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Mawlid Ennabaoui - Zaïm Khenchelaoui (Anthropologue) : «Le Mawlid, une célébration populaire, socioculturelle et historique»
Publié dans Horizons le 23 - 02 - 2010

Le Mawlid Ennabaoui est célébré, pour la première fois, à Tlemcen, il y a sept siècles de cela. Cette ville garde la primauté historique concernant la célébration du Mawlid par rapport aux autres villes. Les autres pays magrébins n'ont commencé à célébrer officiellement cet événement que des siècles plus tard, après l'Algérie. Dans cet entretien, l'anthropologue et chercheur, Zaïm Khenchelaoui, revient sur l'histoire de la célébration du Mawlid en Algérie ainsi que dans le monde musulman. Il y évoque également les pétards dont l'utilisation remonte, selon lui, au temps des janissaires. Peut-on considérer aujourd'hui le mawlid Enabaoui comme une fête purement religieuse ?
Le Mawlid Enabaoui, c'est plus qu'une fête religieuse. C'est l'extrait de naissance de l'islam. Sans le mawlid, il n'y aurait eu ni Aïd El Fitr, ni Aïd El Adha. Cela dit, ceci ne signifie pas pour autant que nous pouvons considérer le Mawlid comme une troisième fête dans le sens religieux du terme. Il s'agit plutôt d'une célébration populaire, socioculturelle et historique mais nullement religieuse. C'est un moment fort durant lequel les musulmans rendent hommage à leur Prophète. Il faut donc arrêter avec les discours sceptiques qui sèment le doute et la discorde parmi les fidèles d'autant que les algériens y sont pour quelque chose dans l'institution de cette fête dans l'Egypte Fatimide le 11 juin 972.
Depuis quand la naissance du Prophète est-elle célébrée ?
La célébration de la naissance du Prophète de l'islam n'est pas évoquée officiellement avant le troisième siècle de l'hégire. Or, certains indices historiques laissent penser que cet événement aurait été célébré plus tôt, mais en privé par le clan des banû Hâchim dans le Hedjaz, au Yémen, en Irak, en Algérie, en Tunisie et très probablement au Maroc. Un événement privé auquel les gens communs n'avaient pas le droit d'y assister.
L'évocation la plus vieille du Mawlid comme commémoration publique, mais non encore officielle, nous renvoie au lieu béni (la maison du Prophète) qui ouvre ses portes au public chaque lundi du mois de Rabie al-awwal. Selon les historiens du 7e siècle, le jour du Mawlid Enabaoui, les fidèles ne s'adonnent à aucune activité commerciale et s'empressent de visiter le lieu de naissance du Prophète. Ce jour-là, la Kaâba est ouverte au public et visitée. Pour sa part, le célèbre voyageur du 8e siècle Ibn Battûta, confirme cela. Toujours d'après Ibn Battûta, le Cadi ou juge suprême distribue, le jour du mawlid, de la nourriture aux descendants du Prophète ainsi qu'à tous les habitants de la Mecque.
Quand est-ce que le mawlid est célébré officiellement ?
L'officialisation de la célébration du Mawlid Enabaoui a eu lieu au Caire, en Egypte, le 8 rabi' al-awwal de l'an 362 H (973). Mais la date canonique de cette célébration est fixée définitivement le 12 rabi' al-awwal.
Toutefois, certains indices laissent croire que les Fatimide auraient initié cette fête lorsqu'ils étaient en Afrique du Nord du temps de l'imam ‘Ubayd Allah al-Mahdi, de son fils al-Qâ'm bi Amrillah, de son petit-fils al-Manṣūr Billāh ainsi que d'une partie du règne du calife al-Mu'izz li dîn Allah.
C'est-à-dire la période qui va de 909 à 972, avant que ce dernier ne décide de transférer le siège du califat en Egypte. Cela avancerait la date du Mawlid au IIIe siècle de l'Hégire. Les Fatimides, qui étaient les descendants du Prophète par l'intermédiaire de sa fille Fatima, ont officialisé la célébration de la naissance du Prophète pour la première fois sur ordonnance officielle de l'Etat juste après le transfert de la cour impériale en Egypte depuis Ikjane en Petite Kabylie - Algérie - après un passage par Kairouan et Mahdiyya en Tunisie.
Cela présuppose que cette célébration se pratiquait très probablement dans le cercle familial des descendants du Prophète avant son institutionnalisation en Egypte au IVe siècle de l'hégire (Xe siècle de l'ère chrétienne). L'on doit au célèbre chroniqueur natif du Caire al-Maqrîzî (1364-1442) une précieuse description du Mawlid tel qu'il était célébré du temps des Fatimides.
Après la chute des Fatimides en 1170, il y aurait eu une première tentative d'officialisation du Mawlid chez les sunnites en Syrie au XIIe siècle. Mais la pratique de cette célébration a été vite stoppée aussi bien en Syrie qu'en Egypte par les Ayyoubides qui venaient de renverser les Fatimides et faire allégeance au calife de Bagdad. Le Mawlid redevint de nouveau un événement limité à des cercles de famille et à des milieux fermés.
Mais il a été officialisé à nouveau…
En effet, il a retrouvé son statut d'événement officiel de nouveau en 1207, dans une ville située près de Mossoul, en Irak. Au fait, c'est grâce à un soufi kurde nommé Omar Ibn Muhammad al-Mulla qu'aujourd'hui nous avons le privilège de fêter le Mawlid. Ibn Kathir a décrit dans sa Chronique Universelle la façon dont on célébrait le Mouloud dans la cour du roi d'Erbil, qui organisait une grande cérémonie au mois de Rabi‘ al-awwal. Il faisait étaler sur une nappe 5 000 moutons rôtis, 10 000 poulets, 100 000 coupes à crèmes, 30 plats de gâteaux ... Il organisait un concert spirituel pour les soufis et dansait avec eux du début de l'après-midi jusqu'à l'aube.
Dès le début du mois de safar, ils se mettaient à donner la plus belle décoration aux dômes. Sous chaque coupole se tenait un groupe de musiciens. Pendant cette période, les gens chômaient et n'avaient d'autre occupation que de venir regarder les fêtards et tourner autour d'eux […].
Deux jours avant le Mawlid, le roi faisait accompagner des chameaux, des bœufs et des moutons de tambours, de chants et d'actes de divertissements, faisant progresser le cortège jusqu'à la place publique. Dans la nuit de la cérémonie, il organisait un concert à la citadelle après la prière du coucher du soleil. En 1910, le Mawlid obtient le statut officiel d‘une fête nationale dans l'ensemble de l'empire ottoman.
Aujourd'hui, le Mawlid est jour férié dans tous les pays musulmans. Ironie du sort, le seul pays où le Mawlid n'est pas fêté officiellement, est le pays qui a vu naître le Prophète. Le ministère des affaires religieuses considère cette fête comme étrangère à l'Islam.
Depuis quand célèbre-t-on le Mawlid en Algérie ?
A peine un siècle après sa réintroduction en Orient, le Mawlid est officiellement célébré au Maghreb. Il est célébré pour la première fois dans la ville de Tlemcen. Des auteurs affirment que le premier monarque qui aurait officiellement célébré le Mawlid dans la partie occidentale de l'islam serait le sultan ziyanide Abou Hammou. On peut lire dans ces témoignages de précieux passages où l'on nous met en présence des fastes du Mawlid tel qu'il était fêté au machwar de Tlemcen, il y a sept siècles de cela !
On remarquera que la célébration «officielle» du Mawlid en Tunisie est très tardive comparée à l'Algérie et remonte à peine à un siècle puisque c'est seulement au XIXe siècle qu'il est fêté. Au Maroc, cette fête aurait été introduite pour la première fois en 1292. Mais on ne sait pas si elle revêtait le même caractère officiel qu'à Tlemcen qui garde la primauté historique pour le Maghreb à l'instar d'Erbil pour le Mashreq.
Chaque région en Algérie célèbre à sa façon le Mawlid. Pourquoi cette différence dans les traditions ?
Il est naturel, voire salutaire, de relever toute cette diversité culturelle que le cœur large de l'islam a su accueillir et intégrer dans le respect et la fraternité. L'islam reconnaît les spécificités culturelles des peuples et des nations qui le professent. C'est un Message divin annoncé à l'humanité toute entière avec ses langues et cultures diverses et variées. Par conséquent, il est tout à fait normal qu'en Algérie nous fêtions le Mawlid autrement que chez nos coreligionnaires indiens ou chinois.
Au sein même de notre pays, nous fêtons le Mawlid différemment en fonction des expressions culturelles propres à chaque région. Ce qui témoigne de notre richesse culturelle. Cela dit, le Mawlid en Algérie reste tout à fait caractéristique de notre psychologie collective. A ce titre, nous pouvons dire que c'est une fête bien de chez-nous.
Comment sommes-nous arrivés à le célébrer avec des pétards ?
Avant, les pétards étaient «made in Algeria» et ils étaient moins agressifs qu'aujourd'hui. Leur fabrication se faisait à Belcourt. Cette pratique remonte probablement aux Janissaires. C'est pour exprimer un moment de joie que ces lumières sont tirées vers le Ciel. On dit que la lumière descend du ciel sauf en ce jour béni où la lumière y monte en signe de fidélité au pacte qui lie les Algériens à leur foi.
L'utilisation des pétards met-elle en cause la symbolique du Mawlid ?
Pas du tout. Au contraire. C'est la fête des lumières qu'il convient de protéger par la loi et sauvegarder des risques de disparition. Il y va de la vitalité de notre patrimoine culturel immatériel. Je dirais qu'il suffit juste d'encadrer ces pratiques qui ont, peut-être, l'air de s'exécuter dans l'anarchie. Il ne faut jamais interdire une pratique culturelle instituée par l'histoire et consacrée par le peuple.
Pourquoi célèbre-t-on aujourd'hui le Mawlid ?
Cette pratique remémore la nativité du Prophète. Le Mawlid serait en quelque sorte une récapitulation du rituel arabe de la'aqîqa qui fut célébrée en son honneur par son grand-père Abd al-Muttalib. Autrement dit, le Mawlid est un rattrapage du temps sacré, celui qui marque la naissance de celui qui va être le Roi du Monde. Cet événement salvateur, longtemps annoncé par les prophètes, n'est pas simplement célébré mais vécu ici et maintenant. C'est le temps qui s'arrête ou qui revient au point zéro, c'est-à-dire au commencement et à l'origine de notre destin en temps qu'héritiers de son message divin.
C'est donc un moment fort ; un instant de beauté et de vérité qui nous interpelle dans notre conscience profonde. C'est, d'ailleurs, l'interprétation anthropologique que l'on peut donner aux arômes délectables du plat traditionnel de la temmina que nos mères et grand-mères se pressent de préparer avec amour et dévotion le matin du Mouloud en l'honneur de Notre-Dame Amina, comme si celle-ci venait juste d'accoucher de l'enfant-béni. Il s'agit là d'une reproduction symbolique de la naissance, non pas en tant qu'événement qui aurait eu lieu dans un temps passé, mais plutôt comme un événement C'est là toute la magie de cette fête pas comme les autres.
Loin d'être un simple souvenir du passé, le Mouloud revêt le caractère d'un événement présent. Si bien que l'enfant-béni que l'on célèbre naît chaque année et dans chaque famille algérienne.


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