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«Le harcèlement est basé sur le principe selon lequel l'homme a le pouvoir»
Dalila Djerbal. Sociologue et membre du réseau Wassila / Avife
Publié dans El Watan le 26 - 01 - 2017

- Le harcèlement des femmes dans l'espace public est-il un phénomène nouveau dans la société algérienne ?
Le harcèlement n'est pas une gentille manière de «draguer» ou de «courtiser». Imposer à une personne des attitudes ou des propos à visée sexuelle répétés, qui la dérangent, portent atteinte à sa dignité et la mettent dans une situation d'insécurité est absolument insupportable. Le harcèlement a existé, mais il s'est diffusé par contre et a augmenté d'intensité avec le nombre de femmes occupant les espaces sociaux dans leurs nouvelles activités : dans la rue, bien sûr, l'école, l'université, le travail.
Nous pensions dans les années 1980 que l'émancipation des femmes passerait par le partage de l'espace, de l'école et de l'emploi et que les citoyens prendraient au fur et à mesure l'habitude de côtoyer pacifiquement les citoyennes, mais c'est le contraire qui s'est produit. L'attitude extrême de ce phénomène aujourd'hui est dans le cas d'enlèvements de jeunes adolescentes et de jeunes femmes qui sont violées et jetées sur le bas-côté de la route.
- Quelles sont ses causes profondes ?
Le harcèlement est basé sur le principe selon lequel l'homme a le pouvoir d'obtenir de sa victime ce qu'il veut parce qu'il est supérieur en droit et en statut. Il est dans un rapport de force que la société lui donne depuis toujours. La famille lui dit qu'il doit surveiller ses sœurs, que sa femme est à son service, la loi lui dit qu'il a deux parts d'héritage mais que sa sœur n'en a qu'une seule, même s'il n'a jamais travaillé.
A travers les médias et les prêches, l'idéologie de l'islamisme totalitaire a profondément enraciné ces principes dans l'esprit des jeunes générations, pendant les 30 dernières années. Les viols de femmes et leur réduction en esclavage durant les années du terrorisme ont été la preuve qu'il était légitime de les réduire à un statut infra-humain.
Cette idéologie, contrairement à l'idée d'émancipation et de justice sociale des années 1970, est fondée sur l'infériorisation des femmes et les discriminations, sous couvert de «différences dans les tâches» entre femmes et hommes, ou de protection de la «famille». Beaucoup de femmes ont cru que cette idéologie allait les protéger dans l'espace public ou même dans la famille. Mais elles ont vite constaté que toutes les femmes, quels que soient l'habit ou l'âge, ou la fonction sociale, sont victimes de violence et de harcèlement.
- Y a-t-il des statistiques ou des études (algériennes) qui se sont étalées sur ce sujet ?
Je ne connais pas de recherche académique sur le sujet, mais une étude est absolument nécessaire pour comprendre le phénomène et y apporter des solutions. Néanmoins, il suffit de demander aux jeunes lycéennes, aux étudiantes, aux jeunes femmes en recherche d'emploi, ce qu'elles vivent ou ont vécu. Des pages facebook, comme Sawt Nssa, relatent des expériences terribles. Au Réseau Wassila, les appels de femmes jeunes ou moins jeunes, des femmes de ménage, des employées, des médecins et cadres, nous renseignent malheureusement que le risque est permanent et surtout présent partout.
Bien sûr, ceux qui ne veulent pas voir ne le verront pas, mais écouter un tant soit peu les femmes dira l'étendue du problème. Ce qui est par contre très positif, c'est que des jeunes hommes participent aujourd'hui à la dénonciation de ces violences contre les femmes, et ça c'est une victoire, parce qu'on ne peut avancer vers une société pacifiée que tous ensemble !
- «Statistiques recueillies dans une enquête aux USA auprès de femmes sifflées dans la rue par des hommes : 67% pensent que le phénomène va s'intensifier. 5% sont en colère, 78% sont ennuyées, 80% se sentent nerveuses, et 72% sont dégoûtées. Si ces chiffres sont aussi élevés en Occident, pour celles qui sont sifflées dans la rue, comment pensez-vous que les femmes se sentent ici dans une situation de harcèlement ?» Porter plainte contre les harceleurs, résoudra-t-il le problème ?
On peut se poser la question : est-ce que porter plainte en cas de cambriolage résoudra le problème des vols ? La loi dit ce qui est un délit ou un crime. Elle énonce clairement par ses jugements et la sanction que la société n'accepte pas qu'il soit porté atteinte à la sécurité et la dignité des citoyennes, qu'elles soient en danger dans la rue, à l'école ou au travail.
La loi a aussi un effet de dissuasion. Là est son rôle. Si les harceleurs constatent, ainsi que tous les citoyens, que la loi est effectivement appliquée, qu'il y a sanction contre les contrevenants, cela diffusera l'idée que harceler une femme n'est pas acceptable, et les victimes seront plus nombreuses à porter plainte, et sans doute verra-t-on ces pratiques, dénoncées par tous, diminuer.
- Comment peut-on lutter contre ce phénomène ?
Il y a plusieurs niveaux de réponses. D'abord la loi ne vaut que par son application. Nous suivons attentivement et sommes vigilantes en ce qui concerne l'application des amendements au code pénal de 2015 sur les violences faites aux femmes, mais la loi de 2004, sur le harcèlement au travail, par exemple, à l'expérience, a montré ses insuffisances.
La loi exige des preuves matérielles, alors que l'on sait que le harcèlement se fait sans témoins. D'ailleurs, le choix de nombreux juges du huis clos participe de fait à protéger le harceleur. La publicité des audiences participeraient, au contraire, à dissuader les agresseurs. Qu'on ne prétexte surtout pas que c'est pour protéger la victime, car elles sont déjà atteintes !
Combien de femmes ont été déboutées par la justice, pour «insuffisances de preuves» et se retrouvent accusées de diffamation ! Les victimes se retrouvent accusées ! Depuis 2004, nous avons constaté que la faille résidait dans la non-protection des témoins. Les collègues témoins ont peur des représailles et surtout de perdre leur travail, ce qui est humain, mais le résultat est efficace puisqu'ils sont ainsi empêchés de parler.
Un exemple éclairant est celui des journalistes de TV4 qui ont intenté un procès contre leur directeur il y a quelques années. Les collègues, qui ont osé témoigner, ont été mis au placard, ils n'ont pas retrouvé leurs responsabilités. Le directeur harceleur a été effectivement sanctionné, mais les journalistes qui ont osé le dénoncer n'ont jamais pu retrouver leur poste. C'est la double peine : elles ont été harcelées mais demander justice est un «délit» dans la «loi interne de l'entreprise».
Pourquoi les victimes ne déposent-elles pas toujours plainte ? La famille n'est pas toujours informée de ces agressions car le «droit» de sortie ou de travail peut être remis en question, et la victime craint de ne plus pouvoir étudier ou travailler. Elle veut ménager ses parents ou ses enfants, ou bien la famille la dissuade d'aller en justice de crainte du «scandale», scandale qui touche plus la victime que le criminel !
Le parcours en justice est long, coûteux, stressant et aléatoire. Les représailles se font aussitôt sentir : menaces, diffusion de rumeurs sur la «moralité» de la victime, ce qui est le moyen premier et le plus efficace pour la réduire au silence.
Nous avons accompagné en justice des femmes déterminées, qui ont osé, mais la pression a été terrible. Pour W., l'employeur a usé de menaces. Dans celui de R., alors que tous les avocats présents à l'audience étaient persuadés que l'agresseur serait condamné, le matin même, avant même le prononcé du jugement, nous étions informées que ses appuis faisaient déjà la fête. Il a été relaxé. Et les institutions à qui nous avions signalé des cas n'ont jamais daigné répondre !
Les gens ne réagissent pas toujours quand ils sont témoins de violences parce qu'ils ont peur parfois, la violence étant généralisée. Il arrive que certains appellent les autorités mais, effectivement, certaines réactions sont déroutantes. On ne dénonce pas l'agresseur mais on pose des questions, telles que : «Qu'est-ce qu'elle faisait là ? C'est peut-être son frère, son petit ami…», mais le plus grave c'est que ces réactions sont aussi parfois celles des agents chargés de faire respecter l'ordre.
On ne pourra obtenir une diminution de ces violences qu'en dénonçant toujours et toujours les agressions et en demandant justice, qu'en exigeant l'égalité en droits et dignité des femmes et des hommes, dans toutes les situations. Les propos sexistes, discriminatoires, machistes acceptés trop facilement dans les discours, dans les médias, dans les tv doivent être dénoncés et condamnés par la loi.
Les amendements au code pénal sur les violences faites aux femmes doivent être améliorés, les dispositions doivent être reprécisées, le «pardon» de la victime supprimé. L'application de la loi est vitale et, surtout, les institutions doivent rendre des comptes sur leurs propres pratiques quant à la manière dont elles traitent les plaintes pour discriminations et violences faites aux femmes. Il y va de la sécurité et de la dignité de chaque citoyenne et citoyen.


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