Quand tes rues et ruelles étaient désignées depuis des siècles de noms pittoresques reflétant le caractère de tes habitants et renvoyant le visiteur aux mille et un métiers et activités consacrés entre tes murs. Ces appellations inspirées par les artisans rehaussant le charme et la grâce d'une cité subsistent encore pour beaucoup et font ô Alger de toi une ville éternelle. Ainsi Zoudj Aïoune , les deux fontaines voisines de Sidi Ahlal le saint, El Djebel ou les hauteurs de la Casbah et Djebila , la petite colline du quartier dominant Zenkat Lallahoum. Souk El Djemaa, le marché du Vendredi et Zenkat Khecht Khaliata, la proue de la goélette. Tour de Babel, El Djazair la cosmopolite où l'on pouvait entendre parler plus de dix langues. Barbiers, marchands de parfums, d'épices, de henné. Boutiques de bijoux en or et argent, étals de tissus et draperies, échoppes d'artisans martelant le cuivre et le bronze. Toute une société où se côtoyaient les autochtones aux hommes de diverses origines venus du pourtour de la Méditerranée chassés par la misère ou aventuriers et intrigants. Univers qui n'a pas encore fini de réciter son destin, mué en souvenirs. Ya Bahdjati, te souviens-tu des ballons de papier coloré renfermant une bougie que les habitants retardataires utilisaient dans la nuit sombre comme une lanterne ? Privilège qui dit-on était réservé par l'autorité de la ville aux seuls musulmans et chrétiens. Le conteur se saisit de son luminaire de papier, se retira pour se fondre entre les pierres de la ville mémoire.