La mosquée Ennour, où comme on l'appelle à Cherchell, Djamaâ El Kebir ou bien la mosquée aux cent colonnes, est un lieu de culte qui occupe une place de choix dans le riche patrimoine cultuel de la wilaya de Tipasa. Sa spécificité réside, en effet, non seulement dans les détails raffinés de son architecture, mais surtout dans la place qu'il occupe depuis des siècles dans l'historiographie de la région, voire nationale. Il reflète, à travers ses contours et sa composante, tout le génie architectural des Andalous. « Djamaâ El Kebir a été construit entre 1574 et 1576 par deux architectes, dont les parents sont venus s'installer chez nous, après la chute de Grenade. L'un des deux architectes s'appelle Ibn Si Ayad », nous éclaire M'hamed H., un habitant de Cherchell qui s'intéresse de près à tout ce qui a trait au patrimoine cultuel et culturel local. Selon lui, ce joyau architectural partage sa forme extérieure et son type esthétique intérieur avec quelques rares mosquées qui existent entre autres à Ténès, en Egypte, en Tunisie, au Maroc. Témoin encore debout du génie architectural des Andalous, ce lieu de culte suscite toujours de l'admiration. « Construite sur les ruines d'un temple romain, la mosquée aux cent colonnes recèle des vestiges d'une immense richesse architecturale, dont une partie a été mise au jour lors des fouilles pratiquées en 1861 dans sa cour », raconte, pour sa part, Larbi Houari, ancien président de l'association ARC de Cherchell. Et d'ajouter : « En 1850, cette mosquée a été transformée en un hôpital militaire avant de devenir 50 ans plus tard un hôpital civil. Après l'indépendance, il garda la même vocation. Ce n'est qu'en 1984 que ce lieu chargé d'histoire reprend enfin sa fonction d'origine. » Construit sur une surface de 1.734 m2, la mosquée aux cent colonnes, située dans le centre-ville de Cherchell, dispose d'un patio de 160 m2, où se trouve un joli bassin pour les ablutions. Les colonnes jalonnant sa salle de prières sont surmontées par des voûtes dans une magnifique disposition. « Les colonnes de la mosquée sont de pierres granitiques acheminées depuis une carrière située sur le territoire de Sidi Ghilès », précise M'hamed H. Selon ce dernier, l'émir Abdelkader a effectué la prière du Dohr dans cette mosquée avant de rejoindre son lieutenant Malek El Barkani, alors chef de la résistance des Beni Menaceur. Les histoires narrant les glorieuses pages de ce lieu de culte n'en finissent pas à Cherchell. « Pour nous, cette mosquée est un patrimoine qui, en plus de subir les épreuves du temps, est dans un état qui nécessite en urgence une opération de restauration. Il faut sauver notre patrimoine », lance M'hamed H.