Rap, hip-hop et banlieue. Une association particulièrement usée par les cinéastes ces dernières années. Pourtant, Denis Thybaud, qui signe avec Dans tes rêves son premier long métrage, met complètement de côté les clichés habituels pour faire un zoom sur un itinéraire, un destin, celui d'un jeune rappeur qui tente de percer dans un milieu hostile. De par son écriture, son casting, ses personnages, sa mise en scène... Dans tes rêves est tout sauf une récupération facile. Avec des personnages aussi attachants et une caméra aussi dynamique, on ne peut que plonger, la tête la première, dans cette fiction bouleversante et chargée d'émotions simples. Une fiction dotée d'une véritable structure dramatique, nourrie de sous-intrigues. Les premiers plans suggèrent La Haine de Mathieu Kassovitz, un peu comme pour situer un paysage. Ensuite, on met le pied dans le plat : une fiction musicale et sociale qui résume, à elle seule, le sens et la raison du rap. Côté casting : Sérigne M'Baye (Disiz La Peste pour le nom de scène) est le personnage principal, Ixe, un parfait révolté. Vincent Elbaz joue merveilleusement bien le rôle de Ben, un malfrat magouilleur. Jean-Pierre Cassel ne fait que deux apparitions, mais elles sont frappantes. Edouard Montoute, Keuj, incarne le coiffeur, apprenti manager, et qui est le personnage générateur de la fiction. Tony Mpoudja, convaincant dans son rôle de rival haineux d'Ixe. Béatrice Dalle, Ava, à la fois fragile et grande gueule - comme le souhaitait le réalisateur - est la célèbre productrice de spectacles. Alex Descas joue le rôle de Mojo, figure mythique du rap français, et qui, à sa façon, passerait presque pour le personnage principal du film. L'un des points forts : les rêves qui constituent l'essence même du film. Deux en particulier, celui du DJ Belly (Khaled Mansour) qui, dans sa petite piole bondée de vinyles, plonge dans son fantasme : scratcher en arrière-plan de deux belles danseuses. Et Keuj, qui plonge dans une reproduction d'une toile classique et qui réalise son fantasme : un pique-nique avec ses potes. Un autre point fort : le film se déroule sous la forme de chapitres, chacun est annoncé par un zoom sur un vinyle, morceau après morceau, exactement comme pour un 33 tours. Bref, Dans tes rêves est une fiction surprenante qui laisse un arrière-goût salé - les larmes qui ne peuvent que céder à leur destin ? - mais qui plaît, justement, parce qu'il ne traite pas le rap et la banlieue comme on s'y attend. Comme l'a si bien expliqué le réalisateur lors de la conférence de presse qui a suivi la projection de son film : « J'ai choisi le rap, mais ça aurait pu être le foot... » Son objectif était simplement d'entrer dans un microcosme et de suivre un personnage, son destin et l'évolution des autres personnages autour de lui.
