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Notre justice
Publié dans El Watan le 02 - 07 - 2004

Quand il s'agit de condamner, premier pas pour avilir la noblesse de notre humanité d'Algériens, on est plus clair et éblouissant que l'éclair dans les nuits sans lune. Par contre quand il s'agit de rendre justice à quelqu'un pour un affront que nous lui avons fait subir, le jour du jugement dernier lui est plus proche que notre mot d'excuse.
Notre justice
Quand il s'agit de condamner, premier pas pour avilir la noblesse de notre humanité d'Algériens, on est plus clair et éblouissant que l'éclair dans les nuits sans lune. Par contre quand il s'agit de rendre justice à quelqu'un pour un affront que nous lui avons fait subir, le jour du jugement dernier lui est plus proche que notre mot d'excuse.
Du reste cela fait partie de la mentalité gourde d'une certaine catégorie d'Algériens aux postes clefs de notre apprentie République. Cette mentalité, nous le savons désormais, avait produit plus d'une décennie de violence gratuite et de destruction aveugle, où le citoyen désespéré de la justice de son pays s'est érigé en juge et en bourreau pour défendre ce qui lui est resté de sa dignité et de son honneur. Une violence cruelle et destructrice donc qui s'est alimentée de l'agressivité accumulée au fil des années, des décennies, des siècles. Laquelle agressivité à son tour s'est alimentée du kérosène de nos infinies frustrations dont les hommes et le destin nous ont fait cadeau. Pourtant, en moins de 40 ans, nous avons changé bien 8 présidents et chefs d'Etat ! Et dire que nous avons changé ! Pourtant... Les chiens rondelets et pleins de graisse, nos frères et voisins, nous envient tant pour notre liberté d'aboyer ! C'est ainsi que ces frères et voisins, en liberté, pérennement surveillée qualifiaient, jusqu'à hier, notre liberté de parole acquise dans la douleur, bénite par le feu de notre rage de vivre notre humanité, arrosée par le sang de nos cœurs et les larmes de nos yeux... durant des jours et des nuits que les tout récents siècles continuaient d'enfanter (1830, 1871, 1945, 1954, 1988). Mais « les vents courent toujours avec ce dont ne plaît pas au marin », voilà que quelqu'un vient nous signifier avec un noir comme la menace des ténèbres de l'injustice, comme les ténèbres de la solitude dans une cellule perdue dans les dédales d'un édifice à la Serkadji, et à Lambaise..., voilà que ce quelqu'un nous vient à signifier que le bol d'air pour aboyer est terminé et qu'il est besoin d'étouffer nos cris, tous nos cris, fussent-ils de douleur ou de vérité. Ça a commencé avec l'état d'urgence, puis ce sont les harcèlements de la presse, ensuite l'emprisonnement... ! Qui sait enfin si on n'arrive pas tout simplement à la liquidation physique de toute personne qui soit exempte de la maladie de la peur ou de celle du culte pour n'importe quel magnat autoproclamé de n'importe quel pouvoir ? La condamnation des journalistes Ghoul et Benchicou est une grave atteinte à la liberté de la presse. Elle démontre que notre régime, auquel nous avons cru jusqu'à présent, n'a rien de différent par rapport à la pourriture des autres régimes dont sont en train de pâtir nos pauvres envieux frères et voisins. Régimes où l'on prêche avec une gaîté d'imbécile servilité et larbinisme. Quant à la noblesse de la connaissance, du savoir, de l'intelligence, du cerveau... quant à la poétique de la liberté, de la justice, du courage, de la dignité... elles peuvent bien crever et disparaître dans le néant des ténèbres des nuits sans lune ! Cette noblesse et cette poétique ne sont que de simples impressions éteintes, ce qui reste d'un éclair éblouissant le ciel malgré son immensité. Je ne sais pas si nous devons résister à l'empire de tous les maux ou à la médiocrité lâche et insidieuse de ceux qui se sont érigés en (nos) potentats locaux, en maîtres de nos choix et de nos destinées. Hommes et femmes libres, et nous sommes libres par essence, condamnons vivement ce jugement qui est une grave atteinte, non seulement à la liberté d'expression, mais surtout à l'humanité du citoyen dans notre pays. Quand la justice est bafouée, c'est l'existence même qui se trouve en sursis, pour paraphraser Chawki (El Watan). Exigeons donc la libération de nos journalistes : on ne touche pas impunément au système nerveux de la nation. Que deviennent nos jambes si elles sont privées du système nerveux central, qui ne soutiennent plus l'échine de notre pays ? ou nos bras qui ne servent plus à rien, ou nos yeux qui ne voient plus - même pas les ténèbres - ou nos oreilles qui ne jouissent plus d'aucune musique et d'aucun chant ? L'intellectuel en prison, c'est la nation toute entière qui est dans le coma ou en danger de mort. L'intellectuel en prison, c'est la nation qui n'a plus de défense pour paraphraser encore une autre fois le lucide et sympathique Chawki. En sauvant nos journalistes, en leur restituant la liberté, c'est nous-mêmes qu'on sauve. Personne ne peut avoir un mérite spécial. Aurait-on quelque mérite à nous tenir à un brin d'herbe quand le torrent nous emporte ? Un monsieur qui écrit dans l'un de nos quotidiens s'excusait presque d'avoir usé, par comparaison à Benchicou, les noms de Voltaire et Sartre. Il s'excusait presque d'avoir usé par comparaison (implicite, celle-ci) les noms de de Gaulles et de Bouteflika. Personnellement, je trouve assez humiliante, une attitude pareille : ce qui fait l'homme, ce n'est pas tant son érudition - un gamin non stupide de notre époque connaît plus sur certains phénomènes qu'un Aristote ou un Voltaire des temps passés -, mais c'est bel et bien sa sensibilité et le courage de dire au monde (humble ou arrogant) qui l'entoure ses quatre vérités. Voila la forge où se confectionne l'homme : la lucidité de voir et le courage de dire. Notre Algérie, malade - mais point prodigue - de son faible pour les potentats petits ou grands, cherche à les épargner des piqûres de la critique. Notre Algérie oublie, ou fait mine que ces potentats ne sont rien d'autre que des mortels sujets à la faiblesse et à l'erreur même s'ils sont érigés en juges et en bourreaux, même s'ils aspirent à l'empire. Avec son ouvrage courageux - un acte de courage qui n'a peut-être pas eu de précédent dans les annales de l'Algérie que le fameux geste de Louisa Hannoun de fouler aux pieds le portrait de Chadli - M. Benchicou nous enseigne en ce temps, le nôtre, mieux encore que Voltaire, comment on abat les idoles qui encombrent encore comme des parasites la conscience des citoyens algériens. Indiquez-moi, chers citoyens, un livre critiquant un chef d'Etat dans le monde arabe et qui soit du courage de Benchicou. Sincèrement, je n'y vois rien : en général nos frères et voisins attendent la mort du potentat, la chute du régime ou la protection de l'exil pour pouvoir oser ! Nos frères et nos voisins nous citent avec envie désormais. Une envie qui a du mal à cacher son admiration pour notre chemin de la liberté, celui que nous sommes en train de tracer. Ils continuent, quant à eux, à vivre sous le joug des gouvernants séniles et désuets qui règnent en véritables pachas, sans partage, où les forces politiques d'opposition, comme dans tous les autres pays arabes, semblent absentes du terrain, marginalisées et sans relâche réprimées. Manquant certes moins d'érudition que de courage, les intellectuels chez nos voisins et frères regardent avec une complicité fataliste et impuissante à la propension de leurs dirigeants à se faire entourer par leur progéniture pour leur succession ! Horreur ! En disant non à la condamnation de Benchicou et de Ghoul, c'est cet état de médiocrité et de lâcheté extrêmes que nous cherchons à nous épargner. N'en a-t-on pas marre encore d'être tournés en dérision par les nations démocratiques ? Allons ! Nous ne sommes pas ces brebis qui paissent n'importe quoi jusqu'à du papier pourri, sans jamais crier au monde qui les opprime leurs souffrances, sans jamais leur cracher au visage leur puanteur de colère dense et rouge ! Benchicou certes n'est pas Voltaire, et il cessera d'être de la même lignée de Voltaire ou d'El Halladj, le jour où il acceptera de porter la toison de l'un ou de l'autre. Allons, citoyens algériens, continuons notre marche sur le beau chemin de la liberté, que seuls les hommes courageux et les femmes courageuses savent nous indiquer honnêtement et généreusement. Brisons ces chaînes qui nous accablent de vraie médiocrité et de fausses terreurs. Joignons notre voix à ceux qui ont appris ce que le mot « liberté » veut dire. Benchicou, pour nous avoir ouvert une voie nouvelle, mérite un honneur spécial. On ne peut empêcher la liberté à quelqu'un qui veut en faire don à son pays surtout. On ne peut taper les narines à celui qui nous offre un bouquet de fleurs ou un flacon de parfum. Cher Benchicou, cher Ghoul, je vous admire tant pour votre courage. Vous n'êtes pas seuls dans votre combat. Quant au courage, vous êtes les mieux placés pour en parler. De ce pays lointain où je vis comme un exilé, de ce pays où je vois mes rêves exténués et las, vous êtes une grande consolation pour moi. Aujourd'hui, je peux dire, moi aussi, que chez nous je peux crier avec une immense fierté, non seulement Voltaire ou Gramsci peuvent exister, mais qu'à l'Olympe où ces grands esprits se trouvent, l'Algérie a un représentant parmi tant d'autres : Benchicou. Je me joins à vous comme une voix solitaire certes mais non moins solidaire et reconnaissante, malgré le cauchemar que vivent nos deux chers journalistes, pour enfin dire mon admiration pour le courage qui commence à secouer notre torpeur intellectuelle et à fouetter notre médiocrité et notre lâche fatalisme. Je joins ma voix à tous ceux qui en ces jours se mobilisent pour tirer la sonnette d'alarme sur les dérives de notre justice qui a tendance à n'écouter que la musique brutale des bottes. Je joins ma voix à vous, défenseurs de notre jeune liberté, qui que vous soyez et où que vous soyez, pour dénoncer l'arbitraire d'une justice désorientée par des intérêts individualistes et victime d'une certaine pratique despotique de la chose publique. Notre intimidation (il s'agit bien de notre intimidation), à travers les personnes de Benchicou et Ghoul, est l'une des plus grandes insultes à notre dignité d'hommes et de citoyens. Enfin il faut apprendre à arracher les voiles sur les vrais scandales, « ouyoub » qui sont l'arrogance et la médiocrité, au lieu d'apprendre à couvrir les statues (idoles) nues qui peuvent heurter la pudeur et la sensibilité de nos « ô combien saintes et innocentes ! » familles.


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