectuer un détour sur le site féerique avant d'émettre son avis. Les amis chinois à l'affût des affaires juteuses n'avaient pas perdu leur temps. En effet, la Chine envoie officiellement le 17 janvier 2016 ses représentants pour signer en grande pompe devant les caméras de «l'Unique» la convention de partenariat inhérente à ce mégaprojet, sans toutefois informer l'opinion publique que ce mégaprojet avec ses zones industrielles, dès sa mise en service, son exploitation sera confiée aux Chinois pour une durée de 35 ans. L'histoire de la centrale électrique de Hadjret Ennous (Cherchell) construite sur un site paradisiaque et le scandale de corruption qui a suivi cet autre mégaprojet ont marqué les esprits. Et la protection et la valorisation du littoral ? Le projet du GPCC est confié donc à CSCEC (China State Construction Engineering Corporation). Le Conseil des ministres, sous l'ère de Bouteflika, n'avait pas respecté toutes les lois relatives à la stratégie de préservation, la protection et la valorisation du littoral, la protection de l'environnement dans le cadre du développement durable, les différents schémas nationaux d'orientation et de planification qui s'inscrivent d'une manière cohérente avec le SNAT (schéma national de l'aménagement du territoire). Le hirak a obligé les autorités à geler le projet. Le premier responsable de CSCEC, rencontré par nos soins, avant l'élection présidentielle du 12 décembre 2019, nous déclare : «Nous attendons toujours la décision des autorités algériennes.» Le site d'El Hamdania (Cherchell) est une aire protégée. Plus étrange encore, toutes les directions de la wilaya de Tipasa reçoivent, le 16 février 2016, une instruction pour transmettre de plus amples informations sur toutes les superficies incluses dans le site du port commercial, afin que les hautes autorités du pays puissent obtenir une étude chiffrée et les impacts de ce mégaprojet. Le bureau d'étude sud-coréen sollicité déjà, Yuill Engeneering Co Ltd, était chargé de l'étude initiale. Il a été vite débarqué après avoir encaissé des dizaines de millions de dollars. Les Chinois devenus maîtres des lieux, remplacent les Sud-Coréens par le bureau d'étude chinois CHEC (China Harbour Engineering Company). Au mois de septembre 2016, les Chinois envoient leur navire de couleur orange au large du site d'El Hamdania pour effectuer la bathymétrie. Un troisième bureau d'études européen avait été introduit grâce à l'intervention du fils d'un ex-Premier ministre aujourd'hui incarcéré. Il s'agit du bureau d'études (anglo-franco-belge), dénommé Ramboll-Amplea, destiné à «rentabiliser les tâches relatives à la construction et l'exploitation de l'infrastructure portuaire». La mise à mort de la faune et sa flore halieutiques Il s'est avéré que le Président déchu, Abdellaziz Bouteflika, avait donné son accord à un mégaprojet sans que l'étude ne soit faite. Le maintien du site choisi à l'est de la ville de Cherchell signifie la disparition de deux ZET, (El Hamdania et Oued Bellah) et leurs plages qui s'étendent sur une superficie de 142 000 m2, les criques, la disparition de 3000 ha à haute valeur agricole, selon un fonctionnaire su secteur, le déplacement et le recasement de plusieurs centaines de familles rurales vers d'autres régions, la disparition des centaines d'hectares de forêt, leurs faunes et leurs flores, la menace de disparition aussi des sites archéologiques visibles, des 24 canons du XVe siècle immergés et la maison du célèbre musicien Mohamed Iguerbouchène, enfin la pollution marine suivie par la mise à mort de sa faune et sa flore halieutique. Al Issaba avait greffé les entreprises des oligarques, Haddad et Kouninef, dans la «réalisation» de ce mégaprojet aux côtés des chinois. Le mont Chenoua, monument naturel classé, avait été cédé à des «investisseurs» chanceux, créant ainsi des carrières (verrues, ndlr) destinées à alimenter le futur GPRC en grosses pierres. Or, le site le plus indiqué pour abriter le port commercial Centre, selon plusieurs experts consultés par nos soins, se trouve entre l'ouest de Cherchell et l'est de la localité de Sidi Ghilès. Une pénétrante sur la voie express Cherchell-Alger-El Affroun est déjà opérationnelle. Le site est très peu habité. Les superficies agricoles sont à faible rendement agricole dont certaines en jachère, et la possibilité d'élargir la surface en allant vers la mer, en raison des faibles profondeurs au niveau du plateau marin sont autant d'atouts qui méritent d'être étudiés dans une autre variante. Il n'y a point de plages, ni monuments culturels. Le mégaprojet à l'ouest de Cherchell sera moins coûteux. Les autorités de la wilaya de Tipasa étaient tétanisées. Elles n'avaient pas proposé des arguments face à la détermination des visées d'El-Issaba, qui avait engagé les démarches sur un mégaprojet fondé sur des mensonges. Les décideurs et les concepteurs du GPCC imposent la signature du décret exécutif 17-122 du 22 mars 2017, relatif à la déclaration d'utilité publique, la construction du port commercial centre d'El Hamdania (Cherchell), afin d'activer le chapitre financier. Maintenant, ces concepteurs, ces initiateurs et ces décideurs de ce mégaprojet sont emprisonnés, impliqués dans des scandales de corruption. Il s'agit des deux Premiers ministres, des ministres des Travaux publics, des walis de Tipasa instruits d'activer les procédures à l'échelle locale et enfin leurs complices oligarques, Kouninef et Haddad, engagés aux côtés de l'entreprise chinoise CSCEC, se trouvent en prison. Transparence à bon port La décision du Président Tebboune n'est donc pas fortuite. Ce mégaprojet avait été imposé avec une seule variante. Si le chapitre physique du projet n'a pas avancé d'un iota, depuis la décision du Conseil des ministres prise le 30 décembre 2015, en revanche le volet financier a enregistré une avancée considérable. Le Président Tebboune exige à présent la transparence dans la nouvelle étude, en tenant compte des impacts sur les secteurs : agricole, halieutique, culturel, touristique, environnemental, forestier, social. Ceux qui avaient précipité l'étude à des fins maffieuses sont aujourd'hui en prison. Des millions de dollars sont déjà dilapidés. Etrangement, Farouk Chiali continue à faire des déclarations remises par les fonctionnaires qui travaillaient sous la responsabilité des décideurs emprisonnés aujourd'hui. Il n'y a eu aucun débat. Le feuilleton du GPCC continue sans aucun changement, d'où ce décalage entre l'instruction de Tebboune et le travail de Chiali Farouk ! Veut-on le changement dans la continuité, au détriment de l'intérêt du pays et de son peuple ? Un port commercial d'une envergure continentale à Tipasa créera des richesses certes, ne peut-on pas le construire en évitant de faire disparaître des potentialités déjà existantes. L'étude d'autres variantes s'avère impérative, afin de consolider le choix du site, sans faire des énormes dégâts.