Ligne ferroviaire Alger-Tamanrasset: déclaration d'utilité publique de la réalisation de deux tronçons    Chute d'un bus dans Oued El Harrach: le président de la République reçoit les condoléances de son homologue tunisien    CHAN-2024: la sélection algérienne à pied d'œuvre à Nairobi    Les ministres des AE de pays arabes et musulmans condamnent les déclarations du chef du gouvernement d'occupation sioniste    Rencontre Trump-Poutine : l'ONU salue le "dialogue constructif continu entre les Etats membres"    Tlemcen: efforts soutenus pour améliorer l'approvisionnement en eau potable et rationaliser sa consommation    Chute d'un bus dans l'Oued El Harrach: Saihi au chevet des blessés    Sur instruction du président de la République, tous les bus de transport de voyageurs vétustes retirés du parc national    Chute d'un bus dans l'Oued El Harrach : le président du Parlement arabe adresse ses condoléances à l'Algérie    Chute d'un bus dans l'Oued El Harrach: Sayoud appelle les conducteurs à faire preuve de responsabilité    Sommet Poutine – Trump en Alaska    Les vaines tentatives de l'oligarchie d'étouffer l'affaire Epstein    Quelle est la situation de la coopération Algérie/Italie ?    Ligue 1 Mobilis : l'USM Alger bat le MB Rouissat à Tabarka    Victoire de l'Algérie devant le Qatar    L'Algérie surclasse le Zimbabwe    LG Algérie dévoile une nouvelle génération de réfrigérateurs alliant performance, design et technologies de pointe    Intensification des opérations de maintenance des réseaux d'électricité durant l'été    «Le Point» confirme    Intensification des opérations de contrôle pour assurer la stabilité du marché    Deux jeunes meurent noyés dans un étang d'eau à Hmadna    Les entrepreneurs défaillants mis en garde    L'exposition égyptienne bat un record mondial    Tomber de rideau à Guelma sur la 13ème édition    Semaines culturelles de Timimoun dans des wilayas du Nord    Chute d'un bus de transport de voyageurs dans l'Oued El Harrach: le plan d'urgence a été efficacement exécuté    Chute d'un bus dans l'Oued El Harrach: le président de l'APN présente ses condoléances    Economie de l'eau : plus de 5.000 enfants sensibilisés dans les colonies de vacances    Foot: clôture du Séminaire des arbitres d'élite à Oran    Handball / Mondial masculin U19 : l'Algérie bat l'Uruguay (32-27) et termine à la 27e place    Décès du réalisateur Nourredine Benamar    Le président du HCI tient au Caire des discussions avec le SG de la Commission internationale des Miracles scientifiques dans le Coran et la Sunna    Guelma : tomber de rideau sur le 13ème Festival culturel national de musique actuelle    L'UIPA souligne l'importance du rôle des jeunes    Trois suspects placés en détention préventive    Grogne des partis politiques et des représentants de la société civile    La Fifa organise un séminaire à Alger    Khaled Ouennouf intègre le bureau exécutif    L'Algérie et la Somalie demandent la tenue d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité    30 martyrs dans une série de frappes à Shuja'iyya    Lancement imminent d'une plate-forme antifraude    Les grandes ambitions de Sonelgaz    La force et la détermination de l'armée    Tebboune présente ses condoléances    Lutte acharnée contre les narcotrafiquants    La Coquette se refait une beauté    Cheikh Aheddad ou l'insurrection jusqu'à la mort    Un historique qui avait l'Algérie au cœur    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Cette «école française» de la guerre contre-révolutionnaire
Malika Rahal. Historienne du temps présent
Publié dans El Watan le 09 - 12 - 2013

Sollicitée par nos soins pour décrypter le «cas» Aussaresses, Malika Rahal, historienne, chargée de recherche à l'Institut d'histoire du temps présent (CNRS), mettra, avant tout, en exergue la complexité du personnage.
«La figure du général Aussaresses, témoin rare de l'usage de la torture et des méthodes contre-insurrectionnelles durant la guerre d'indépendance, me semble finalement assez complexe. D'une part du fait de la personnalité de l'homme : il existait chez lui une dimension bravache et ‘‘plastronneuse'' (…) qui jette une ombre de suspicion sur son témoignage. Compte tenu des relations entre les officiers parachutistes, et notamment entre Paul Aussaresses et Jacques Massu, il n'est pas entièrement à exclure, à mon sens, qu'Aussaresses ait endossé des responsabilités et des actes revenant à d'autres. (…) Mais sur le fond, cette répartition des responsabilités ne change rien, et l'éventuel “serment de silence” entre eux ne recouvre désormais que les cas individuels – même s'ils sont parfois infiniment douloureux», analyse-t-elle. L'auteur de Ali Boumendjel. Une affaire française, une histoire algérienne (Barzakh, 2011) dissèque avec précision le dispositif politico-militaire qui a engendré la machine répressive incarnée par Aussaresses : «Ses mémoires confirment de l'intérieur le mécanisme de la répression — notamment durant la «Bataille d'Alger» tels qu'ils ont été décrits par les historiennes Sylvie Thénault et Raphaëlle Branche.
Et le tableau est accablant : l'armée joue le rôle qu'on lui demande de jouer dans les guerres contre-révolutionnaires, elle agit en contravention de tous les principes démocratiques de fonctionnement de la justice et de contrôle du pouvoir civil sur le pouvoir militaire», observe l'historienne, avant d'ajouter : «Et l'on en sait beaucoup plus grâce à lui sur l'existence et le fonctionnement de ce qu'on a appelé un ‘‘escadron de la mort'', la façon dont les parachutistes liquidaient leurs détenus par dizaines». Malika Rahal revient ensuite sur le deuxième acte de la vie d'Aussaresses : son récit. Le tortionnaire se met à écrire et se fait l'apologiste de ses propres crimes. Et cela fait désordre.
Perversité du tortionnaire
Elle rappelle comment la publication des Mémoires d'Aussaresses lui ont valu une condamnation alors qu'il jouissait de l'impunité la plus totale, «du fait des lois d'amnistie», pour les atrocités qu'il avait commises. «Il est donc — faute de mieux — poursuivi pour avoir parlé. Il y a à cela un effet pervers», relève la chercheuse du CNRS. Pour la petite histoire, Malika Rahal avait tenté d'interviewer Aussaresses. Voilà comment cela s'est terminé : «Je travaillais lors de son procès sur la biographie de l'une de ses victimes, l'avocat du FLN Ali Boumendjel. Une fois la condamnation d'Aussaresses confirmée en appel, il a définitivement refusé de me parler. Peut-être le procès aura-t-il servi de leçon à d'autres qui auraient pu vouloir parler, les encourageants plus encore au silence ?» Le récit d'Aussaresses, souligne l'historienne, renvoie forcément au débat sur la torture «initié par l'intervention de Louisette Ighilahriz, animé par les journalistes du Monde et de L'Humanité, qui secoue la société française profondément».
Elle précise que «cette fois, les révélations étaient nombreuses et installaient durablement le thème : le rôle de pédagogue des méthodes contre-insurrectionnelles à Fort Bragg (plus grande base d'entraînement pour les forces commandos au monde, située en Caroline du Nord, ndlr) joué par le général Aussaresses révélait qu'il existait une ‘‘école française'', avec des ramifications jusque dans les régimes dictatoriaux d'Amérique latine».Malika Rahal insiste sur le fait que le personnage, si exubérant soit-il, ne doit pas occulter la responsabilité du pouvoir politique qui a couvert ses crimes : «L'image du parachutiste retors et sans principes qu'il véhiculait, comme celle du fort-en-gueule construite par le général Bigeard, ne doivent pas faire oublier que la guerre contre-révolutionnaire est initiée par le pouvoir politique. Et que les scandales se multiplient en 1957 à mesure que les parachutistes du général Massu s'en prennent à des figures identifiables depuis la France : Larbi Ben M'hidi, dont Aussaresses raconte l'assassinat, était considéré comme un chef militaire en février 1957, et le scandale autour de sa mort est en France de faible ampleur ; mais Ali Boumendjel, autre victime nommée par Aussaresses, est un avocat, un homme politique qui compte à Paris assez d'amis pour que son ‘‘suicide'' par les parachutistes fasse scandale en mars et avril. (…)
La cible de la répression menée par l'armée française s'élargit désormais à l'ensemble de la population civile ; les intellectuels et autres figures publiques ne sont plus à l'abri (…)» L'historienne estime que «la disparition progressive des acteurs (à peu d'écart les généraux Massu, Bigeard et Aussaresses) ouvre d'autres perspectives : elle ouvre le temps d'une histoire sans doute un peu différente, moins focalisée sur des figures, sur des histoires particulières, et où l'on pourra contempler plus aisément une vision d'ensemble. Un temps aussi où il faudra bien admettre que certaines informations sont perdues ; que l'on ne saura jamais tout (…)». Malika Rahal termine sur une pointe d'émotion : «Comme historienne, plutôt qu'au général Aussaresses, je pense ce jour aux personnages ‘‘rencontrés'' dans mon travail : Larbi Ben M'hidi et Ali Boumendjel. Et aux vivants qui ont témoigné ou témoignent encore, et que la nouvelle de la mort du tortionnaire ne laisse pas indifférents. Et parce que j'ai beaucoup travaillé avec elle pour la biographie de son mari, c'est Malika Boumendjel qui occupe mes pensées, Malika avec son désir de vérité et de justice, que cette nouvelle secoue certainement.»


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.