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Jean-Pierre Tuquoi : « La situation n'est pas bloquée »
Publié dans El Watan le 26 - 11 - 2007

Journaliste au Monde, spécialiste du Maghreb, Jean-Pierre Tuquoi vient de publier Paris-Alger, couple infernal, aux éditions Grasset. Il est aussi l'auteur de Notre ami Ben Ali co-écrit avec un autre journaliste Nicolas Beau (La Découverte, 1999) ; Le dernier roi, crépuscule d'une dynastie (Grasset, 2001) ; Majesté, je dois beaucoup à votre père…, France-Maroc, une affaire de famille (Albin Michel, 2006).
Un couple infernal ? Un couple qui ne parvient pas à établir une relation sereine, mais qui n'arrive pas à se quitter ?
Dieu merci qu'il n'arrive pas à se quitter, ne serait-ce qu'à cause de l'histoire et de la géographie. L'Algérie a été occupée par la France pendant plus de 130 ans, d'une part, et l'Algérie est la seule colonie française où il y a eu une colonisation de peuplement, une intégration poussée faisant de l'Algérie trois départements français, d'autre part. On ne retrouve cela nulle part ailleurs. Il y a bien une spécificité des rapports franco-algériens qui continue à peser sur les relations entre les deux pays.
Comment expliquez-vous que la loi du 23 février 2005 ait eu plus de réactions en Algérie et dans la communauté algérienne en France que dans n'importe quelle autre ex-colonie ?
Il y a une conscience politique en Algérie qui n'existe pas dans les autres anciennes colonies françaises. Le nationalisme algérien, qui est fort, est sans commune mesure avec ce qu'on peut trouver dans les pays voisins. A cause de l'histoire, en particulier. Si on compare la situation en Algérie avec ce qui peut se passer en Afrique noire, le fossé est encore plus important. Les pays africains sont confrontés à de tels problèmes que pour l'instant ils ne sont pas arrivés à un niveau de conscience politique tel que le sujet de la colonisation soit un sujet d'actualité pour eux. Ils ont d'autres problèmes à résoudre, des problèmes économiques, politiques. Mais je pense que cela va venir, et que la France va être confrontée durablement à ces problèmes de colonisation et de regard porté sur la période coloniale. Des pays comme le Congo, le Gabon, le Sénégal vont y venir et vont demander des comptes à l'ancienne puissance coloniale. La France devrait prendre les devants et essayer de traiter le problème à froid.
Vous écrivez que le président Bouteflika était au courant de la loi du 23 février 2005 et qu'il s'en est servi à des fins de politique intérieure. Voulez-vous être plus explicite ?
Je sais que Bouteflika savait très bien, l'enquête l'a montrée, que cette loi avait été votée en février et s'il a attendu plusieurs mois avant de réagir, c'est par opportunisme politique, parce que lui-même, en Algérie, était confronté à la question du référendum sur la réconciliation nationale. Paradoxalement, la loi française du 23 février 2005 a favorisé ses propres desseins politiques et cela lui a servi de dérivatif, en particulier vis-à-vis des cadres du FLN. En dérivant leur attention sur la loi du 23 février, cela lui a permis de faire en sorte qu'il n'y ait pas de débat en Algérie sur le thème de la réconciliation nationale. Cela n'empêche pas que le président Bouteflika, de par sa culture politique, soit très sensible à la question de la colonisation et de la guerre d'Algérie. L'un n'empêche pas l'autre. Il a dû se poser des questions sur Jacques Chirac. Jacques Chirac qui, d'un côté, apparaît comme étant un partisan du traité d'amitié et qui, d'un autre, laisse voter cette loi qui est insupportable aux yeux de la classe politique algérienne.
Jacques Chirac a fini par réagir à la loi...
Jacques Chirac a réagi tardivement, cela s'explique aussi par sa propre culture politique. Lorsqu'il était en campagne électorale, Jacques Chirac a eu des propos sur la colonisation qui rejoignaient ce qui est écrit dans la loi. Lui aussi porte un regard positif sur la colonisation. Chirac n'a jamais remis en cause la colonisation.
Une mémoire partagée peut-elle être possible sans reconnaissance du fait colonial par l'Etat français ?
Cette mémoire partagée a su se manifester à certaines occasions. Lorsque le président Bouteflika est venu en France, il s'est rendu à Verdun. Les Français y vont aussi. Mais cela ne veut pas dire pour autant que l'on porte le même regard sur ce qu'a été la guerre de 14-18. Il n'empêche que dans des occasions pareilles, on se rencontre. Je pense que c'est par des gestes pareils, par de petites touches que l'on fait avancer l'histoire. Il ne faut pas surtout avoir une attitude de blocage et dire que par définition je ne reconnaîtrai pas que la colonisation a été quelque chose de négatif'. Il faut être souple, savoir entendre l'autre et le comprendre. Pour moi, la situation n'est pas bloquée en soi, encore faut-il qu'il y ait une volonté politique de le faire.
Le pragmatisme que préconise Nicolas Sarkozy suffira-t-il à faire de la relation franco-algérienne une relation rassérénée et consolidée ?
Ce qui est dommage, c'est que Sarkozy qui n'appartient pas à cette génération qui a baigné dans la guerre d'Algérie soit un facteur de blocage, alors qu'il aurait dû être un facteur d'ouverture. A cette question de reconnaissance, on n'y échappera pas, d'autres pays l'ont fait, même l'église.
Pourquoi est-ce si difficile pour la France ?
C'est peut-être trop tôt. Il faut reconnaître que la conjoncture politique ne s'y prête pas. C'est la droite qui est au pouvoir en France, une droite qui a été appuyée par des revanchards. Si ceux qui votaient auparavant pour Le Pen ont voté cette fois pour Sarkozy, Sarkozy tient compte de leur vote, il se présente comme un nationaliste. Tant qu'on tient ce type de discours (sur l'identité nationale, par exemple) on ne peut pas attendre grand-chose en terme de mémoire partagée, de reconnaissance, de condamnation d'un système parce que c'est de cela qu'il s'agit, le colonialisme en l'occurrence.
La gauche socialiste n'est pas très claire non plus sur cette question...
Dans sa lettre aux rapatriés, la candidate socialiste Ségolène Royal n'a jamais parlé de repentance. Elle était quasiment sur la même ligne que le candidat Sarkozy.
Que faut-il attendre de la visite d'Etat de Nicolas Sarkozy en Algérie ?
La visite de Sarkozy en Algérie sera dominée par les questions économiques. Pour le reste, Sarkozy va mettre l'accent sur son projet d'union de la Méditerranée. Pour l'instant, on sent bien que ce projet est perçu comme étant avant tout une façon élégante de dire à la Turquie qu'on ne veut pas d'elle au sein de l'Union européenne et qu'on lui propose un lot de consolation. C'est aussi une façon de mettre l'accent sur la lutte contre le terrorisme et l'immigration. Cela ne paraît pas être un projet très mobilisateur.
La relation de la France avec les pays du Maghreb, une relation à la carte...
Bien sûr, en privilégiant le Maroc pour de mauvaises raisons, la plupart du temps. Je pense que Hassan II avait su développer un réseau d'amitiés franco-marocain très puissant, que son fils entretient assez mal. A côté de ce réseau d'amitiés, qui ne sont pas toujours très honorables, il y a un attachement véritable des Français au Maroc. Les Marocains sont perçus comme des gens très accueillants, très ouverts. Malheureusement, avec l'Algérie, à cause de la situation de la décennie 90, à cause aussi de l'histoire, cette relation privilégiée entre les Français et les Algériens ne s'est pas tissée, et l'Algérie en pâtit. C'est pour cela qu'il y a des traitements différents, des images de marque différentes.
Vous pensez que Sarkozy va maintenir la ligne observée jusqu'ici par l'Elysée vis-à-vis du palais royal marocain ?
Je crois que la solution du problème au Sahara-Occidental n'est pas entre les mains de la France. Ce qui est vrai, c'est que la France appuie, soutient, porte à bout de bras même la diplomatie marocaine sur ce sujet-là et je crois qu'aujourd'hui la solution ne peut venir que des Etats-Unis. Si solution il doit y avoir, elle sera imposée par les Etats-Unis et par eux seuls.
On observe aussi une certaine mansuétude de la part du gouvernement, de responsables politiques français à l'égard du régime tunisien. Vous ne croyez pas que cela pose question ?
Il n'y a pas d'enjeu vis-à-vis de la Tunisie, sinon géostratégique. Il y a eu des attentats ces derniers mois, et globalement, le 11 septembre a remis en selle tout un tas de régimes arabes, et en particulier du régime tunisien, l'Algérie aussi a bénéficié du 11 septembre, pour se refaire une virginité, en quelque sorte, et donc au nom de la lutte antiterroriste on pardonne beaucoup de choses au régime tunisien. Je ne fais pas partie de ceux qui disent que le régime tunisien est un régime fasciste, c'est lui faire beaucoup d'honneur, c'est un régime policier. D'un autre côté, que faire, de quels moyens de pression bénéficie-t-on ? On ne peut pas aller très loin.
La France peut-elle contrer l'influence grandissante des Etats-Unis au Maghreb ?
Les Etats-Unis sont partout aujourd'hui. Ils sont présents le long de la bande sahélienne, ils veulent s'implanter, semble-t-il, dans le Sud algérien ; pour l'instant, Bouteflika a refusé, on sent qu'il y a une volonté américaine de s'implanter à la faveur de la lutte antiterroriste dans toute la zone. La France n'est pas de taille à contrer, seule, la présence américaine. En revanche, la diplomatie européenne, si elle existait, elle, pourrait être un contrepoids aux ambitions américaines.


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