Du fait du terrorisme, les fellahs se sont installés dans des bidonvilles à El Eulma. Nous attendons depuis plus d'une décennie le retour à notre douar, mais c'est en vain puisque rien n'a été fait par les responsables concernés, à tous les niveaux, pour nous permettre de retourner à nos terres et retrouver ce qui reste de nos maisons», dénoncent en chœur des dizaines d'habitants de mechta Lehnèche, une des plus importantes localités rurales de la commune de Tachouda, daïra de Bir El Arch. Certains habitants qui ont fui cette dechra montagneuse pour venir s'installer dans des cités improvisées du côté de Boukhabla et Souamaâ, à El Eulma, ne pensent aujourd'hui qu'au retour au bled du moment que la situation sécuritaire s'est améliorée; leur douar était autrefois investi par la horde terroriste qui a tout détruit, obligeant les gens à tout abandonner pour se réfugier dans les villes. Sur les lieux, c'est le néant avec un grand N. Tout a été détruit, les stigmates sont visibles un peu partout à travers la mechta. Certains habitants qui se sont installés un peu plus loin, en retournant à la mechta, ils n'ont même pas retrouvé leurs maisons. Tout a disparu, même les pierres ont été emportées par des maraudeurs venus principalement de la ville d'El Eulma. Pas de route, pas d'électricité, pas de gaz, pas d'eau, c'est une mechta fantôme à laquelle ont été conviés les premiers visiteurs, dont beaucoup de jeunes venus pour la première fois au pays de leurs parents. Seule la mosquée implantée non loin d'un oued a pu échapper par miracle à ce raz-de-marée destructeur ; elle a été restaurée par les gens du douar pour qu'ils puissent s'y retrouver chaque année au mois de mai pour célébrer la waâda de Belghafar. A part cette rencontre annuelle, certains habitants de la mechta ne viennent que rarement pour entretenir ce qui reste de leurs vergers, d'autres pour travailler durant la journée leurs lopins de terre et repartir avant la tombée de la nuit. Un manège qui commence à peser lourdement sur leur quotidien. La route menant à la mechta, qui n'en a que le nom, est en réalité une piste, un calvaire pour ces gens, même pour les plus téméraires d'entre eux. Dans ce bled perdu, un retour reste évidemment tributaire d'un véritable engagement des pouvoirs publics à travers une aide sérieuse, et surtout avec l'ouverture d'une route digne de ce nom. C'est ce que les habitants de mechta Lehnèche attendent depuis plus de deux décennies. Il est à souligner que la majorité d'entre eux vit dans des conditions pénibles pour ne pas dire dramatiques dans des bidonvilles du côté d'El Eulma.