Le 18 avril 2001, un jeune garçon de 18 ans est criblé de balles à l'intérieur de la brigade de gendarmerie de Beni Douala. C'est le début d'une grave crise qui se soldera par la mort de plus de 120 personnes et la blessure de milliers d'autres. Toute la Kabylie a sombré dans des violences inimaginables. Dans les villages, on s'organise comme on peut. Le mouvement des archs marque sa naissance par une grandiose manifestation publique le 14 juin 2001 à Alger, où plus de 3 millions de personnes ont manifesté, demandant la satisfaction de la fameuse plateforme d'El Kseur. Six années plus tard, que reste-t-il de ce mouvement que certains ont diabolisé dès le départ et alors que d'autres, hommes politiques, intellectuels, journalistes, le voyaient comme une alternative à la faillite des partis politiques ? Multipliant les divisions, les erreurs stratégiques et minés par les ambitions démesurées de certains de leurs animateurs, les archs sont devenus l'ombre d'eux-mêmes. Aujourd'hui, à l'approche des élections législatives, le mouvement connaît de nouvelles divisions. Deux clans s'affrontent de nouveau, oubliant les morts, les blessés, la plateforme d'El Kseur. Seuls comptent aujourd'hui l'ambition personnelle, les intérêts « acquis » depuis 2001 et les privilèges des uns et des autres. On ne parle plus des gendarmes qui ne seront sans doute jamais jugés, ni de ces centaines de jeunes handicapés à vie. Course électorale Des délégués qui ont juré, il y a des années, à travers un code d'honneur, de ne jamais postuler à des mandats électoraux, se lancent dans la bataille pour les législatives. Un groupe d'animateurs dénonce ceux qui postulent aujourd'hui à la députation, se cachant derrière des textes maintes fois piétinés. Les autres, comme d'habitude, trouvent les explications nécessaires pour dire que la course électorale cette année n'est pas en contradiction avec les fondements du mouvement, alors qu'en 2002 et en 2004, ils avaient vilipendé ceux qui avaient osé suivre la ligne de leur parti et participer aux élections. Les archs de 2007 ne sont plus ceux de 2001. Après avoir longtemps joué l'opposition et l'affrontement avec le pouvoir et ceux qui osaient critiquer leurs positions, les délégués se sont rapprochés du pouvoir à la faveur d'un dialogue qui a duré une éternité sans résultat concret, si ce n'est quelques acquis matériels, sans réel rapport avec l'esprit de la plateforme d'El Kseur. Alors aujourd'hui, faut-il encore parler du mouvement citoyen, des archs comme une force agissante en Kabylie ? Assurément pas ! La société, laminée par des années de crise, lassée de toujours faire des sacrifices pour que des individus construisent leur carrière, ébranlée par les effets conjugués de la délinquance, de la criminalité, du chômage et des horizons bouchés, a tourné le dos aux délégués qui ont toujours parlé en son nom. Quelques délégués seront peut-être députés après le 17 mai prochain, d'autres continueront à faire des déclarations pour rappeler à l'opinion qu'ils sont toujours là, alors que le simple citoyen continuera à subir l'injustice et le diktat de délinquants, de voyous et de criminels de tous bords. Les morts et les blessés du printemps noir ne seront qu'un souvenir. La plateforme d'El Kseur restera un ensemble de revendications jamais satisfaites.