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« On a financé n'importe quoi, n'importe comment »
Slimane Bedrani. Chercheur au Centre de recherche en économie appliquée pour le développement (CREAD)
Publié dans El Watan le 25 - 05 - 2008

Slimane Bedrani est directeur de recherche au Centre de recherche en économie appliquée pour le développement (CREAD) et professeur à l'Institut national agronomique d'Alger où il est chef du département d'économie.
Comment expliquer que la hausse de la production agricole n'ait pas eu un grand impact sur la facture alimentaire ?
Le ministère de l'Agriculture dit que l'augmentation de la production est réelle. C'est vrai. Le problème est de savoir si elle est aussi importante qu'il le dit. Ce ministère n'a jamais mis en place un système fiable de collecte de statistiques agricoles. Il ne procède pas – comme cela se fait dans les pays développés et d'autres pays voisins – à des enquêtes régulières par échantillonnage et scientifiquement fiables (dont personne ne pourrait raisonnablement contester les méthodes) pour estimer les productions agricoles et les autres grandeurs de notre agriculture telles que les superficies, les rendements, les équipements, les différents types de cheptel, l'emploi, les salaires agricoles... Dès lors, comment peut-on annoncer des baisses ou des hausses de la production agricole ? Il faut savoir que tous les chiffres de production sont fournis au ministère par les DSA qui – dépourvues de moyens d'investigation scientifiques et de moyens matériels pour collecter l'information – font des estimations « à la louche » (et de manière à ne pas trop déplaire au ministère en annonçant des chiffres trop « réels »). Ces estimations sont ensuite « redressées » au ministère (on ne sait pas trop sur la base de quoi) et, toujours, à la hausse. Pour cette raison, on peut affirmer que les chiffres annoncés par le ministère sont – pour la plupart des productions – largement surestimés et donc faux. On peut se poser la question de savoir pourquoi le ministère de l'Agriculture – qui a disposé depuis 2000 de ressources budgétaires considérables – n'a pas voulu mettre en place un système fiable de collecte des données agricoles. D'autres indices permettent de dire que les quantités produites ont été exagérées. La hausse des prix des produits agricoles – que chacun peut constater sur les marchés – ne peut être due à la hausse de la demande, celle-ci étant plutôt restreinte du fait des faibles niveaux des salaires. Dans notre situation, les prix augmentent parce que l'offre n'est pas suffisante.
On a souvent attribué cette hausse des prix à la spéculation…
On exagère le rôle de la spéculation. C'est un faux problème. Prenons par exemple le cas de la pomme de terre. Le « spéculateur » retire du marché une partie de la production au moment où les prix sont bas et la revend au moment où il n'y a pas de récoltes (donc à un prix plus élevé). Il participe ainsi utilement à la régulation du marché. Si le « spéculateur » n'était pas là, toute la production serait consommée au moment où les prix sont bas. Il ne resterait donc plus de produits pour les périodes de soudure entre deux récoltes et on demanderait à l'Etat d'importer. C'est normal que la production retirée soit vendue plus cher car elle induit beaucoup de frais de stockage et de gardiennage, sans compter le prix du risque pris par le « spéculateur » de parier sur l'avenir. Le « spéculateur » joue un rôle économique utile parce qu'il permet aux producteurs agricoles de bénéficier de prix pas trop bas et aux consommateurs de trouver des produits même en période de soudure (même si les prix sont plus élevés). La hausse des prix dont il faut parler, c'est une hausse moyenne sur toute l'année. C'est là où on s'aperçoit que d'une année à l'autre les prix augmentent parce qu'il y a insuffisance de la production nationale.
Est-ce que l'Algérie a le potentiel nécessaire pour produire de façon à alléger sa facture alimentaire ?
Il est certain que l'Algérie n'a pas les potentialités pour arriver à l'autosatisfaction sur le plan alimentaire. L'Algérie sera toujours un pays structurellement déficitaire dans certains produits agricoles. Mais elle a encore des marges devant elle qui sont relativement importantes, que ce soit pour les maraîchages, les céréales, le lait ou la viande. Nous avons des rendements faibles de la pomme de terre ou des céréales comparativement aux pays voisins et à des pays qui ressemblent climatiquement au nôtre.
Quelle appréciation faites-vous du Plan national de développement agricole (PNDA) qui devait justement favoriser une utilisation rationnelle de toutes les ressources pour arriver à de meilleurs rendements ?
Le PNDA partait d'une bonne idée. Il visait à changer les systèmes de cultures extensives pour les rendre intensives. On y est arrivé dans une certaine mesure, mais seulement dans une petite mesure et avec beaucoup de gaspillages. N'était-il pas possible de mieux dépenser l'argent public ? On aurait pu avoir des augmentations de la production beaucoup plus importantes si on avait dépensé cet argent de meilleure façon. On a subventionné des bassins d'irrigation qui ont été abandonnés ; on a subventionné des kits d'irrigation localisée sans apprendre aux agriculteurs à s'en servir ; on a fait des plantations d'arbres fruitiers dans des zones inadaptées et pour des agriculteurs n'ayant aucune pratique de l'arboriculture, donc pas du tout préparés. On a tout fait dans la précipitation, sans études sérieuses préalables. Il fallait annoncer au président de la République le maximum de réalisations, le maximum d'argent dépensé, le maximum d'emplois créés, le maximum d'hectares mis en valeur, même si une grande partie de tout cela n'existait que sur le papier. C'est de l'argent gaspillé.
Est-ce que vous voulez dire qu'il n'y a pas eu une bonne gestion du PNDA ?
Il y a eu de la précipitation. On a financé n'importe quoi, n'importe comment. Il en est ainsi de la mise en valeur des terres par la concession qui est mise en œuvre par la Générale des concessions agricoles (GCA). Chaque projet coûte des millions, voire des milliards. Il devait faire l'objet d'une étude préalable pour voir s'il est viable ou non. Or, des études extrêmement sommaires ont été faites. On a financé des projets à perte et qui n'ont jamais vu le jour. Sur certains périmètres de la GCA, des équipements neufs sont toujours stockés depuis des années sans être rentabilisés.
La problématique du foncier agricole n'a-t-elle pas été un frein pour la réussite du PNDA ?
On n'a pas besoin d'un nouveau texte de loi. Celle de 1987 suffit. Il faut juste prendre les décrets d'application qui permettent aux attributaires d'aliéner leur droit de jouissance perpétuelle et de le transmettre par héritage. C'est-à-dire leur permettre de le vendre. L'un des principaux freins de l'investissement dans l'agriculture, c'est que l'agriculteur qui fait partie d'une EAC (exploitation agricole collective, ndlr) ou qui a une EAI (exploitation agricole individuelle, ndlr) ne peut pas demander un financement à la banque en hypothéquant son droit d'usage ou de propriété. L'exploitant devrait pouvoir mettre en gage son droit d'usage. On devrait lui permettre aussi de s'associer avec une personne qui apporte des capitaux en lui cédant une partie de son droit de jouissance. Le projet de loi sur les « sociétés civiles » pose plus de problèmes qu'il n'en résout.
Quelles seraient vos recommandations pour améliorer le PNDA ?
Depuis trois ans, on a réduit les subventions agricoles. La politique de diminution des subventions à l'investissement à la ferme est un véritable crime contre l'agriculture algérienne et donc contre notre développement économique. Les engagements internationaux de l'Algérie – notamment avec l'OMC – ne l'obligent pas à être aussi drastique de ce point de vue. L'agriculteur algérien est très peu subventionné par rapport aux agriculteurs américains et européens dont parfois les subventions représentent 70% de leurs revenus. Il faut absolument que notre agriculture soit davantage subventionnée en matière d'investissement surtout pour la mobilisation de l'eau d'irrigation (forages, puits) et les équipements d'irrigation économes en eau (aspersion, goutte-à-goutte). C'est très important pour l'avenir du pays, surtout qu'il est structurellement déficitaire en eau. Mais les subventions doivent être conséquentes aussi pour les matériels agricoles qui permettent d'augmenter la productivité ou de minimiser les pertes de récolte (matériels de récoltes de tous types, moyens de stockage et de conservation). La plus grande majorité des exploitations existant en Algérie sont des petites et moyennes exploitations qui arrivent à s'en tirer difficilement. Il faut que l'Etat accorde plus de moyens aux agriculteurs pour qu'ils améliorent le niveau de la productivité, mais il faut que ces moyens soient utilisés de façon optimale sans être gaspillés. Mais subventionner les moyens d'accroître la productivité des agriculteurs et de leurs terres ne suffit pas. Il faut concevoir et mettre en place une organisation des marchés qui permette aux agriculteurs de tirer une juste rémunération de leur activité et aux consommateurs de trouver des produits à des prix qui soient en conformité avec leur pouvoir d'achat. L'Etat ne peut pas être absent en ce domaine. Il ne peut pas laisser les marchés de gros aux mains de quelques barons du commerce sans imposer des règles du jeu conformes à l'intérêt général (en particulier la règle de la transparence dans les transactions). Par ailleurs, l'avenir de l'agriculture et du secteur agroalimentaire algérien dépend de la capacité de la recherche agronomique et agroalimentaire (au sens large) à produire des connaissances et des innovations qui résolvent les problèmes fondamentaux (stress hydrique, politiques en matière de prix et de subvention, en matière de commerce extérieur,…). On doit mettre fin à l'existence des chercheurs fonctionnaires et promouvoir la rémunération des chercheurs selon la productivité scientifique et technologique. Enfin, toute politique agricole – pour réussir – doit se concevoir et s'appliquer avec la participation des agriculteurs et de leurs représentants professionnels. La chambre nationale et les chambres de wilaya – incitées à être plus représentatives des agriculteurs et des acteurs amont et aval – doivent jouer un plus grand rôle dans la définition des politiques et donc en avoir les moyens.


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