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«La procédure d'acquisition des implants est très bureaucratique»
Professeur Djamel Djennaoui. Président de la Commission nationale de l'implant cochléaire
Publié dans El Watan le 28 - 08 - 2012

- La greffe d'implants cochléaires a connu une réelle progression à son lancement, en 2007. Comment expliquez-vous son ralentissement aujourd'hui avec une liste d'attente qui s'allonge ?

La liste d'attente est effectivement en train de s'allonger. Les causes sont multiples, mais il faut, à mon avis, revenir sur la genèse et l'évolution du programme d'implantation cochléaire en Algérie. L'idée de créer le premier centre d'implant en Algérie est née dans le service d'ORL du CHU Mustapha. Elle est le résultat d'une longue réflexion qui a commencé à se concrétiser début 1999. C'est toujours l'équipe d'ORL du CHU Mustapha qui, au vu d'un rapport argumenté, a voulu sensibiliser, sans succès, les autorités pour qu'un processus validé dans le monde entier puisse enfin être introduit dans le pays. Avec plus de 70 000 sourds profonds et plus de 1000 nouveaux sourds par an, toutes causes confondues, les troubles graves de l'audition sont un souci important des pouvoirs publics. Devant le coût élevé du procédé, les différentes tutelles consultées ont fait preuve d'une fébrilité compréhensible pour le profane ; mais quand on sait que l'on peut transformer l'avenir de toute une vie, tout devient licite. C'est pour cela qu'en 2003, mon équipe a réalisé les deux premiers implants cochléaires dans le pays. Il s'agissait d'une initiative locale, appuyée par l'administration hospitalière de l'époque. Cette «première» a créé un élan sans précédent dans la spécialité, dans les médias et auprès du public. La surdité profonde n'était plus une fatalité en Algérie. Cela n'a pas suffi à la tutelle de l'époque pour valider ce procédé. C'est grâce au ministre de la Solidarité nationale, en 2004, que l'implant cochléaire a véritablement commencé à exister. Une convention est venue couronner la collaboration «CHU Mustapha-ministère de la Solidarité nationale» ; celle-ci portait sur l'achat de 20 à 40 implants cochléaires par an destinés aux sourds profonds adressés par les écoles pour handicapés auditifs dépendant du ministère de la Solidarité. C'est comme cela que près de 40 implants ont été posés entre 2004 et 2006 au service d'ORL du CHU Mustapha, qui restait le seul centre d'implant du pays. La demande a commencé à naître.

- Mais l'Etat a mis en place un programme national de lutte contre la surdité…

Effectivement. Fin 2006, suite aux différents rapports, à la pression des médias et des associations pour handicapés auditifs, le ministère de la Santé a décidé de faire de la lutte contre la surdité un des axes de sa politique ; l'implant cochléaire venait d'être validé et la lutte contre la surdité profonde ferait l'objet d'un programme national. Le ministre de la Santé m'avait alors demandé de concevoir un programme de lutte contre la surdité avec pour priorité la lutte contre la surdité profonde. Avec les services du ministère de la Santé, nous avons mis au point une véritable stratégie de prise en charge de la surdité en Algérie, étalée sur quatre ans, avec une introduction progressive de l'implantation cochléaire et des autres procédés. Sur le terrain, les choses ne se sont pas passées aussi bien. Pourtant, le ministre de la Santé avait installé une commission nationale de l'implanta cochléaire et m'avait désigné comme président, mais sans véritable mission ni prérogative. Le programme national de lutte contre la surdité qui devait régir ce comité a été mis en veilleuse. Ce programme, qui fixait des objectifs à court, moyen et long termes, n'a jamais vu le jour. Dans les faits, le seul progrès réside dans la validation de l'implant cochléaire comme moyen thérapeutique. La conséquence de la mise en veilleuse de ce programme est l'apparition de centres d'implants qui n'obéissent à aucune norme, avec des équipes insuffisamment ou non préparées. A l'heure actuelle, il n'existe pas de cahier des charges régissant cette activité. Ainsi, tout service d'ORL peut devenir un centre d'implant pourvu qu'il en fasse la demande. Par ailleurs, l'absence de coordination entre les différents centres et d'une véritable politique de prise en charge de la surdité profonde fait que les indications d'implantation cochléaire sont posées de manière telle qu'il n'y a ni priorité ni urgence. L'autre problème est celui de la disponibilité des implants ; l'intervalle séparant la demande de la réception des implants peut aller jusqu'à deux ans. Il faut savoir que plus le délai d'intervention est long, moins les résultats sont bons. D'autres raisons retardent la réalisation des programmes ; ce sont les plateaux techniques régulièrement défaillants (microscopes, tours chirurgicaux, consommables). La procédure d'acquisition des implants et des équipements obéit à un code des marchés très bureaucratique.

- Quelle évaluation faites-vous aujourd'hui du travail des centres d'implant ?

L'activité des centres d'implant est difficile à évaluer en raison de l'absence totale de coordination à l'échelle nationale. Chaque centre fonctionne de façon strictement autonome ; il n'y a aucune évaluation ni sur le plan des résultats ni sur le plan des incidents et accidents consécutifs à l'acte chirurgical. En outre, les équipes existantes sont saturées, en particulier les unités d'orthophonie, sachant qu'un implant nécessite une rééducation de 2 à 3 ans, un centre qui fait 50 implants par an va se retrouver en 3 ans avec 150 enfants en rééducation ; les normes étant d'une orthophoniste pour 10 à 15 enfants, donc au moins 10 orthophonistes sont nécessaires.
Ce qui est loin d'être le cas. Il faut des structures, des espaces, des équipements et du personnel qui font défaut dans la majorité des centres d'implant. La cause de cette situation réside, selon moi, dans l'absence d'un cahier des charges, de validation des centres, d'une politique cohérente et optimale de cette activité. Les services d'ORL peu nombreux souffrent d'un sous-équipement et d'un personnel médical et paramédical en nombre et en qualité insuffisants. Les services doivent également faire face à une demande sans cesse croissante de soins relevants de notre spécialité (tumeurs, traumatismes, infections…), car tous les services sont polyvalents et l'implant cochléaire ne représente qu'une partie de leurs activités.

- Combien d'enfants ont été implantés à ce jour et que deviennent-ils ?

Il est très difficile de donner un chiffre précis, les centres d'implant étant indépendants les uns des autres ; seul le ministère de la Santé peut donner un chiffre global, une sous-direction du ministère collige régulièrement l'ensemble des cas opérés dans les services. Le chiffre de 1200 à 1300 me paraît assez proche de la réalité, mais l'absence d'un fichier national et l'inefficacité du comité national empêchent toute évaluation précise. Quant au devenir des enfants implantés, nul ne peut le dire, les centres d'implant fonctionnent de manière indépendante et imperméable et seule une commission d'experts neutres pourrait évaluer le devenir des patients implantés ; ceci à travers leur intégration, l'acquisition du langage, la compréhension, la démutisation, etc.
Globalement, on considère que pour 5 implants bien posés et bien suivis, 3 donneront de bons résultats, les 2 autres des résultats médiocres ou nuls. La maintenance des dispositifs implantés n'est pas toujours bien assurée : des processeurs tombent en panne, des cordons se cassent, des antennes se perdent, des batteries se déchargent…
Ce sont autant de problèmes auxquels sont confrontés les enfants implantés et leurs parents. Aucune réglementation n'existe pour assurer la disponibilité et la distribution du consommable ; la continuité du fonctionnement d'un implant est impérative ; toute panne ne doit pas excéder quelques jours. Les autorités du ministère de la Santé ont été saisies à plusieurs reprises, mais aucune solution durable n'a été trouvée.

- Que préconisez-vous pour l'organisation de ces soins spécialisés ?

Il faut revoir complètement la distribution des centres d'implant ; 6 centres dans le centre du pays, c'est, à mon avis, excessif ; un centre à l'Est, un à l'Ouest et un au Sud, c'est nettement insuffisant.
Il faut imposer à tout centre d'implant un cahier des charges rigoureux dont seul le respect permettra la validation. Le nombre d'implants attribués à chaque centre doit obéir à une logique très simple : les possibilités en personnel, en prise en charge et en suivi. Il doit être déterminé au préalable par l'administration centrale sur rapport objectif des experts.
L'activité d'implantation cochléaire doit s'intégrer dans un programme global de prise en charge de la surdité ; c'est-à-dire qu'il faut créer un environnement médical propice au dépistage, au diagnostic précoce, au suivi, à la prise en charge, à la surveillance et à l'intégration de tout enfant sourd ou malentendant traité.
Tout cela passe par la création du comité national de l'implant cochléaire qui, à mon avis, devrait s'appeler plutôt comité national de lutte contre la surdité avec à sa tête un président qui aurait pour charge de mettre en place toutes les conditions pour l'application d'un vrai programme de lutte contre la surdité. Il faudrait que l'administration définisse les missions de ce comité et de son président, ce n'est qu'à ce prix que les choses s'amélioreront, pour le plus grand bien de la population.


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