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Les raisons d'un effondrement
Bâtisse de l'ancien tribunal de Béjaïa
Publié dans El Watan le 11 - 05 - 2011

La moitié de l'ancien tribunal de Béjaïa, un monument architectural, s'est effondré, le 8 mars dernier, en pleins travaux de confortement.
Ce drame interpelle les consciences d'autant plus que toute l'ancienne et coquette ville de Béjaïa risque de subir le même sort puisqu'elle est sous la menace de tomber en ruines. Pour comprendre les raisons de cet effondrement, nous avons enquêté pendant près d'un mois.
Depuis plus d'un siècle, l'ancien tribunal de Béjaïa, bâtiment construit durant la colonisation française, est resté debout. Ce très joli édifice a, certes, subit des fissures, mais il est resté debout, jusqu'au moment de l'exécution des travaux de confortement. Toute sa partie arrière est alors réduite en décombres et poussières. Fort heureusement, les ouvriers qui étaient à pied d'œuvre avaient pris congé au moment de l'effondrement. Autrement, c'est certain, il y aurait mort d'hommes. En cause, donc, des travaux de confortement jugés par beaucoup d'urbanistes que nous avons interrogés de «ne pas être à la hauteur».
Au moment du drame, l'édifice est ciblé par des travaux de confortement pour qu'il serve d'annexe à l'Ecole des beaux-arts. Mais le bâtiment menace ruine depuis au moins 18 longues années.
Les faits sont têtus
Les premières fissures sont apparues, en effet, en 1993. Une année plus tard, un diagnostic a été établi par le laboratoire national de l'habitat et de la construction (LNHC), de concert avec l'organisme de contrôle technique CTC Est, qui avaient alerté les pouvoirs publics à l'époque sur «l'urgence de conforter ce bâtiment vu qu'il est fortement fragilisé par des eaux souterraines dues à la rupture des conduites». En dépit de cette alerte, il a fallu attendre 2002, pour que la direction de l'urbanisme daigne, enfin, commander une étude géotechnique pour le confortement de ce bel immeuble de trois étages. Octobre 2008, un bureau avait été chargé de réviser l'étude en vue d'y intégrer le drainage des eaux pluviales qui menaçaient le site d'affaissement.
Deux ans plus tard, la Direction de la culture qui a hérité la bâtisse, a sollicité le bureau Mahindad afin de mener une étude avant que les travaux de confortement ne soient confiés à l'entreprise Hydroforage systèmes Amzal. Le bureau d'étude signe un contrat d'étude avec la Direction de la culture, consistant en une «reprise en sous-œuvre» avec suivi du chantier. Une source affirme qu'avant d'entamer les travaux, le bureau Mahindad a sollicité l'avis de deux experts du Ministère de la culture. Les travaux consistent en la réalisation de fondations pour conforter le bâtiment avant de réparer les fissures. Les travaux qui avaient été entamés en septembre 2010 devraient durer 9 mois.
L'entreprise Amzal a creusé à l'aide d'une foreuse sans vibration puis à la main 40 pieux ayant entre 6 et 17 mètres de profondeur. Des semelles sont aussi réalisées pour conférer une assise au bâtiment. Les travaux ont été suivis par un technicien délégué par la Direction de la culture et le bureau d'études avec l'assistance technique du CTC Est. Les travaux ont d'abord ciblé une partie de la bâtisse, l'édifice est encore debout. Dès que les ouvriers ont exécuté les travaux sur la partie arrière de l'immeuble, le mur a cédé puis, la moitié de l'édifice est réduite en ruines sous l'œil dépité des citoyens de Béjaïa.
Les raisons d'un échec
De prime abord, une unanimité se dégage : «Un immense et inacceptable retard a été accusé dans le lancement des travaux de restauration». «Si les travaux de réhabilitation avaient été réalisés il y a vingt ans, le bâtiment ne se serait pas effondré», atteste un architecte. «Les signaux d'alarmes étaient visibles, depuis vingt ans. Toute l'ancienne ville de Béjaïa est sous la menace de tomber en lambeaux. Tout le site abritant l'ancien tribunal s'est affaissé», s'alarme un cadre en bâtiment.
Explication de ce dernier : «Un diagnostic est nécessaire sur tous les bâtiments implantés sur tout le site. Un tel travail ne peut être effectué qu'au terme d'une consultation élargie et pointue avec le concours d'un panel d'experts géotechniciens». «Il faut tirer les leçons qui s'imposent. Tout le monde est responsable. Le maitre de l'ouvrage, le bureau d'étude et l'entreprise de réalisation. Il fallait connaître au préalable l'histoire de la bâtisse et du site et mener une enquête exhaustive sur tout le site. Toutes ces données auraient permis de mieux élaborer le cahier des charges avec l'exigence d'engager des spécialistes dans la restauration», charge ce cadre en bâtiment. De son côté, M. Meziani, responsable de l'antenne de Béjaïa du centre de contrôle technique CTC EST affirme «avoir examiné et approuvé les plans établis par le bureau d'étude». «Plusieurs expertises ont été menées sur le site où est implanté l'ancien tribunal», ajoute-t-il «La méthode utilisée est bonne et nous l'avons approuvée», atteste M. Meziani avant d'estimer que «le risque existe dans ce genre de métier, d'autant plus que le terrain sur lequel est implanté cet édifice est un sol mouvant fragilisé par la présence d'énormes quantités d'eaux souterraines dues aux fuites qui s'échappent des vielles conduites.»
Un cahier des charges pas exigeant
Une autre question taraude les esprits : «Pourquoi a-t-on confié les travaux de confortement à une entreprise qui, même si elle dispose d'une qualification en bâtiment, est plus connue dans l'hydraulique», s'interroge un cadre en bâtiment. «Cette entreprise a déjà été écartée par la commission d'évaluation des offres techniques de la Direction de la culture, pour non qualification», charge Zahir Laâlaoui, entrepreneur de bâtiment. Nos tentatives d'ouvrir nos colonnes à l'entreprise Hydroforage systèmes Amzal ont été vaines, l'entreprise n'ayant pas souhaité s'exprimer.
En 2008, la Direction de la culture, maître de l'ouvrage, a lancé deux appels d'offres pour le confortement de l'ancien tribunal avant que ces derniers ne s'avèrent infructueux. Pourtant, le cahier des charges n'est pas exigeant d'autant plus que cet édifice chargé d'histoire n'est pas classé comme patrimoine à protéger. Pour les bâtiments protégés, la loi exige pour la sélection, un bureau d'étude disposant d'un architecte qualifié en «monuments et sites protégés». Le bâtiment n'étant pas classé, il est donc considéré comme vieux bâti. De fait, le cahier des charges est resté sommaire et n'énonce aucune exigence technique précise à la hauteur de la restauration de cet édifice. «La consultation a été élargie à toutes les entreprises suffisamment équipées et disposant d'un ingénieur en génie civile. Aucune entreprise n'a réalisé des travaux similaires», affirme une source proche du dossier sous couvert d'anonymat.
«Au troisième appel d'offres, j'ai soumissionné pour près de 68 millions de dinars. J'ai décroché le marché. Un avis d'attribution provisoire a été publié en juin 2009, dans la presse. Puis, on a trouvé que c'était trop cher. Le 21 décembre 2009, on m'a demandé de justifier les prix. On m'a sollicité pour un rabais. J'ai refusé. Il y a eu un avis d'annulation d'attribution du marché, publié le 2 mars 2010, pour des raisons de non qualification technique alors qu'on m'a reproché la cherté de l'offre», s'offusque M. Laâlaoui qui dit que «son entreprise dispose de la qualification 4 en bâtiment».
Une Loi laxiste
Le cahier des charges que la commission des marchés publics de la wilaya dit «être conforme à la loi», n'avait pas d'exigence particulière hormis celle obligeant l'entreprise de disposer d'un ingénieur. «Un manque de rigueur qui a ouvert la voix à l'échec», commente un cadre en bâtiment. A l'origine, la législation est très vague. Le décret du 26 octobre 2008 portant réglementation des marchés publics est sommaire. Le texte stipule que «la documentation relative à l'appel d'offres, doit contenir la description précise de l'objet des prestations demandées ou toutes exigences y compris les spécifications techniques, la certification de conformité et les normes auxquelles les services doivent satisfaire.»
Ce décret énonce également que «le soumissionnaire doit présenter tous les documents intéressant sa qualification dans le domaine concerné (certificat de qualification et de classification pour les marchés de travaux et l'agrément pour les marchés d'études), ainsi que les références professionnelles.»
Trop vague pour assurer des travaux de qualité surtout pour un joyau architectural historique. Les cahiers des charges des appels d'offres doivent être validés par la commission des marchés de la wilaya. Cette dernière est présidée par le secrétaire général de la wilaya. Nos tentatives de joindre le SG de la wilaya pour s'exprimer sur ce sujet ont été vaines.
Le secrétariat nous a orientés vers la chargée de communication de la wilaya. «Le rôle de la commission des marchés est limité à la vérification du respect de la réglementation et c'est ce qui a été fait, la réglementation a été respectée», a affirmé la chargée de la communication de la wilaya.
Droit à l'information bafoué
Si le maître de l'ouvrage, la direction de la culture, qui a engagé des fonds publics pour restaurer cet édifice, semble vouloir à tous prix «récupérer» ce bâtiment qu'on promet de «redevenir comme il était», cette administration ne semble néanmoins pas vouloir informer les citoyens sur cet effondrement. Le premier responsable de cette Direction s'est engagé à plusieurs reprises, durant trois semaines, à nous recevoir pour répondre à nos questions, mais nous attendons toujours d'accéder à ce droit d'être informés.
Aussi, nous avons rencontré à deux reprises, Rafik Mahindad, responsable du bureau d'étude en charge du projet de confortement de cet ancien tribunal afin qu'il s'exprime sur ce sujet. Il a souhaité répondre par écrit à nos questions. Nous attendons toujours ses réponses. Un architecte et un ingénieur en bâtiment de Béjaïa parlent, en tous cas, d'«échec puisque le siège de l'ancien tribunal s'est effondré». Pour ces derniers, «la Direction de la Culture aurait mieux fait de déclarer le troisième avis d'appel d'offre infructueux. Si aucune entreprise, ni aucun bureau d'étude algérien n'ont eu déjà à travailler dans un cas similaire, alors pourquoi ne pas faire appel à des étrangers spécialisés dans la restauration ?»


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